L'offre était à la fois irrégulière et inacceptable dans un contexte particulier, celui de l'attribution par le ministère de la Défense d'un marché de fourniture d'armes individuelles futures. Une tranche ferme était prévue, complétée de 19 tranches conditionnelles. L'offre de la société requérante avait été écartée sur les deux terrains de l'irrégularité et du caractère inacceptable, car la tranche ferme, mais aussi plusieurs postes des tranches conditionnelles, étaient proposés moyennant un prix de zéro euro.
Il y a irrégularité parce que cette valeur nulle prive le pouvoir adjudicateur d'un moyen de coercition à l'égard de son co-contractant en cas de retard d'exécution. Faute de valeur donnée à certaines prestations, aucune pénalité de retard n'aurait pu, en effet, être appliquée, cette sanction étant calculée en fonction justement du prix de la prestation tardive. Cette impossibilité constitue une méconnaissance des stipulations du cahier des clauses administratives particulières relatives à l'application des pénalités de retard. Elle provoque l'irrégularité de l'offre.
L'offre est aussi inacceptable car elle aboutit, si aucune tranche conditionnelle n'est activée, à priver le prestataire de toute rémunération. Ce résultat serait contraire à l'article 1er du Code des marchés publics alors en vigueur.
Désormais, pour les entités adjudicatrice acheter en dessous du seuil de 25 000 euro ne dispense pas de veiller à choisir une offre répondant de manière pertinente au besoin, à faire une bonne utilisation des deniers publics et à ne pas contracter systématiquement avec un même prestataire lorsqu’il existe une pluralité d’offres potentielles susceptibles de répondre au besoin. Cette condition du respect des principes fondamentaux de la commande publique existait déjà pour les pouvoirs adjudicateurs. Pour les entités adjudicatrices, il est également inscrit un nouvel alinéa à l’art. 146 du Code des marchés publics (procédures adaptées) qui rappelle qu’un marché peut être passé sans publicité ni mise en concurrence préalables dans les conditions du II de l’art. 144 du Code des marchés publics (procédure négociée) ou « lorsque ces formalités sont impossibles ou manifestement inutiles en raison notamment de l’objet du marché, de son montant ou du faible degré de concurrence dans le secteur considéré ». Auy regard de la décision précitée, l'offre à zéro euro n'est pas plus recevable sous l'empire du droit nouveau.
- T.A. Paris, 20 septembre 2016, req. n° 1612871, Société FN Herstal SA