M. Arnaud S. et Mme Cathy N., acquéreurs suivant acte reçu par maître Francis D., notaire, le 27 mars 2009, d'un appartement sis [...] et [...], moyennant le prix de 250.000 EUR, ayant appris en 2016 que l'immeuble était une construction non autorisée dont la démolition avait été ordonnée par un arrêt de la Cour d'appel d'Aix-en-Provence du 8 juin 2004, ont fait assigner devant le Tribunal de grande instance de Marseille leur venderesse, Mme Sophie B., ainsi que les notaires, en responsabilité et indemnisation de leurs préjudices. Ils réclamaient leur condamnation solidaire à leur verser une somme de 475.000 EUR à titre de dommages et intérêts.
Il a été relevé du jugement de première instance.
Le tribunal a justement retenu que la venderesse de l'immeuble était tenue de délivrer à ses acheteurs un bien conforme au sens des articles 1603 et suivants du Code civil. L'immeuble, en ce qu'il avait été édifié sans permis de construire et en ce qu'il faisait l'objet d'un ordre de démolition, n'était pas conforme aux caractéristiques convenues et attendues des acquéreurs, notamment au regard des normes administratives, l'ordre de démolition étant de nature à porter atteinte à la pérennité de l'immeuble, privant ainsi l'acheteur d'une pleine disposition de celui-ci à raison du risque d'éviction.
C'est en vain que la venderesse invoque sa bonne foi, puisqu'elle était la concubine de l'homme ayant réalisé illégalement la construction et qu'elle a elle-même, après son acquisition, réalisé des extensions illégales. Elle doit donc réparer le préjudice subi par les acquéreurs, qui ne demandent pas l'annulation de la vente. Le risque d'éviction n'existe plus puisque la mesure ordonnant la démolition est prescrite depuis le 19 juin 2018.
Le préjudice correspond à la perte de valeur de leur immeuble du fait que, privé de tout permis, il ne pourra faire l'objet, ni de travaux modificatifs, ni d'une reconstruction en cas de sinistre et il ne pourra pas être revendu au prix du marché en raison de ces graves inconvénients, ainsi qu'au préjudice moral résultant pour les acquéreurs de ce qu'ils ont pu légitimement craindre pendant plusieurs années devoir abandonner leur maison et se reloger. Le préjudice matériel est évalué à 150.000 EUR et le préjudice moral est évalué à 50.000 EUR.
- Cour d'appel d'Aix-en-Provence, Chambre 1-1, 2 juin 2020, RG n° 18/11712