Il y a lieu de constater que M. A Y et Mme Z, étaient fiancés à l’époque des premiers versements à Mme X, et devaient se marier selon la tradition musulmane.
Contrairement à ce qu’ont retenu les premiers juges, M. Y démontre bien s’être trouvé dans l’impossibilité morale de rapporter la preuve littérale de l’engagement de Mme X à son égard, surtout à compter du mois de décembre 2013, auquel remonte leur projet d’union conjugale.
En l’absence d’écrit, la preuve du prêt peut être apportée par un commencement de preuve par écrit, lequel peut être corroboré par un faisceau d’indices. Le commencement de preuve par écrit de l’engagement de rembourser doit en outre obligatoirement émaner de la personne à laquelle on l’oppose.
Si les copies des chèques litigieux et les relevés bancaires de M. Y démontrent la remise de sommes de l’appelant à l’intimée, ils ne suffisent pas à constituer la preuve de l’absence d’intention libérale.
Il est constant que la preuve de la remise de fonds à une personne ne suffit pas à justifier l’obligation pour celui qui les a reçus de les restituer ; il appartient au demandeur de rapporter la preuve de cette obligation, généralement contractée dans le cadre d’un prêt, conformément aux dispositions des art. 1315 et 1348 du Code civil.
La Cour de cassation considère en outre, que ce n’est pas au bénéficiaire des fonds de démontrer qu’il les a reçus en don.
La cour relève qu’à plusieurs reprises, dans les échanges de texto stéléphoniques qui ont été menés entre les parties entre le 13 novembre 2013 et le 6 mai 2015, extraits et relevés par maître L, clerc habilité au sein de la SCP Tristant-Le Peillet-Darcq, huissiers à Pontoise, par procès-verbal de constat du 15 juin 2016, dressé à la requête de M. Y sur son propre téléphone portable, Mme X a promis le remboursement des sommes que M. Y offrait de lui prêter après qu’elle se soit ouverte auprès de lui de ses ennuis financiers quasi-quotidiens pendant la période susmentionnée.
Le tribunal dans sa décision a choisi de ne retenir que les engagements de remboursement donnés pour des sommes précisément évaluées et sollicitées par Mme X elle même, telles qu’elles sont énoncées dans les courriels de l’intimée 27 novembre 2014 à 15 h 09, et du 30 décembre 2014 à 9 h 50, pour un montant total de 1.651,27 € .
Or il résulte notamment du constat d’huissier du 15 juin 2016 p. 8, que par courriel adressé le lundi 4août 2014 à 10h 55 , Mme X s’est adressée à M. Y en ces termes : « A, j’ai besoin d etoi la bank m a envoyé un courrier pour ma mère ….je commencerai à te rembourser tous les mois, 3.000 en septembre et 1.000 a partir d’octobre …" Alors que M. Y lui avait répondu à 10 h 56 :"Combien'', aucune réponse n’a été donnée par Mme X à cette demande.
Si aucune trace du paiement d’une somme importante dans les jours suivants cet appel n’apparaît dans le constat d’huissier, la liste des chèques matérialisant des remises de liquidités à sa fiancée, établie par M. Y montre que le 6 août 2014, en réponse à l’appel à l’aide de l’avant-veille, l’appelant a remis à sa fiancée une somme de 2.000 €.
Il s’ensuit que le surplus des sommes promises par Mme X doivent être considérées comme devant rembourser de façon échelonnée une partie des sommes effectivement prêtées depuis le mois de décembre 2013, et que Mme X apparaît s’être engagée à rembourser pour se préserver la faculté d’emprunter à nouveau auprès de son fiancé à l’avenir.
Alors que le montant total des chèques énumérés par M. Y dans ses écritures atteint sur la période du 27 décembre 2013 au 4 août 2014 la somme de 10.095 € , il s’avère que ces chèques sont émis à l’ordre de Z, mais aussi du Trésor public (à hauteur de 1.634 €) et d’une certaine Mina Rhmiza (à hauteur de 2.000 €). M. Y produit la copie de cinq chèques sur les dix invoqués sur cette période. Ces copies de chèques atteignent une somme totale de 5.845 €.
Il s’en déduit qu’à défaut par Mme X d’avoir précisé plus avant dans son texto le nombre exact de mensualités envisagées et la durée du remboursement, qu’elle a admis dans son SMS du 4 août 2014, devoir rembourser en au moins trois mois, de septembre à novembre 2014 (à raison de 3.000 € + 1.000 € + 1.000 €), les sommes qu’elle reconnaissait prêtées à hauteur de 5.000 €.
La cour dispose des éléments suffisants pour considérer que cette somme de 5.000 € couvrait l’avance de 2.000 € effectuée par M. Y le 6 août à la suite de la demande urgente exprimée par Me X le 4 août, mais aussi une somme de 3.000 € qui couvrirait la presque totalité des sommes dont M. Y revendique le prêt, après retrait par l’intimée du chèque émis à l’ordre de Mme Rhmiza pour 2.000 € .
Pour la période postérieure qui va du 7 août 2014 au 3 juin 2015, les deux seules dépenses dont Mme X a promis le remboursement à M. Y pour sa prise en charge sont celles déjà retenues par le premier juge : une somme de 200 € pour lui envoyer par Western Union un peu d’argent au Maroc où elle se trouve quelques jours en vacances, et celle de 1.451,27 € représentant le montant de la caution et d’un premier loyer requis par son bailleur pour l’entrée dans un nouveau logement, que Mme X dans son message du 30 décembre 2014 demande à M. Y de 'lui avancer'. Le constat d’huissier du 15 juin 2016 ne porte pas trace d’autres engagements de remboursement.
La cour retient que M. Y a prêté en réalité à Mme X une somme de 6.651,27 €, ses autres règlements devant être considérés comme des dons sous forme d’assistance à sa fiancée, à défaut de preuves d’engagement de rembourser de la bénéficiaire.
En conséquence, le jugement déféré est infirmé en toutes ses dispositions.
- Cour d'appel de Versailles, 16e chambre, 21 novembre 2019, RG n° 17/05991