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Le 20 février 2020

 

M. X critique, à titre liminaire, le jugement en faisant grief au tribunal de s’être prononcé en annulant le testament, sans avoir examiné l’original de l’acte litigieux et de s’être contenté d’entériner les conclusions d’expertise.

Il rappelle qu’il résulte du rapport d’expertise que la signature figurant sur le testament litigieux émane de Mme A Y. Il fait valoir que le testament olographe est l’expression des dernières volontés de Mme A Y, ce qui résulte de la signature véritable de cette dernière au bas du document litigieux. Il soutient que la signature du testateur, à laquelle il ne peut être suppléé , est la marque de l’approbation personnelle et définitive du contenu de l’acte et de la volonté de s’enapproprier les termes.

Il observe qu’en l’absence de témoins, ni l’expert ni le tribunal n’ont cherché à savoir qui serait le prétendu rédacteur de l’acte et fait grief au tribunal de n’avoir pas envisagé l’hypothèse d’un testament à main guidée alors que l’état de santé de A Y pouvait la justifier.

Il prétend que les dernières volontés de A Y ne peuvent être ignorées au motif que le testament n’aurait pas été intégralement rédigé de sa main.

Il rappelle que la date d’un testament olographe fait foi jusqu’à preuve contraire et que la jurisprudence considère que l’inexactitude de la date doit être rapportée par des éléments intrinsèques permettant de restituer la date véritable. Il fait donc valoir que la preuve de l’inexactitude de la date apposée sur le testament incombe à M. C D qui invoque l’impossibilité pour sa mère d’établir le testament querellé à la date du 9 septembre 2014, au motif qu’à cette date elle était hospitalisée à Saint-Cloud. Il observe que l’institut Curie comporte plusieurs établissements hospitaliers et que si Mme A Y a été hospitalisée au sein de cet institut du 22 août au 15 septembre 2014, cette hospitalisation n’était pas continue. Il soutient qu’en toute hypothèse le document a acquis date certaine depuis son enregistrement.

Il conteste le rapport d’expertise en faisant valoir que l’expert a, à plusieurs reprises commis une erreur sur le prénom de Mme A Y qu’elle a désignée comme « Mylène » Y.

Il relève que les dissemblances relevées par l’expert entre le testament et les pièces de comparaison ne peuvent être probants dans la mesure où « lorsqu’une personne rédige son testament, qui constitue un document d’une valeur importante et significative, elle utilisera une écriture soignée et appliquée, qui est sans comparaison avec celle que l’on peut retrouver dans des documents tels que des brouillons ou des notes ». Il demande donc d’écarter le rapport d’expertise des débats et d’ordonner une nouvelle expertise avec notamment pour mission d’examiner l’hypothèse d’une rédaction du testament à main guidée.

Il conteste enfin l’affirmation de M. C D selon laquelle ce dernier entretenait une relation de grande proximité avec sa mère alors qu’au cours des dernières années, cette relation s’était très fortement dégradée en raison de la mise à disposition à titre gratuit par Mme A Y d’un bien au profit de son fils que cette dernière a ensuite voulu vendre en raison d’importantes difficultés financières et s’est opposée à M. C D qui refusait de libérer les lieux et de permettre aux agences immobilières de procéder à des visites.

Il affirme que l’établissement du testament litigieux s’inscrit dans la logique de la dégradation des relations de Mme A Y avec M. C D.

M. C D sollicite la confirmation du jugement entrepris en ce qu’il a déclaré nul le testament imputé à sa mère. Il se fonde sur les conclusions de l’expert pour affirmer que les testament n’a pas été écrit par A Y, s’il a été signé par elle.

Il s’en rapporte à la motivation du jugement et fait valoir que M. X ne produit aucun élément au soutien de sa contestation et se limite en appel à la reprise de ses conclusions de première instance sans ajouter de nouvel élément.

M. C D conclut à l’irrecevabilité de la demande de nouvelle expertise, sur le fondement de l’art. 564 du Code de procédure civile en faisant valoir qu’il s’agit d’une demande nouvelle en appel.

***

Selon l’art. 970 du Code civil, le testament olographe ne sera point valable, s’il n’est écrit en entier, daté et signé de la main du testateur ; il n’est assujetti à aucune autre forme .

