Le président d'une communauté de communes a signé les ordres de paiement présentés par la secrétaire générale de ladite commune à partir de fausses factures confectionnées par ses soins. L'absence de toute vérification par cet élu a permis le détournement d'une somme avoisinant les 800 000 EUR sur le compte bancaire du mari de la secrétaire.
Les éléments constitutifs du délit de l'art. 432-16 du Code pénal étaient bien réunis.
En tant que président de la communauté de communes et du syndicat intercommunal des eaux, l'intéressé a bien eu la qualité de personne dépositaire de l'autorité publique ou chargée d'une mission de service public. Les objets détournés sont des fonds publics que le Trésor public a payés au détriment du syndicat. Le détournement de fonds publics est imputable à une tierce personne : la secrétaire poursuivie sur le fondement de l'art. 432-15 du Code pénal en sa qualité de subordonné du dépositaire public.
Le juge pénal rappelle à bon droit que l'art. 432-16 du Code pénal ne se préoccupe pas de la répression des actes imputés à la personne tierce. Il n'y a donc pas d'incompatibilité entre les art. 432-15 et 432-16 dudit code, qui renvoient à deux infractions distinctes et indépendantes. Enfin, le prévenu (le président) a commis une faute de négligence puisqu'il s'est abstenu de procéder aux vérifications élémentaires et même de lire les documents présentés à sa signature par la secrétaire. Cette défaillance inadmissible a été qualifiée de faute caractérisée par les juges du fond. En revanche, selon la Cour de cassation, l'art. 432-16 du Code pénal n'exige pas, pour que le délit soit retenu, la violation d'une obligation particulière de prudence ou de sécurité. La faute délibérée est donc exclue.
Quant au mari de la secrétaire, il a bien et justement été renvoyé devant le tribunal du chef de recel de détournement de fonds publics puisque les sommes détournées ont été virées sur son compte bancaire. Toutefois, le prévenu a été relaxé car la preuve n'a pas été rapportée qu'il avait connaissance de l'origine frauduleuse des sommes versées sur son compte. Pour les juges du fond, même si cela peut paraître invraisemblable, les revenus du couple n'étaient pas incompatibles avec le train de vie familial affiché et le prévenu avait délégué la gestion du compte bancaire à son épouse en qui il avait, lui aussi, une confiance aveugle.
- Cass. Ch. crim., 22 février 2017, pourvoi n° 15-87.328, sera publié au Bulletin