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Le 03 avril 2022

 

Selon les articles 711 et 712 du code civil, la propriété des biens s’acquiert et se transmet par succession, par donation entre vifs ou testamentaire, par l’effet des obligations, ainsi que par accession ou incorporation, et par prescription.

La charge de la preuve incombe au demandeur à l’action en revendication ; que toutefois, si ce dernier fournit un élément de preuve, il revient au juge saisi d’une action en revendication d’une propriété immobilière de procéder à la comparaison des droits en opposition, pour déterminer les présomptions de propriété les meilleures et les plus caractérisées.

En l’espèce, M. R Z indique que l’indivision Z tire ses droits de propriété sur la parcelle située à Morne à l’Eau, cadastrée section […] de leur auteur commun Avril Z, dont les ayants droit, J Z, K Z épouse d’L C, AL Z et M Z, avaient obtenu des époux I B et Y BQ BM BN, par décision judiciaire en date du 18 janvier 1907, à titre de dation en paiement d’une créance, une parcelle de terre située en la commune de Morne à l’Eau d’une contenance de 89 a 10 ca;

- que selon ce jugement, ladite parcelle de terre, telle que délimitée par l’arpenteur géomètre A, est bornée 'au Nord par le surplus des terres de madame B, au Sud par la route coloniale, à l’Est par les terres du sieur AJ AK, aux droits de Madame B, et enfin à l’Ouest par le surplus des terres de madame B.';

- qu’outre ce jugement à la calligraphie parfaitement lisible et ayant donné lieu à publication le 8 octobre 1907 à la conservation des hypothèques de Pointe-à-Pitre volume 626 numéro 2, R Z produit également pour justifier la différence de contenance, l’acte de vente par lequel les consorts J Z, K Z épouse C, AL Z, AM Z et AN Z ont, un an et demi plus tard, par acte authentique établi le 28 juillet 1908, vendu à Odillon VENUS une portion de terre détachée de ce fonds d’une contenance de cinquante ares, 'borné au Nord par les terrres de Monsieur J Z, au Sud par la route coloniale, à l’Est par les terres de AJ AK, et à l’Ouest par le surplus des terres dont cette portion est détachée'; qu’enfin, R Z verse aux débats un acte de partage des consorts D, relatif à la propriété de deux parcelles de terrain situées en la commune de Morne à l’Eau, la première d’une contenance de 8 hectares détachée de l’habitation 'L’Espérance’ acquise les 24 septembre et 10 octobre 1904 de R BM BN et une seconde vendue également par ce dernier le 6 janvier 1908 contigue à la première d’une contenance de 3 h 97 ares, cette dernière ayant pour abornements: 'Au Sud la route Nationale n°5, Au Nord, le canal des ROTOURS, à l’Ouest, les terres de M. Aurélie C ou ayants droit et à l’Est les terres des héritiers BC Z';

- que ces pièces permettent de localiser leur fonds, au regard de l’ancienne route coloniale et de l’acte de notoriété acquisitive dont se prévaut X-BD BE, mentionnant l’abornement de la parcelle alors localisée 'en la section Lasserre L’espérance en bordure de la […], aujourd’hui Nationale, conduisant de Morne à L’Eau au Moule', d’une surface de 52 ares 74 centiares ayant 'au Sud, la route Nationale N°5 (…) à L’ouest, celle des consorts D';

- que le titre constitué par la décision judiciaire constitue un élément de preuve concernant la propriété d’une parcelle désormais cadastrée AO n°196.

Il  convient de le comparer avec les éléments de fait argués par les parties intimées, lesquelles se prévalent dudit acte de notoriété acquisitive établi le 10 novembre 1960 par devant le notaire O à Pointe-à-Pitre en faveur d’L C, 'veuf en première noce de la dame K AQ AR et époux en 2èmes noces de Mme Mme AS AT’ et de son unique héritière sa fille issue de son deuxième mariage, Melle BO Y-BP C.

S’agissant du droit de propriété né de l’usucapion, il incombe à celui qui s’en prévaut d’établir les éléments de faits démonstratifs de sa possession continue et non interrompue, paisible, publique, non équivoque, et à titre de propriétaire ; contrairement à ce que soutient X-BD BE, l’existence d’un acte notarié constatant une usucapion ne suffit pas, à lui seul, à établir celle-ci; qu’il appartient au juge d’en apprécier souverainement la valeur probante et de déterminer si les actes matériels caractérisant une possession utile sont réunis.

il sera relevé en premier lieu, que dans l’acte notarié du 10 novembre 1960, le notaire a recueilli les témoignages de 'M. E (Ernest), mécanicien, âgé de 67 ans et de M. F (R), chaudronnier, âgé de 72 ans, demeurant le premier au Morne à l’Eau et le deuxième à la Pointe-à-Pitre’ lesquels ont attesté:

- Que dès leur jeune âge, ils ont connu M. L C, d’ailleurs leur contemporain, en possession d’une portion de terre, où existait sa maison de famille situé en la Commune du Morne-à-l’Eau, en la section Lasserre l’Espérance, en bordure de la […], aujourd’hui Nationale, conduisant de Morne-à-l’Eau au Moule, terre qu’il avait achetée sur un simple écrit-privé; qu’il a toujours négligé de faire enregistrer vu le peu de valeur des terres à cette époque, pièce cyclonée qu’il a perdu avant son décès.

