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Le 21 août 2020

 

L'action paulienne est une action engagée par un créancier contre un débiteur qui a fait un acte en fraude de ses droits, par exemple lorsqu'il a organisé son insolvabilité ou lorsqu'il a réduit la valeur de son patrimoine, dans le but de rendre vain l'exercice de toute voie d'exécution.
 

Par un acte du 2 septembre 2008, M. A a donné la nue-propriété d’un bien immobilier lui appartenant à Mme A, sa fille alors mineure.

Se prévalant d’une créance de suppléments d’impôt sur le revenu mis à la charge de M. A, au titre des années 2004 et 2005, à l’issue d’une procédure de vérification de comptabilité et invoquant une fraude paulienne, le comptable responsable du service des impôts des particuliers du 14e arrondissement de Paris-Alésia et le comptable responsable du pôle de recouvrement spécialisé de Paris Sud-Ouest (les comptables publics) ont assigné M. A et sa fille mineure, représentée par sa mère, afin que cette donation leur soit déclarée inopposable.

Devenue majeure, Mme A a repris l’instance.

M. A et Mme A ont fait grief à l'arrêt d'appel de déclarer inopposable aux représentants de l’administration fiscale l’acte de donation du 2 septembre 2008 et de dire ceux-ci fondés à poursuivre le recouvrement de leurs créances pour un montant total de 129 265 euros, hors pénalités, entre leurs mains, alors :

  • « 1°/ que pour exercer l’action paulienne, le créancier doit établir que l’acte attaqué a provoqué ou aggravé l’insolvabilité du débiteur tant à la date de l’acte qu’à la date de la demande du créancier ; qu’en déclarant inopposable aux créanciers l’acte de donation intervenu le 2 septembre 2008 entre M. A… et sa fille, sans caractériser l’état d’insolvabilité du débiteur, ni à la date de conclusion de l’acte, ni à celle de l’action exercée par les créanciers, la cour d’appel a privé sa décision de base légale au regard de l’article 1167 du code civil, en sa rédaction applicable à la cause ;
  • 2°/ que seuls sont attaquables par la voie de l’action paulienne les actes établis par le débiteur en fraude des droits du créancier ; que la fraude pauliennerésulte de la connaissance que le débiteur a du préjudice causé au créancier par l’acte litigieux ; qu’en déclarant inopposable aux créanciers l’acte de donation intervenu le 2 septembre 2008 entre M. A… et sa fille, sans caractériser la connaissance, par le débiteur donateur, du prétendu préjudice causé aux créanciers, la cour d’appel a derechef privé sa décision de base légale au regard de l’article 1167 du code civil, en sa rédaction applicable à la cause ;
  • 3°/ que la reconnaissance de la fraude paulienne a pour seul effet de rendre l’acte frauduleux inopposable aux créanciers demandeurs et non de permettre à ces derniers d’obtenir le paiement de leur créance de la part du tiers bénéficiaire de l’acte ; qu’en jugeant que les créanciers étaient fondés à poursuivre le recouvrement de leurs créances pour un montant total de 129 265 euros « entre les mains » de M. U… D… A… et de Mlle K… L… A…, donataire, la cour d’appel a violé l’article 1167 du code civil, en sa rédaction applicable à la cause. »

Pour la Cour de cassation :

En premier lieu, après avoir exactement énoncé que l’action pauliennesuppose qu’en s’appauvrissant le débiteur ait conscience du préjudice qu’il cause à son créancier et que ce dernier ne peut engager cette action que si le patrimoine de son débiteur est insuffisant pour permettre le recouvrement de sa créance, l’arrêt relève, d’abord, qu’à la date de la donation de l’immeuble litigieux, M. A avait reçu les propositions de rectifications mettant à sa charge des impositions supplémentaires, les créances en résultant s’établissant de manière certaine à la somme totale de 129 265 euros, et, ensuite, que le fonds de commerce exploité par M. A, seul autre élément de patrimoine dont il était fait état devant la cour d’appel, était grevé de diverses inscriptions d’un montant supérieur à sa valeur.

En l’état de ces énonciations, constatations et appréciations, faisant ressortir que M.A se trouvait dans un état d’insolvabilité apparente à la date de la donation, qu’il s’était volontairement appauvri en connaissance du préjudice causé au Trésor public et qu’il était encore dans l’incapacité de répondre de ses dettes fiscales à la date d’exercice de l’action paulienne, la cour d’appel a légalement justifié sa décision.

En second lieu, la cour d’appel ayant écarté les prétentions des comptables publics relatives aux impositions dues pour les années 2006 et 2007, le chef du dispositif de l’arrêt disant ces comptables fondés à poursuivre le recouvrement de leurs créances pour un montant de 129. 265 EUR, hors pénalités, entre les mains de Mme A, donataire, en conséquence de la déclaration d’inopposabilité de la donation, s’interprète nécessairement comme autorisant les comptables publics à poursuivre le recouvrement de ces seules créances, à l’exclusion de celles correspondant aux impositions écartées.

Le pourvoi est rejeté.

Référence: 

- Cour de cassation, Chambre commerciale, 1er juillet 2020, RG 18-12.683, inédit