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Le 05 décembre 2020

 

Au visa notamment des dispositions de l'article 1240 du Code civil, ancien article 1382,  seul applicable en l'espèce, l'appelante soutient que la responsabilité de la tutrice est engagée en ce que cette dernière n'a pas mis en oeuvre les moyens dont elle disposait pour exécuter correctement sa mission de protection alors qu'il lui appartenait de signaler immédiatement la situation au juge des tutelles, de solliciter une interdiction d'émettre des chèques et de procéder à la clôture du compte.

Cette argumentation ne saurait être suivie dès lors qu'il n'est pas contesté que, compte-tenu de l'opposition de Mme M. à la mesure de protection, Mme B.-B. n'a pas été en mesure de récupérer le chéquier toujours en possession de l'intéressée, ce défaut de restitution à l'origine de l'émission des chèques litigieux ne pouvant constituer une faute de nature à engager la responsabilité du mandataire judiciaire.

Le procès-verbal établi le 9 août 2018 par maître E., huissier de justice, confirme que l'accès à la maison de l'intéressée, fermé par un portillon en bois clos par un cadenas, est impossible en l'absence de sonnette et que le numéro de téléphone en possession du mandataire ne permet pas de joindre Mme M..

La mandataire justifie avoir informé le Crédit Agricole de la situation par message du 3 janvier 2017, auquel il a été répondu que la seule solution pour mettre fin à l'émission de chèques était de récupérer les chéquiers et de les restituer à la banque.

Dès lors que la restitution du chéquier était impossible, Mme B.-B. n'avait d'autre choix que de solliciter au fur et à mesure la copie des chèques émis, ce qu'elle a fait ainsi que cela résulte des échanges de messages produits.

En outre, contrairement à ce que soutient l'appelante, Mme B.-B. a informé le juge des tutelles dès le 30 mai 2017 des difficultés rencontrées dans l'exercice de la mesure de protection et notamment du refus de Mme M. de toute visite et de tout contact.

Par lettre du 15 janvier 2018, soit dans un délai proche de l'encaissement des deux premiers chèques, la tutrice a informé le juge des tutelles de la poursuite de l'émission de chèques par Mme M..

Le grief tiré du placement supposé tardif des capitaux présents sur les comptes de Mme M. sera écarté en l'absence de tout lien de causalité avec l'émission des chèques litigieux.

Il ne saurait être reproché à Mme B.-B. de n'avoir pris aucune mesure d'interdiction d'émettre des chèques dès lors d'une part qu'une telle mesure ne relève pas de ses attributions et d'autre part que la mesure de protection a notamment pour objet et pour effet d'instaurer une incapacité de Mme M. à émettre des chèques, aucune mesure n'étant cependant de nature à empêcher la majeure protégée d'utiliser le chéquier encore à sa disposition.

Enfin, à supposer que Mme B.-B. ait clôturé le compte dès sa désignation, ce qu'elle n'avait aucune raison de faire tant qu'elle n'était pas informée de l'émission des chèques litigieux, une telle clôture n'aurait pas empêché Mme M. de continuer à utiliser le chéquier à sa disposition, de sorte qu'aucune faute n'est caractérisée à ce titre.

Il sera observé au surplus que, malgré la lettre de la tutrice du 15 décembre 2017 l'informant de la mesure de tutelle et la lettre du juge des tutelles du 19 mars 2018 lui confirmant la nullité de plein droit du contrat, l'EURL Espace Cuisine, qui n'a pas hésité à encaisser deux des chèques remis en paiement pour un montant de près de 5.000 EUR alors que les travaux n'avaient pas commencé, ce contrairement aux usages en la matière, n'a restitué les sommes encaissées et les chèques demeurés en sa possession qu'au mois d'avril 2018.

C'est en conséquence par de justes motifs que la cour adopte que le premier juge a estimé que Mme B.-B. n'avait commis aucune faute dans l'exercice de sa mission de mandataire judiciaire et a débouté l'EURL Espace Cuisine de l'ensemble de ses demandes indemnitaires, le jugement déféré devant recevoir confirmation à ce titre.

Référence: 

- Cour d'appel de Caen, 2e chambre civile, 24 septembre 2020, RG n° 19/00004