Deux sociétés maîtres d'ouvrage font l'acquisition d'un immeuble qu'elles revendent par lot après travaux.
Les travaux de démolition, terrassement, gros oeuvre ont été confiés à une entreprise qui, défaillante en cours de chantier, a été remplacée pour achever ses prestations réalisées à hauteur de 69 %.
Pour mettre fin à un litige avec l'un des acquéreurs dont l'appartement initialement configuré comme une cave, présentait une importante humidité, les sociétés maître d'ouvrage avaient, dans le cadre d'une transaction, racheté le bien et avaient assigné par la suite le maître d'oeuvre, l'entreprise de terrassement-gros oeuvre ainsi que leurs assureurs respectifs en indemnisation de leur préjudice.
Invoquant que la réception était bien intervenue, elles sollicitaient la condamnation des intervenants à l'acte de construire sur le fondement de l'art. 1792 du Code civil.
La cour d'appel ayant jugé d'une part que les travaux en question n'avaient pas fait l'objet d'une réception tacite (dès lors que l'entreprise n'aurait réalisé que 69 % des travaux de son devis, qu'elle n'aurait pas été soldée et qu'il n'était pas démontré une volonté non équivoque du maître de l'ouvrage de recevoir l'ouvrage) et d'autre part ayant débouté les maîtres d'ouvrage de leur demande subsidiaire tendant à voir prononcer la réception judiciaire, devait en conséquence rejeter la demande fondée sur les articles 1792 et suivants du Code civil.
Les maîtres d'ouvrage vont alors devant la Cour de cassation.
Ils ont reproché à l'arrêt de la cour d'appel d'avoir refusé de retenir la réception tacite dès lors qu'une telle réception peut intervenir avant l'achèvement des travaux en cas d'abandon de chantier par une entreprise, et qu'en écartant l'existence d'une réception tacite par les maîtres d'ouvrage des travaux réalisés par l'entreprise et laissés inachevés tout en constatant que celle-ci avait été remplacée avec son accord à l'initiative du maître de l'ouvrage par une autre société, ce qui établissait la volonté des parties concernées de mettre fin au contrat d'entreprise qui les liait et ce qui caractérisait ainsi l'existence d'une réception tacite des travaux litigieux, la cour d'appel n'aurait pas tiré les conséquences légales de ses constatations et aurait violé l'article 1792-6 du Code civil.
Le pourvoi est cependant rejeté au motif que la cour d'appel "a retenu à bon droit que le fait qu'une entreprise succède à une autre ne suffisait pas à caractériser l'existence d'une réception tacite".
- Cass. Civ. 3e 19 mai 2016, pourvoi n° 15-17.129, rejet, F-D+B