Par acte du 25 janvier 1928, les syndics du syndicat des copropriétaires indivis de la Croisette ont donné à bail à la société Cannes Balnéaire un terrain situé sur la presqu'île de la croisette, pour une durée de 99 ans et moyennant un loyer annuel de 1 franc ; la société preneuse y a édifié le "Palm Beach", casino d'été et complexe de loisirs ; que les bailleurs, ayant sollicité la révision du loyer et sa fixation au montant annuel de 4 200 000 euros, le juge des loyers commerciaux a sursis à statuer dans l'attente de la décision à intervenir sur la qualification du bail ; que la qualification de bail emphytéotique a été retenue.
La société Cannes Balnéaire a fait grief à l'arrêt d'appel de dire que le bail est un bail emphytéotique, alors, selon elle et en particulier que la société Cannes Balnéaire faisait valoir que le bail litigieux était un bail à construction de terrain nu et non un bail emphytéotique, la convention des parties stipulant qu'à défaut de réalisation de l'immeuble à usage de casino le bail serait résilié, qu'il n'existait pas de fonds de commerce lors de la conclusion du bail ; qu'en retenant que le bail conclu entre les parties porte sur un terrain mais stipule que la société Cannes Balnéaire aura la "faculté" de faire édifier sur la place tous immeubles à sa convenance et notamment un immeuble à usage de casino, qu'il précise en page 2 en compensation des avantages que les propriétaires de la Croisette retireront de la construction "éventuelle" d'un casino d'été ... et plus loin encore ...il est convenu que les immeubles que la société locataire pourra "éventuellement" construire sur le terrain loué devront être assurés à ses frais contre l'incendie, pour en déduire que le choix de ces termes exclut de considérer que le bail mettait à la charge de la société Cannes Balnéaire une obligation de construction, que la dernière clause du bail stipule "dans le cas où la ville de Cannes de donnerait pas à la société Cannes Balnéaire les autorisations nécessaires à l'exploitation d'un casino il est entendu que le présent bail n'aura aucun effet.", que cette clause qui n'est pas une clause résolutoire mais une clause qui réglemente les conditions de prise d'effet du contrat concerne les conditions d'exploitation du casino, n'édicte pas davantage une obligation de construction, de sorte que la qualification de bail à construction ne peut être retenue, la cour d'appel a dénaturé ladite clause dés lors qu'il s'agit d'une clause résolutoire et elle a violé l'art. 1134 du Code civil.
Mais ayant relevé que les termes du bail, qui prévoyait seulement la faculté de faire édifier tous immeubles et notamment un casino, ne mettaient à la charge de la société Cannes Balnéaire aucune obligation de construire et retenu, sans la dénaturer, que la clause stipulant que, "dans le cas où la ville de Cannes ne donnerait pas à la société Cannes Balnéaire les autorisations nécessaires à l'exploitation d'un casino, il est entendu que le présent bail n'aura aucun effet", n'était pas une clause résolutoire mais une condition concernant l'exploitation du casino et n'édictait aucune obligation de construire, la cour d'appel en a déduit à bon droit que le contrat devait être qualifié de bail emphytéotique.
Et les bailleurs ont fait grief à l'arrêt d'appel de dire que la redevance du bail emphytéotique ne peut être révisée par le juge des loyers commerciaux.
Ayant retenu que la valeur locative était étrangère à l'économie du contrat de bail emphytéotique, la contrepartie de la jouissance du preneur étant pour le bailleur, non le payement du loyer, mais l'absence de renouvellement et l'accession sans indemnité en fin de bail de tous travaux et améliorations faits par le preneur, la cour d'appel en a exactement déduit que les bailleurs ne pouvaient saisir le juge des loyers commerciaux d'une demande de révision du loyer pour le faire correspondre à la valeur locative, fût-ce en invoquant une évolution favorable des facteurs locaux de commercialité.
- Cour de cassation, chambre civile 3, 8 septembre 2016, N° de pourvoi: 15-21.381 15-22.374, rejet, sera publié au Bull.