Inscription à notre newsletter

Recevez toutes les informations importantes directement dans votre boite mail. Cliquez ici

Partager cette actualité
Le 24 juin 2013
Le fait que M. B soit résident algérien ne signifie pas pour autant qu'il dispose d'une pluralité d'habitations en France ou l'étranger. Le congé ne saurait être validé sur ce fondement.
Suivant acte sous seing privé du 11 mars 1985, la société Assurances Générales de France a renouvelé le bail consenti à M. Belkacem B soumis aux dispositions de la loi du 1er sept. 1948 et portant sur un appartement situé [...] (17ème arrondissement), composé de deux pièces principales avec WC communs à l'extérieur.

Le 15 avr. 2008, Mme Nadia D a acquis ce bien de la société Gramont Sas.

Autorisée par ordonnance sur requête du 16 sept. 2008, elle a fait procéder à un constat par Maître Adam, huissier de justice, des conditions d'occupation du logement.

Par acte d'huissier de justice du 25 juin 2009, elle a fait signifier à M.Belkacem B un congé à effet du 30 sept. 2009 sur le fondement des articles 10 2° et 10 3° de la loi du 1er sept. 1948, congé contesté par M.Belkacem B, par acte de "protestation à congé du 4 août 2009", puis l'a fait assigner, par acte d'huissier du 8 mars 2010, devant le tribunal d'instance de Paris (17e) essentiellement en validation de ce congé et expulsion.

Le tribunal d'instance, par jugement du 29 juin 2010, a débouté Mme Nadia D de ses demandes et l'a condamnée à payer à M.Belkacem B la somme de 500 EUR en application de l'art. 700 du CPC et aux dépens.

Appel a été interjeté par Mme Nadia D le 21 juill. 2010.

En application des articles 10 -2° et 10 - 3° de la loi du 1er sept. 1948 n'ont pas droit au maintien dans les lieux, les personnes définies aux articles 4, 5, 6, 7 et 8 qui :

2° n'ont pas occupé effectivement par elles-mêmes les locaux loués ou ne les ont pas fait occuper par les personnes qui vivaient effectivement avec elles (...). L'occupation doit avoir duré huit mois au cours d'une année de location, à moins que la profession, la fonction de l'occupant ou tout autre motif légitime ne justifie une occupation moindre (...),

3° qui ont plusieurs habitations, sauf pour celle constituant leur principal établissement à moins qu'elles ne justifient que leur fonction ou leur profession les y oblige.

Au soutien de son appel, la propriétaire expose avoir, avant d'acquérir l'appartement, tenté de prendre attache sans succès avec M. Belkacem B, résident algérien, toutes les lettres qu'elle lui a adressées étant revenues avec la mention "non réclamé", qu'il en a été de même pour le courrier postérieur à la vente qu'elle lui a envoyé le 24 avr. 2008, que la gardienne de l'immeuble lui a appris que le locataire utilisait cet appartement comme pied à terre lorsqu'il venait à Paris mais qu'il résidait en réalité à l'étranger, avait confié les clefs de l'appartement à un tiers qui venait récupérer régulièrement son courrier.

Elle ajoute que lors d'un rendez vous organisé le 29 avr. 2008 par l'intermédiaire de la gardienne, M. B lui a confirmé sa résidence à l'étranger en lui laissant les coordonnées de M. L, ami qu'elle pouvait contacter en cas d'urgence, qu'à la suite d'un dégât des eaux survenu dans l'appartement, elle a tenté de joindre sans succès l'intimé, que ce dernier a déclaré à Maître Adam, huissier de justice commis sur requête, qu'il résidait à l'étranger, étant résident algérien, qu'il n'était venu au cours des mois précédents que trois fois à Paris, ces déplacements lui coûtant cher, faits corroborés par la présentation de son passeport.

