M. G.-H., de nationalité française, et Mme R., de nationalité russe et américaine, se sont mariés à Paris le 28 mai 1991 sous le régime de la séparation de biens, suivant contrat de mariage reçu par notaire le 21 mai. Ils se sont installés aux Etats-Unis où sont nés leurs deux enfants.
Mme R. a, le 8 novembre 2001, saisi la Supreme Court de l'Etat de New York d'une requête en divorce. Par « Decision and Order » du 28 juin 2002, le juge Lobis a rejeté la demande de M. G.-H. tendant à voir dire le contrat de mariage français valide et exécutoire et écarté l'application de ce contrat. Le juge Goodman a ensuite rendu une « Trial Decision » le 3 octobre 2003, puis un « Judgement of Divorce » le 9 janvier 2004, lequel a prononcé le divorce aux torts du mari, confié la garde des enfants mineurs à la mère, avec un droit de visite et d'hébergement au profit du père, en précisant que la mère devrait consulter le père sur toutes les décisions significatives concernant les enfants mais qu'elle aurait le pouvoir de décision finale, fixé les modalités de contribution du père à l'entretien et l'éducation des enfants, alloué à l'épouse une pension alimentaire mensuelle pendant sept ans et statué sur la liquidation des intérêts patrimoniaux des époux. Sur ce dernier point, le jugement a été partiellement réformé par une décision de la cour d'appel de l'Etat de New York du 3 mai 2005, qui a notamment dit que l'intégralité du solde du produit de la vente de l'appartement new-yorkais devait revenir à M. G.-H.
Par acte du 9 février 2005, Mme R. a saisi le tribunal de grande instance de Paris d'une demande d'exequatur des décisions américaines des 3 octobre 2003 et 9 janvier 2004 en leurs seules dispositions relatives aux pensions alimentaires. A titre reconventionnel, M. G.-H. a demandé que soit déclaré inopposable en France le jugement du 28 juin 2002.
Les époux X (pour l'un de nationalité française et l’autre russe et américaine) mariés en France sous le régime de la séparation de biens, vivent aux États-Unis où a été prononcé leur divorce aux torts du mari. La juridiction américaine a écarté l’application du contrat de mariage et statué sur les conséquences du divorce. Le TGI de Paris saisi d'une demande d'exequatur par l’épouse, a rejeté la demande de l’époux que soit déclaré inopposable en France le jugement américain, décision confirmée en appel.
La décision d’une juridiction étrangère qui, par application de sa loi nationale, refuse de donner effet à un contrat de mariage reçu en France, n'est pas en soi contraire à l'ordre public international français de fond et ne peut être écartée que si elle consacre de manière concrète, au cas d'espèce, une situation incompatible avec les principes du droit français considérés comme essentiels. En l’espèce le litige se rattachait pour l'essentiel aux États-Unis. La décision étrangère, en appliquant la loi du for pour la liquidation des droits patrimoniaux des époux (en l’occurrence le régime matrimonial en vigueur de l'État de New York), n'a pas consacré concrètement une telle situation. La cour d'appel en a déduit à bon droit, écartant toute inconciliabilité, que ni le principe de la liberté des conventions matrimoniales, d'ordre public en droit interne, ni les objectifs de sécurité juridique et de prévisibilité invoqués, ne pouvaient faire obstacle à la reconnaissance en France des décisions américaines.
Si le principe d'égalité des parents dans l'exercice de l'autorité parentale relève bien de l'ordre public international français, la circonstance qu'une décision étrangère réserve à l'un des parents le soin de prendre seul certaines décisions relatives aux enfants, ne peut constituer un motif de non-reconnaissance qu'autant qu'elle heurte de manière concrète les principes essentiels du droit français. La cour d'appel, qui a fait ressortir que les mesures relatives aux enfants avaient été arrêtées par référence à leur intérêt supérieur et que les droits du père (devant, dans tous les cas, être consulté avant toute décision) n'étaient pas méconnus, a exactement retenu que les décisions américaines, en l'absence de violation de l'ordre public international, devaient être reconnues dans l'ordre juridique français.
- Cour de cassation, 1re chambre civile, 2 décembre 2020, pourvoinn° 18-20.691