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Le 26 octobre 2015

Suivant un acte authentique du 26 sept. 1996, les époux P, aux droits desquels de trouve la SCI D, ont donné à bail aux époux F, aux droits desquels se trouvaient les époux M, une partie d'une maison à usage de commerce et d'habitation située [...], pour une durée de neuf ans débutant le 1er janvier 1996 et s'achevant le 31 décembre 2005. Le contrat de bail stipule que :

« le preneur ne pourra dans aucun cas et sous aucun prétexte, céder son droit au présent bail ni sous-louer en toute ou partie les locaux loués, sans le consentement express et par écrit du bailleur, sauf toutefois dans le cadre de cession du bail à son successeur dans le commerce ci-dessus ; en outre, toute cession ou sous-location devra avoir lieu moyennant un loyer égal à celui ci-après fixé, qui devra être stipulé payable directement entre les mains du bailleur et devra être réalisé par acte authentique auquel le bailleur sera appelé et dont une copie exécutoire lui sera remise sans aucun frais pour lui ».

L'huissier de justice, rédacteur de l'acte de cession du fonds de commerce de boulangerie-pâtisserie exploité dans l'immeuble loué, commet une faute en sa qualité de professionnel du droit en s'abstenant d'informer les signataires de cet acte de la nécessité de recourir à un notaire pour dresser l'acte définitif de cession en dépit de la clarté des dispositions du contrat de bail commercial imposant cette exigence.

L'acte de cession étant inopposable à la société bailleresse, le cessionnaire n'est qu'un occupant sans titre, ni droit qui s'est vu refuser le renouvellement du bail ainsi que le paiement d'une indemnité d'éviction.  

Pour s'exonérer de sa responsabilité, l'huissier de justice ne peut invoquer l'autorisation de la cession par le juge commissaire et le tribunal de commerce, le cédant faisant l'objet d'une procédure de liquidation judiciaire. Le cessionnaire requérant a ainsi perdu une chance d'acquérir le droit au bail attaché au fonds de commerce. Ce préjudice résulte bien du non-respect du formalisme prévu au contrat de bail initial en cas de cession du droit au bail. En revanche, le cessionnaire n'a pas subi de manque à gagner au titre des bénéfices futurs qu'aurait procurés l'exploitation du fonds de commerce puisque la société bailleresse a manifesté son intention de reprendre la libre disposition de son local et que le requérant, exploitant un fonds de commerce de vente de vêtements dans un local contigu, souhaitait récupérer le local pour agrandir sa surface de vente.  En réparation de cette perte de chance,  la cour alloue au réquérant une indemnité de 110 000 EUR. L'action en garantie de l'huissier à l'encontre du mandataire-liquidateur du cédant, pris es-qualités, est irrecevable en raison de la clôture de la liquidation judiciaire et du dessaisissement qu'elle a entraîné. En revanche, sa responsabilité à titre personnel est engagée dès lors qu'il est intervenu à l'acte de cession et qu'il n'a pas vérifié l'efficacité juridique de ce dernier. Cette faute ayant également directement concouru à la réalisation du dommage, il est tenu de garantir l'huissier à hauteur de 50 % des sommes mises à sa charge.

Référence: 

- Cour d'appel d'Amiens, Chambre civile 1, 17 sept. 2015, RG N° 13/03831