C'est en vain que le CIFD (banque prêteuse) oppose la prescription de cette demande de la caution ; en effet dès lors que les demandes reconventionnelles et les moyens de défense sont formés de la même manière à l'encontre des parties à l'instance, la demande de Mme H., qui tend en réalité à être déchargée de son obligation en raison de la faute commise par la banque, constitue un simple moyen de défense au fond sur lequel la prescription est sans incidence.
Sur le fond, il ressort du développement qui précède que l'engagement de Mme H., caution, était, au moment de son engagement, disproportionné eu égard à ses revenus et à son patrimoine, étant rappelé qu'elle n'a déclaré qu'un revenu total de 14'426 EUR pour l'année où son engagement a été souscrit.
En outre, son engagement de caution portait sur 148'887 EUR soit sur la totalité de la somme empruntée par la SCI COLIBRI en vue de l'acquisition et du financement de travaux de rénovation d'un appartement ancien en vue de sa location, opération présentant un risque certain puisque les revenus futurs destinés à compenser l'investissement étaient conditionnés à la réalisation de travaux d'envergure retardant d'autant la rentrée financière espérée.
En outre, si Mme H. était associée de la SCI, sa profession de traductrice, et celle de maître d'oeuvre de son associé Jacques C. tels que mentionnées dans les statuts de la SCI, révèlent que l'initiative et la conduite de l'opération de rénovation devaient reposer entièrement sur ce dernier, par ailleurs gérant de la SCI, ce que le CIFD n'ignorait pas puisque ce dernier s'engageait aussi comme caution.
Il en résulte que le CIFD avait, à l'égard de Mme H., caution non avertie, une obligation d'information et de mise en garde d'autant plus grande quant au risque encouru par elle en s'engageant comme caution solidaire, dans de telles proportions et avec de faibles revenus, pour garantir une opération soumise à un sérieux aléa, et sur la réussite de laquelle elle n'avait en réalité aucune prise.
Le CIFD ne rapporte pas la preuve, qui lui incombe, d'avoir satisfait à cette obligation par la simple référence aux mentions préimprimées générales de l'engagement de caution.
La banque a donc manqué à son obligation, ce manquement ayant privé Mme H. d'une chance de ne pas s'engager, que les éléments du dossier permettent d'estimer à 50 %.
Il y a donc lieu d'allouer à Mme H., à titre de dommages-intérêts, une somme équivalente à la moitié de celle à laquelle elle est aujourd'hui tenue en principal soit 70'682 EUR arrondie, avec compensation entre les sommes dues de part et d'autre.
- Cour d'appel de Grenoble, 1re chambre civile, 11 mai 2021, RG n° 19/01554