La société Tuco Energie reproche au tribunal d'avoir considéré qu'elle engageait sa responsabilité contractuelle sur le fondement de l'article 1147 du Code civil dans sa rédaction antérieure à l'ordonnance du 10 février 2016, à la suite de l'impossibilité pour M. S. et Mme B. de bénéficier du crédit d'impôt consécutif à l'installation des panneaux photovoltaïques.
D'une part, elle soutient que son champ de compétence se limitait à la fourniture et à la pose d'équipements énergétiques dits 'écologiques' de sorte que son devoir de conseil ne dépassait pas les questions relatives à l'orientation des panneaux photovoltaïques ou au matériel utilisé et ne pouvait concerner des questions de défiscalisation. Elle rappelle que les acquéreurs disposaient de quatorze jours pour se renseigner sur le montant du crédit d'impôt auquel ils avaient éventuellement droit soit auprès de leur service des impôts soit auprès d'un conseiller fiscal habilité. Elle fait valoir que le livret de production solaire délivré aux acquéreurs est une simple plaquette d'information publicitaire qui ne revêt pas de caractère contractuel et ne fait que mentionner l'existence d'un crédit d'impôt, soulignant que le montant de 16 800 euros n'a qu'un caractère indicatif et qu'il n'a pour but que d'informer les clients du montant de dépenses pouvant bénéficier d'un crédit d'impôt.
D'autre part, elle expose que la loi de finance 2014 supprimant l'éligibilité du crédit d'impôt a été publiée au bulletin officiel des finances publiques le 30 décembre 2013 et ainsi portée à la connaissance de tous les contribuables à compter de cette date. Elle en conclut que lors de la signature du bon de commande le 26 juin 2014, les consorts B.-S. étaient censés avoir parfaitement connaissance de la suppression du crédit d'impôts.
Les intimés soutiennent quant à eux, que la société Tuco Energie a manqué à son obligation de conseil et de renseignement puisque l'avantage fiscal escompté n'a jamais été servi en raison d'une évolution législative. Ils précisent qu'ils n'auraient jamais consenti à l'achat en l'absence de l'avantage fiscal correspondant à près de la moitié du coût de l'installation.
Il est constant que le vendeur de la société Tuco Energie a fourni à M. S. et Mme B., lors du démarcharge à domicile, un livret du producteur solaire comportant une page entière consacrée au crédit d'impôt généré par l'installation du matériel photovoltaïque. Il n'est pas davantage contesté que le bon de commande signé le 26 juin 2014 mentionne en face de la rubrique 'montant du crédit d'impôt disponible' la somme manuscrite de 16 800 euros, étant rappelé que le coût total de l'installation est de 28 500 euros. De surcroît, sur le bon de commande, à la rubrique 'information sur le crédit d'impôt : utilisation du crédit d'impôt dans les cinq années précédentes', il est coché la case 'non'.
Par ailleurs, ainsi que le tribunal l'a souligné, la société Tuco Energie ne peut être considérée comme un simple installateur de panneaux photovoltaïques alors qu'elle a également proposé pour financer le coût de l'installation, un emprunt avec la société Cetelem. Son vendeur a recueilli des éléments sur la situation familiale, professionnelle et fiscale des acquéreurs pour leur faire signer le bon de commande et l'offre de crédit pour financer le coût de l'installation. C'est donc à juste titre que le premier juge, au regard de tous ces éléments, a considéré que la société Tuco Energie a explicitement informé M. S. et Mme B. qu'ils pouvaient bénéficier d'un montant de crédit d'impôt de 16 800 euros.
Compte tenu du montant allégué de crédit d'impôt par rapport au coût de l'installation, il s'agissait d'une information d'importance et il ne peut être exclu que, comme le soutiennent les intimés, elle a été déterminante de leur volonté de conclure l'achat. Or, en sa qualité de professionnel de l'installation de matériels d'énergie renouvelable, la société Tuco Energie n'était pas sans savoir que la loi de finance 2014 avait supprimé, à partir du 1er janvier 2014, l'éligiblité des installations photovoltaïques au crédit d'impôt de développement durable. En appel comme en première instance, non seulement elle ne rapporte pas la preuve qu'elle a précisé aux acquéreurs qu'ils ne pouvaient plus prétendre à un crédit d'impôt mais au contraire, sans contester que les mentions relatives au crédit d'impôt ont bien été portées sur le bon de commande par son vendeur, elle soutient qu'il appartenait à M. S. et à Mme B. de se renseigner auprès de leur service des impôts ou d'un conseiller fiscal alors qu'en sa qualité de professionnel, il lui revenait de délivrer à ces clients des informations réelles et actualisées sur l'étendue de leur engagement et sur le coût final de l'installation. Elle a donc de ce fait manqué à ses obligations et commis une faute contractuelle.
- Cour d'appel de Rennes, 2e chambre, 4 décembre 2020, RG n° 17/05509