Lee testament daté du 9 septembre 2014 « Fait et passé à Suresnes », prêté àMme  A Y est rédigé en ces termes :

"Ceci est mon testament

Je soussignée Mme A I Y, retraitée, demeurant à […].

Née à […]) le […] ; Ayant conclu un pacte civil de solidarité avec B J K X,

De nationalité française.

Résidente au sens de la réglementation fiscale.

Déclare établir les dispositions de dernières volontés dans les termes suivants :

Je lègue à Monsieur B X l’usufruit de l’universalité des biens meubles et immeubles qui composeront ma succession. »

Fait et écrit en entier de ma main, librement, avec la pleine jouissance de mes facultés intellectuelles

Je déclare, en outre, révoquer toutes dispositions testamentaires antérieures.

Fait et passé à Suresnes

Le 9 septembre 2014"

La signature prêtée à A Y est apposée à droite de la mention relative aux lieu et date du document .

M. X ne développe aucun moyen au soutien de sa demande tendant à voir écarter des débats le rapport d’expertise déposé par F Z le 4 novembre 2016 ; l’expert a accompli sa mission dans le respect du principe du contradictoire ; la demande de M. X sera par conséquent rejetée .

La demande de nouvelle expertise ne constitue pas une demande nouvelle au sens de l’art. 564 du Code de procédure civile ; selon l’art. 563 du Code de procédure civile, les parties peuvent en appel invoquer des moyens nouveaux, produire de nouvelles pièces ou proposer de nouvelles preuves ; la demande de nouvelle expertise constitue un moyen susceptible de permettre à M. X de proposer une nouvelle preuve et vient au soutien de sa demande tenant à voir valider le testament litigieux ;  cette demande doit être déclarée recevable .

Mais l’expertise diligentée par Mme Z n’a, au stade de son pré-rapport, suscité aucun dire de la part de M. X ;  l’expert a répondu complètement à la mission qui lui a été confiée, de manière précise et circonstanciée ;  l’hypothèse de l’écriture du testament « à main guidée » par un tiers ne saurait s’envisager en l’espèce, et la question être posée à un nouvel expert dès lors qu’il résulte clairement du rapport d’expertise que le testament litigieux n’a pas été écrit de la main de Mme A Y ;  l’hypothèse de la main guidée, qui est celle où le testament est écrit de la main du testateur, aidé physiquement par un tiers, ne peut qu’être écartée en l’état des constatations de l’expert et de l’aspect de l’écriture figurant sur le testament querellé, qui est une écriture de forme, appliquée, posée, régulière et qui ne porte la marque d’aucune hésitation, tremblements ou ratures .

Comme l’ont relevé les premiers juges, le rapport d’expertise est fondé sur la comparaison du testament avec une collection d’écrits de la défunte, au nombre de six ; l’expert s’est attachée à relever de très nombreuses dissemblances relatives aux lettres, aux liaisons entre celles-ci, à l’aspect de l’écriture, que concernant la ponctuation ; elle en arrive à la conclusion formelle que du fait des différences nombreuses et significatives, le document, bien que signé de Mme A Y n’a pas été écrit par elle .

Il est ajouté que comme le fait observer M. C D il existe une incompatibilité entre le lieu et la date figurant sur le document et la réalité de la situation de Mme A Y qui, le jour de l’établissement du testament, était hospitalisée à Saint-Cloud, ainsi que cela résulte du bulletin de situation produit émanant de l’Institut Curie, de sorte qu’elle ne pouvait être à Suresnes ; M. X n’établit pas que le régime de son hospitalisation lui permettait de rentrer chez elle .

L’art. 970 du Code civil exige notamment que le testament soit écrit en entier de la main du testateur, ce qui n’est pas le cas ; dès lors la présence de la seule signature de Mme  A Y au bas du document présenté comme son testament est insuffisante à établir que les conditions de forme posées à peine de nullité par ce texte sont remplies .

Par conséquent, le jugement qui a constaté la nullité du testament litigieux, doit être confirmé.

Référence: 

- Cour d'appel de Versailles, 1re chambre 1re section, 18 février 2020, RG n° 18/0767