Yves et Isabelle, son épouse, ont acquis suivant acte du 1er septembre 2003 une propriété rurale d'une contenance de 1 ha 96 a 54 ca sise à [...], comprenant un bâtiment en pierres avec annexe contiguë, moyennant le prix de 237'850 euro.
Les acquéreurs ont entrepris sur cet immeuble d'importants travaux pour un montant de 294'004,19 euro HT afin de transformer ce bâtiment, initialement à usage viticole, en maison d'habitation avec construction non attenante d'un bâtiment en bois. Ces travaux qui ont donné lieu à un permis de construire, ont été réalisés dans le courant de l'année 2004 et achevés le 2 février 2005.
Dès le 4 novembre 2005, les époux D ont confié la vente de cet immeuble à la société AXEL C. IMMOBILIER.
Par le truchement de cette société, une vente sous conditions suspensives a été signée le 23 décembre 2005 au profit des époux LE G, moyennant un prix net de 660'000 euro, les acquéreur devant supporter, en outre, les frais de négociation d'un montant de 22'000 euro et une provision pour frais d'acte de 40'690 euro. L'acte précise que la construction ancienne édifiée sur le terrain vient d'être totalement restaurée et qu'une construction récente en bois traité à usage d'atelier et de préau, non attenante à l'habitation, a été édifiée.
Cette vente a été réitérée en la forme authentique par acte reçu le 16 mars 2006 par Antoine D, notaire associé d'une SCP.
Les acheteurs ont payé, au titre des droits d'enregistrement, une somme de 33'594 euro.
Le 23 décembre 2009, les époux acquéreurs ont reçu une proposition de rectification émanant du service de fiscalité immobilière qui estimait que le régime fiscal applicable était, au regard de la nature des travaux réalisés et de leur importance, celui de la TVA immobilière, à la charge du vendeur, et qu'il en résultait un rappel de 126'763 euro, ramené à la somme de 102'753 euro, après déduction de la TVA payée à l'occasion des travaux.
Les époux ont introduit une réclamation contentieuse qui a été rejetée.
Ils ont recherché la responsabilité des professionnels ayant contribué à la vente.
L'agent immobilier a manqué à son devoir d'information et de conseil en s'abstenant d'interroger son client sur l'ampleur et la nature des travaux effectués et leurs incidences au plan fiscal alors que les circonstances de la vente (différence entre le prix d'achat et le prix de vente, ampleur des travaux, notification de la vente à la SAFER) auraient dû attirer son attention. A cet égard, Il ne peut s'exonérer de sa responsabilité en invoquant sa bonne foi, qui est indifférente, ou le caractère incomplet des informations transmises par le vendeur. Ce dernier a perdu une chance de conserver le bien et de ne pas payer la TVA immobilière à sa charge. Cette perte de chance est cependant réduite compte tenu de la procédure de divorce en cours entre les époux. La cour l'estime à 10 %, ce qui ouvre droit à une indemnité d'un montant de 8'360 euro à la charge de l'agent immobilier.
Le notaire, rédacteur de l'acte authentique de revente de la propriété transformée, a également commis une erreur en estimant que la fiscalité applicable était celle des droits d'enregistrement à la charge des acquéreurs et non celle de la TVA immobilière à la charge du vendeur qui a fait l'objet d'une proposition de rectification émanant du service de fiscalité immobilière pour un montant final de 102'753 euro alors que les pièces en sa possession indiquaient qu'il s'agissait d'anciens chais totalement rénovés transformés en maison d'habitation. Le notaire ne peut donc s'exonérer de sa responsabilité en invoquant le défaut d'information par le vendeur du permis de construire obtenu. Ce manquement est à l'origine d'une perte de chance de 90 % d'obtenir que les acquéreurs supportent une partie du montant de la TVA immobilière, préjudice réparé par l'octroi d'un montant de 27'300 euro, mis in solidum à la charge du notaire et de l'agent immobilier. Dans les rapports entre solvens, la charge de l'indemnisation est répartie à hauteur de 70 % pour le notaire, dont les compétences en matière fiscale sont plus étendues, et qui disposait en outre de renseignements plus complets pour apprécier à leur juste importance les travaux effectués, et de 30 % pour l'agent immobilier. En raison de ce manquement, le vendeur n'a pu réglé immédiatement le montant de la taxe et supporté une pénalité d'assiette à hauteur de 15'080 euro. Il a également dû engager des frais d'avocat pour contester la proposition de rectification devant le tribunal administratif, à concurrence de 13'590 euro.
En revanche, la cour rejette la demande indemnitaire formée au titre des intérêts moratoires qui ne sont que la contrepartie du choix de contester l'impôt sans en acquitter le montant.
Au titre des deux postes retenus, le notaire est ainsi tenu de verser au vendeur, solidairement avec la SCP notariale, des dommages et intérêts d'un montant total de 28'670 euro.
- Cour d'appel de Rennes, Chambre 1, 2 octobre 2018, RG n° 17/04524