Louis G est décédé à Toulouse le 13 février 2013 en l'état d'un testament olographe du 29 juin 2010 instituant sa fille Annie comme légataire universelle et quatre autres enfants.
Cette dernière a par ailleurs été bénéficiaire selon acte du 26 mai 1997 d'une donation entre vifs de la part de son père, en avancement d'hoirie, portant sur la nue-propriété d'une maison d'habitation située [...].
Depuis 2006, Annie, fille du défunt a assuré le suivi médical de son père en l'accompagnant à ses rendez-vous, lui rendant régulièrement visite depuis son veuvage, lui faisant quelques courses et s'est ponctuellement occupée de son linge ou du ménage. Celui-ci résidait plusieurs mois en période estivale loin de sa fille et disposait d'une femme de ménage lorsqu'il résidait dans sa maison. Aussi, les diligences de sa fille relèvent de la piété filiale, sans excès, qui a été largement gratifiée par son père par une donation ainsi que le bénéfice d'un contrat d'assurance vie et la qualité de légataire universelle.
En revanche, à partir de 2011, l'investissement est devenu plus important du fait de la perte d'autonomie de son père suite à une chute, de la prise en charge de ce dernier à son domicile sur plusieurs mois et de l'accompagnement de sa fin de vie, le défunt étant décédé en 2013 à l'âge de 90 ans. Les virements mis en place à compter de juin 2011 à hauteur de 500 euro par mois, ramenés à 200 euro à compter de son placement en maison de retraite en mars 2012, doivent être considérés comme la contrepartie financière des services que sa fille lui rendait. Il en est de même de trois versements mensuels par chèques de 500 euro chacun, effectués avant la mise en place du virement permanent, de février à mai 2011, époque à laquelle sa fille avait manifestement pris en charge son père à son domicile. Sur la somme totale de 63 963 euros perçue par la fille entre 2009 et 2013, seule une somme de 8'400 euro peut être considérée comme une libéralité rémunératoire, le surplus, soit la somme de 55'563 euro, caractérisant des fonds issus de dons manuels rapportables.
Aucune circonstance ne caractérise la volonté expresse du de cujus de dispenser sa fille de rapporter à la succession les dons manuels dont il l'a gratifiée. Il incombait donc à celle-ci de les déclarer spontanément à ses cohéritiers. Or, en application de l'art.778 du Code civil, la dissimulation volontaire par l'héritier gratifié des libéralités qui lui ont été consenties est constitutive d'un recel.
De 2009 à 2013, la fille a admis avoir perçu de son père des sommes d'argent par chèques ou virements, aucun recel ne pouvant être retenu pour cette période. Pour celle de 2003 à 2008, le montant des dons manuels qui aurait dû être déclaré spontanément était de l'ordre de 146'600 euro, en ce comprise la somme de 30 000 euros correspondant au don enregistré de 2005. La fille s'est donc abstenue de déclarer la différence (116'600 euro) malgré les demandes réitérées de ses cohéritiers. Elle ne pouvait avoir oublié son obligation de déclaration des dons manuels perçus, au regard de l'importance des sommes et de la régularité des versements. Elle était à même de solliciter, fin 2013, de ses banquiers les copies de tous ses relevés de comptes dans le délai de conservation bancaire de dix ans, soit depuis fin 2003. Son attitude témoigne de la volonté de ne déclarer a minima que ce qu'elle estimait que ses cohéritiers étaient en mesure de justifier au fur et à mesure des pièces versées pour limiter au maximum les montants à rapporter, portant ainsi atteinte à l'égalité du partage. Le recel successoral est donc caractérisé tant dans son élément matériel qu'intentionnel.
- Cour d'appel de Toulouse, Chambre 1, section 2, 5 septembre 2017, RG n° 15/04810