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Le 19 mars 2021

 

En application de l'article L1154-1 du Code du travail, lorsqu'un salarié établit la matérialité de faits précis et concordants constituant selon lui un harcèlement, il appartient au juge d'apprécier si ces éléments pris dans leur ensemble permettent de présumer l'existence d'un harcèlement moral et dans l'affirmative, il incombe à l'employeur de prouver que ses agissement ne sont pas constitutifs d'un tel harcèlement et que sa décision est fondée par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement.

En l'espèce au soutien de sa prétention à la reconnaissance d'un harcèlement moral, la salariée intimée invoque trois faits.

En premier lieu Mme L. fait valoir qu'elle devait nettoyer seule chaque jour 44 chambres réparties sur cinq étages, ce qui la faisait travailler 'sans relâche' sur un poste qui aurait nécessité la présence d'un second salarié.

Elle s'appuie sur les attestation de M. E. Ko selon lequel, en sa qualité d'ancien résidant de l'hôtel il a vu Mme L. travailler tous les jours, y compris le dimanche et les jours fériés, de Mme G. et M. B. selon lesquels ils ont croisé à plusieurs reprises la salariée le dimanche et les jours fériés, de M. H. selon lequel 'on a travaillé ensemble pendant un an et demi, elle les jours fériés travaillés', de Mme M., selon laquelle en tant que voisine elles prenaient le même bus tous les matins, même les jours fériés.

Mais non seulement il ne peut être tiré de ces attestations la certitude du travail continu allégué, mais rien n'étaye le volume de travail allégué, ni le dépassement de ses horaires de travail, au titre desquels au demeurant elle ne forme aucune demande. Ainsi elle n'établit pas qu'elle était placée dans une situation de surcharge de travail, ce que contredit en outre les trois attestations d'anciens salariés produites par l'employeur.

En deuxième lieu elle invoque le fait de ne pas avoir disposé de produits d'entretien autres que de l'acide pour effectuer sa prestation de travail. Mais elle ne procède que par affirmation.

En troisième lieu elle se prévaut du courrier qu'elle a adressé le 5 juin 2008 à la médecine du travail, sans qu'il ne soit au demeurant produit d'élément sur une suite donnée à ce courrier.

Elle y déplorait déjà une surcharge de travail, le défaut de produits d'entretien ainsi que le mauvais état des literies de l'hôtel, la survenance d'un malaise avec transfert à l'hôpital consécutivement à la plainte d'une cliente sur l'état de sa chambre, l'absence de majoration des jours fériés et enfin la réaction de l'employeur à son annonce de saisir le médecin du travail, qui l'aurait menacée en lui disant qu'il n'a pas peur.

La matérialité de son courrier-plainte est avérée.

Enfin sur les conséquences des faits invoqués, elle se prévaut d'une altération de son état de santé. Elle produit certes un avis d'arrêt de travail de six jours en juin 2008 pour 'choc émotionnel suite à une dispute à son travail avec son supérieur hiérarchique', un certificat médical du 19 juillet 2014 attestant qu'elle présente 'un état de stress avec poussée d'hypertension artérielle suite au conflit au travail' et un certificat médical du 27 avril 2016 pour une entorse au poignet droit sur tendinopathie en 2014 et 2016 qu'elle impute à l'utilisation d'un chariot défectueux. Mais seules ses propres doléances lient ces constatations médicales à un conflit au travail ou à ses conditions de travail.

La salariée établit donc un seul fait, l'envoi d'un courrier au médecin du travail le 5 juin 2008 sans d'ailleurs que la matérialité des énonciations qu'il contient ne soit rapportée.

Mais dès lors que la salariée échoue à établir au moins deux faits précis et concordants, il ne peut être suspecté de harcèlement moral.

Elle sera déboutée de sa prétention à la reconnaissance d'un harcèlement moral dont elle ne tirait au demeurant aucune conséquence indemnitaire puisqu'au dispositif de ses conclusions elle se limite à demander la confirmation du jugement déféré qui n'a statué, conformément à ses demandes en première instance, que sur la contestation de la rupture conventionnelle.

Référence: 

Cour d'appel, Aix-en-Provence, Chambre 4-3, 26 Février 2021 – n° 18/11948