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Le 24 septembre 2019

La cour indique en préambule que le contentieux de l’aide sociale étant désormais attribué au moins pour partie aux juridictions judiciaires, la cour est compétente pour qualifier le contrat litigieux.

L’art. L 132-8 2° du Code de l’action sociale et des familles dispose que "des recours sont exercés, selon le cas, par l’Etat ou le département:

contre le donataire, lorsque la donation est intervenue postérieurement à la demande d’aide sociale ou dans les dix ans qui ont précédé la demande".

La qualification donnée par les parties à un contrat ne fait pas obstacle au droit pour l’administration de l’aide sociale de rétablir, s’il y a lieu, sa nature exacte.

La stipulation pour autrui constituée par le contrat d’assurance vie peut être requalifiée en donation, si l’administration établit l’intention libérale du souscripteur vis à vis du bénéficiaire au moment de la souscription du contrat.

La preuve de l’intention libérale incombe au département qui, en l’espèce, met en relation trois élements factuels: l’âge du souscripteur(88 ans), le montant du capital (77. 867,66 euro) et le montant de l’actif successoral (3. 453 euro).

La cour constate que le contrat d’assurance vie litigieux n’a pas été communiqué par les parties.

Le département a seulement communiqué:

—  le décompte de la somme récupérable, faisant apparaître le montant des frais d’hébergement soit 7.8638 euro, le montant de la somme récupérée sur la vente d’un bien immobilier 29.245,33 euro et le montant de la somme restant à récupérer soit 21. 211,34 euro;

—  la lettre recommandée avec accusé de réception en date du 7 décembre 2012 par laquelle le conseil départemental des Alpes maritimes a réclamé à Madame Z Y le remboursement de la somme de 21. 211,34 euro;

—  les avis d’imposition de Madame X entre 2003 et 2007;

—  la déclaration sur l’honneur de Madame X mentionnant notamment qu’elle a eu communication du document concernant les recours exercés en matière d’aide sociale et qu’elle certifie l’exactitude des informations déclarées( ces dernières ne figurent pas au dossier de la cour).

L’intention libérale s’apprécie au moment de la souscription du contrat.

Le seul fait d’ouvrir un contrat d’assurance vie à l’âge de 88 ans ne peut à lui seul caractériser l’intention libérale, même si l’aléa de la durée de vie est réduit au regard de l’espérance de vie moyenne d’une femme française.

Par ailleurs, aucun élément du dossier ne renseigne sur l’état de santé de Madame X à l’époque de la souscription. Madame Y, qui n’a pas la charge de la preuve, le décrit comme tout à fait bon, soulignant à cet égard que Madame X est décédée à l’âge de 99 ans et qu’elle n’est allée en maison de retraite qu’en 2005 soit 7 ans après la souscription du contrat d’assurance vie.

Le département ne soumet à la cour aucun renseignement sur le montant et les dates de versement des primes sur le contrat d’assurance, les facultés éventuelles de rachat par l’adhérent, ledit contrat n’étant au surplus pas communiqué.

La situation financière et patrimoniale de Madame X entre le jour de l’ouverture du contrat et le jour de son admission en maison de retraite n’est pas entièrement connue. Seuls les avis d’imposition de 2003 à 2007 sont produits.

Ainsi, si Madame X disposait à son admission en maison de retraite de faibles ressources, soit 4.999 euro ar an, et que l’actif successoral s’élevait d’après les indications non documentées du conseil départemental, à la somme de 3.453 euro le 2 juin 2010, il ne peut s’en déduire automatiquement que tel était le cas dans les années antérieures et que Madame X s’était, ainsi que le soutient le département, dépouillée de son entier patrimoine en souscrivant ce contrat.

Il résulte de l’analyse des éléments factuels relevés par le conseil départemental pour justifier la requalification que ce dernier ne rapporte pas la preuve de l’intention libérale de Madame X et ne pouvait en conséquence requalifier le contrat d’assurance-vie en donation.

La décision de la Commission départementale de l’action sociale sera en conséquence infirmée et il sera fait droit au recours de Madame Z Y.

La décision du Conseil départemental des Alpes Maritimes en date du 7 décembre 2012 sera annulée ainsi que le titre exécutoire émis le 18 juin 2016.

Référence: 

- Cour d'appel d'Aix-en-Provence, Chambre 4-7, 20 septembre 2019, RG n° 19/00931