Cette parcelle de terre a fait l’objet d’un arpentage dresse par M. AU AV, ingénieur des Travaux Publics assermenté, demeurant au Moule, le trois juillet mil neuf cent soixante, dont l’original avec son procès-verbal demeurera ci-annexé et seront soumis avec les présentes à la formalité de l’Enregistrement.

Que ces opérations, menées en presence des voisins limitrophe qui les ont approuvées et acceptées, ont révélé une surface de cinquante deux ares soixante quatorze centiares, renfermées dans les bornes suivantes:

au nord, un chemin de charrette la séparant des terres de Madame Veuve BK BL, au sud, la route nationale N°5 où elle fait face, dans sa pointe sud-ouest avec le chemin vicinal des Grands Fonds dit de Chazeau Jabrun; à l’est, la propriété Veuve AW AX et à l’ouest par celle des consorts D.

Ils attestent avec la plus entière bonne foi que M. L C, et ensuite sa fille, son unique héritiére, ont toujours joui de cette portion de terre au vu et au sus de tout le monde, d’une manière paisible, publique, tranquille, non équivoque et non interrompue à titre de maitres et propriétaires depuis plus de trente ans.

La prescription, courant ainsi maintenant au profit de Mlle C, n’a été à aucun moment interrompue, ni suspendue par aucune des causes mentionnées aux articles 2242 à 2256 du Code Civil.

En conséquence, et conformément aux articles 2229 et 2235 du même code, cette Delle se trouve tant du chef de son père que de son propre chef, par prescription, propriétaire définitive et incommutable de la portion de terre dont la désignation précède, laquele est évaluée à QUATRE CENT MILLE FRANCS.

Le procès-verbal de délimitation du terrain dressé le 3 juillet 1960 annexé à l’acte a été établi en présence de AY AZ, témoin et de 'Madame Veuve AX AW, voisine bornant à l’Est.

Ces deux pièces révèlent ainsi des actes matériels de possession sur la parcelle en litige accomplis par L C, lequel est décédé 'en sa demeure au Morne-à- l’Eau’ le 27 mars 1930 où était installé 'sa maison de famille', possession poursuivie ensuite par sa fille également y demeurant, en la commune du Morne à l’Eau , 'où elle est née’ ; selon ce même acte notarié du 10 novembre 1960, L C occupait le bien 'à titre de maîtres et propriétaires', les témoins E et F attestant même de l’acquisition du bien par un acte sous seing privé détérioré lors du passage d’un cyclone puis égaré ; se comportant clairement comme un propriétaire, L C, qui se prévalait même sur ce point de l’existence d’un titre sous seing privé, possédait de manière non équivoque ; au regard de ces deux témoignages, outre ceux d’AY AZ et de madame Veuve AW AX, propriétaire d’une des parcelles contigues ayant tous deux participé aux opérations d’arpentages le 3 juillet 1960, la possession d’L C suivie de celle de sa fille BO Y-BP C, s’avère également paisible et publique ; que les témoins E (né en 1893) et F (né en 1888) attestent également que 'M. L C, et ensuite sa fille (…) , depuis son décès ont joui de cette portion de terre, au vu et au su de tout le monde et qu’ainsi leur occupation du fond s’est réalisé de manière continue et non interrompue ce qu’ils ont pu constater 'depuis leur jeune âge’ ; compte tenu de l’âge de ces témoins nés tous deux fin du XIXème siècle (1893 et 1888), L C tout d’abord, puis à partir de son décès le 27 mars 1930, sa fille, ont accomplis des actes de possession utile sur la parcelle en litige depuis bien plus de trente années, soit près de 50 ans à la date de l’acte notoriété du 10 novembre 1960.

Au regard de ces éléments M. R Z n’établit pas, quant à lui, l’existence d’un quelconque vice affectant une telle possession ainsi utile à la date du 10 novembre 1960 ;  il ne verse aucune pièce démontrant jusqu’au 10 novembre 1960 une quelconque contestation se soit élevée pour interrompre le cours de la prescription acquisitive ; les attestations de BA BB, né le […], […], né le […], […], né le […], par lesquelles ils évoquent les plantations réalisées R Z, ne comportent pas la date de leurs constats, ce qui les rendraient en revanche compatibles avec la période d’action en protection de sa possession engagées par BO Y BP C de 1972 à 1974 ; ils ne peuvent s’analyser en la démonstration de trouble interruptif de prescription ; il en est de même de l’acte de partage des consorts G, mentionnant à l’Est les terres des héritiers BC Z, dont un des héritiers était la première épouse d’L C, par lequel le notaire en l’état des actes en sa possession indique les abornements de leur parcelle.

Il s’évince de l’ensemble de ces éléments que le délai écoulé a consacré une possession utile et trentenaire dès lors qu’à la date de l’assignation du 24 juillet 2018, l’usucapion du terrain N°AO 196 par L C et à la suite sa fille BO Y-BP C était acquise depuis le 10 novembre 1960 ; que cette dernière puis son légataire universel X-BD BE sont ensuite demeurés en possession de la parcelle dont la propriété leur était acquise depuis le 10 novembre 1960.

Par voie de conséquence, l’action en revendication engagée par M. R Z étant défaillie, toutes ses prétentions en découlant ne pouvaient qu’être rejetées par la juridiction de première instance.

Référence: 

- Cour d'appel de Basse-Terre, 1re chambre, 24 février 2022, RG n° 20/00678