Elle prétend que les éléments produits par M. B, locataire, sont "notoirement insuffisants" pour rapporter la preuve de ce qu'il habiterait l'appartement,

Considérant que M. B rappelle qu'il appartient à Mme Nadia D de rapporter la preuve des faits qu'elle invoque au soutien de son action, prétend que tel n'est pas le cas et que lui-même démontre le contraire par les attestations qu'il produit, le paiement de la taxe d'habitation, de l'assurance locative et la production de son avis d'imposition pour l'année 2009.

Pour apprécier la durée d'occupation de huit mois par an exigée par l'article 10-2°, le juge doit se placer à la date d'effet du congé lorsque l'assignation est délivrée dans l'année qui suit cette date, ce qui est le cas en l'espèce, le congé ayant été délivré le 25 juin 2009 et l'assignation le 8 mars 2010,

Il appartient à Mme Nadia D de rapporter la preuve de ce défaut d'occupation sur le fondement de ce texte ainsi que du fait qu'en application de l'art. 10-3°, M. B disposerait d'une pluralité d'habitations.

Le fait que M. B soit résident algérien ne signifie pas pour autant qu'il dispose d'une pluralité d'habitations en France ou l'étranger.

Le congé ne saurait être validé sur ce fondement.

Pour établir que M. Belkacem B n'occupe pas les lieux huit mois par an, Mme Nadia D produit les lettres demeurées sans réponse qu'elle lui a adressées les 10 mars 2008 et 31 mars 2008 afin de visiter l'appartement avant de l'acquérir, la lettre du 24 avr. 2008 par laquelle elle l'informait de ce qu'ayant acquis le bien le 24 avr. 2008, elle souhaitait accéder à l'appartement "afin de réaliser des travaux dans les lots voisins (plomberie)", la lettre recommandée avec accusé de réception adressée par son notaire à l'intimé le 15 avr. 2008 pour l'informer du changement de propriétaire, revenue avec la mention "non réclamée" ainsi que le procès-verbal de constat établi par Maître Adam, huissier de justice désigné par ordonnance sur requête et qui a pu rencontrer M. Belkacem B, après deux tentatives infructueuses les 21 oct. et 25 nov. 2008, le 28 nov. 2008.

L'absence de réponse aux courriers dont elle ne justifie que d'un seul envoi par lettre recommandée revenue avec la mention non réclamée, ne suffit pas à rapporter la preuve du défaut d'occupation des lieux pendant la durée légale de huit mois au cours de l'année précédant la délivrance du congé ou des années antérieures.

Si M. Belkacem B a déclaré à l'huissier de justice "habiter les lieux depuis 1977, être très souvent en déplacement, être spécialement venu d'Algérie trois fois: une fois pour des travaux, une fois pour un huissier de justice et une fois pour moi; que cela lui a coûté beaucoup d'argent', l'huissier poursuivant 'il m'indique être donc rentré spécialement pour moi le 28 nov. 2008, que cela est inscrit sur le passeport qu'il me présente. Il m'indique ne pas sous-louer les lieux et les occuper personnellement lorsqu'il vient en France", il ne peut être déduit de ces déclarations qu'il habite les lieux moins de huit mois par an.

M. B, qui soutient vivre dans les lieux, produit, outre sa carte de résident algérien, son avis d'imposition pour l'année 2009, une attestation d'assurance pour les années 2009 et 2010 mentionnant l'adresse des lieux, des attestations de voisins ainsi que celle de Mme H, gardienne de l'immeuble du 26 mars 2010, aux termes de laquelle elle certifie qu'il vit de manière permanente et régulière depuis 1998, date à laquelle elle a pris ses fonctions, le rencontrer régulièrement sauf lorsqu'il s'absente pour ses vacances en Algérie, aucun lien de subordination n'existant, entre un locataire et une gardienne d'immeuble contrairement à ce que soutient, pour contester cette attestation, Mme Nadia D.

Ce congé sera, en conséquence, annulé comme le requiert M. B.
Référence: 
Référence: - Cour d'appel de Paris, Pôle 4, Ch. 4, 18 juin 2013 (RG N° 10/15359)