En cas de décès du gérant, un nouveau gérant doit être désigné par une assemblée. Or une telle assemblée ne peut être convoquée par le gérant, qui est décédé.
L'art. 1846 du Code civil prévoit que, si pour quelque cause que ce soit, la société se trouve dépourvue de gérant, tout associé peut demander au président du tribunal statuant sur requête la désignation d'un mandataire chargé de réunir les associés en vue de nommer un ou plusieurs gérants.
Une SCI, constituée en 2002 par deux associés, dont l'un était nommé par disposition statutaire gérant pour une durée illimitée, n'a pas utilisé au décès de ce gérant en 2006 la procédure prévue comme indiqué plus haut. L'autre associé, intervenant comme gérant de fait, a néanmoins consenti en 2008 un bail commercial ; après le départ des lieux de la locataire, la SCI l'a assignée en paiement d'un arriéré de loyers et taxes ; la locataire a opposé la nullité du bail pour défaut de capacité de la SCI-bailleresse. Pour prononcer la nullité du bail, la cour d'appel a retenu que le bail a été signé par la SCI, représentée par le gérant décédé en 2006 : la SCI, privée de gérant, ne disposait plus de la capacité pour contracter.
Cet arrêt est cassé pour violation de l'art. 1984 du Code civil.
La cour d'appel avait statué en retenant un défaut de capacité de contracter de la SCI, ce qui ne correspondait pas à la situation créée par le décès du gérant. En effet, la SCI n'a pas perdu la capacité de contracter ; elle a perdu son organe de représentation : un gérant, investi du pouvoir de contracter au nom de la société. Le contrat de bail ayant été conclu en 2006 par un associé qui est intervenu en qualité de gérant de fait, c'est sur le terrain de la représentation que la situation devait être analysée.
Cet associé n'avait pas compétence d'intervenir pour représenter la société et n'était pas attributaire des pouvoirs requis pour conclure le contrat de bail. L'acte passé pour le compte de la société par un associé non habilité à représenter la société n'est pas inopposable à la société : il est frappé de nullité. La nullité est la sanction non seulement d'un défaut de pouvoirs de l'associé gérant de fait, mais aussi de son incompétence, de son inaptitude personnelle à passer l'acte déterminé pour le compte de la société.
C'est sur ce fondement du défaut de compétence et de pouvoir du mandataire que l'arrêt d'appel est cassé, au motif que la nullité d'un contrat fondée sur l'absence de pouvoir du mandataire social, qui est relative, ne peut être demandée que par la partie représentée.
- Cass. 1re civ., 12 nov. 2015, n° 14-23.340, F-P+B