L’art. 544 du Code civil fixe, en ces termes, le caractère fondamental du droit de propriété : «La propriété est le droit de jouir et disposer des choses de la manière la plus absolue, pourvu qu’on n’en fasse pas un usage prohibé par les lois ou par les règlements». Néanmoins, par application des dispositions de l’art. 651 du même code, ce droit de propriété peut être restreint par l’effet du principe selon lequel nul ne doit causer à autrui un trouble excédant les inconvénients normaux du voisinage.
Si l’autonomie de ce régime par rapport au droit commun de la responsabilité dispense celui qui s’en prévaut de rapporter la preuve d’une faute, il doit néanmoins démontrer le caractère anormal du trouble subi ainsi que l’imputabilité de ce dernier à la personne mise en cause.
Il en résulte qu’au cas présent, il appartient à M. A de démontrer que le troublede voisinage qu’il dit subir du fait de la chute sur son fonds des fleurs provenant de l’arbre de type 'Flamboyant’ situé sur l’enrochement dominant du terrain appartenant à ses voisins, les époux B et F X, n’a pas cessé par l’effet de l’élagage de cet arbre auquel ces derniers ont procédé le 11 mars 2015 et que ce trouble présente un caractère anormal.
Au soutien de son appel, M. A produit un nouveau constat dressé le 29 janvier 2019 par Me O-P C, huissier de justice à Papeete, contenant notamment des clichés photographiques des feuilles du flamboyant tombées dans sa piscine et amassées en grande quantité dans sa bonde de filtration.
Cependant, ce nouvel élément ne suffit pas à infirmer l’analyse du premier juge dont il résulte que ce trouble de voisinage ne présente pas, et sans préjudice du respect du cahier des charges du lotissement, un caractère 'anormal’ en raison :
— d’une part, de l’environnement très arboré du lotissement résultant du climat tropical, qui génère nécessairement pour tous les occupants des contraintes supplémentaires au niveau de l’entretien des surfaces construites ;
— et d’autre part, de la préexistence de cet arbre aux travaux de construction de la piscine et d’aménagement de l’entrée de sa parcelle qui ont été réalisés par M. A. Sur ce point, ce dernier prétend que lorsque ces travaux ont été réalisés, sur une période s’étalant de février à septembre 1999, aucun flamboyant n’était implanté sur la propriété des époux X. Cependant, aucune preuve de cette allégation n’est produite aux débats. En particulier, la pièce n° 26 à laquelle il se réfère ne démontre nullement la date de réalisation des travaux en question, ni a fortiori la présence ou non à cette date sur le fond des époux X du flamboyant litigieux. D’autant que le plan annexé mentionne bien l’existence de cet arbre. A l’inverse, les intimés ont produit une attestation de M. I J indiquant que cet arbre était déjà présent sur le site en 2001, mais surtout une nouvelle attestation rédigée le 12 décembre 2018 par Mme K L qui déclare : «Propriétaire du lot numéro 25 à Te Maru Ata où je vis depuis août 1996 avec ma petite famille. Donc en 1996 le flamboyant existait déjà».
De surcroît, alors que M. A se plaint de la chute des feuilles de cet arbre, il est constant que, comme souligné par le premier juge, la floraison du flamboyant n’est que saisonnière, durant au maximum 4 à 5 mois selon les sources d’information.
Par conséquent, en implantant sa piscine dans un environnement tropical et arboré, dans lequel croissait déjà un flamboyant, M. A en a accepté les contraintes, de sorte qu’il est mal fondé à soutenir aujourd’hui que la chute des fleurs de cet arbre implanté sur le fonds des époux X, de surcroît nécessairement limitée à la période de floraison, constitue un trouble anormalde voisinage justifiant, en outre, non pas de se limiter à l’élagage voire à l’étêtage de cet arbre, mais de procéder à son abattage.
M. A est donc débouté de ce chef de demande et le jugement déféré confirmé sur ce point.
- Cour d'appel de Papeete, Chambre civile, 26 septembre 2019, RG n° 17/00182