Le jugement entrepris doit être confirmé en ce qu'il a condamné M. Rémy A au paiement de la somme de 38'000 € au titre de la clause pénale prévue par l'avant-contrat du 9 septembre 2014, dès lors que cet acquéreur, qui s'était engagé à acquérir avant l'expiration du délai de 3 mois suivant la signature de l'acte, a fait savoir au notaire désigné dans l'avant-contrat pour recevoir l'acte authentique et par courrier du 11 décembre 2014, ainsi qu'en atteste l'officier public dans une lettre du 17 novembre 2014 adressée aux époux Y, qu'il décidait de mettre un terme à la procédure d'acquisition. Or, l'engagement ayant été souscrit avec renonciation expresse de l'acquéreur à toute condition suspensive d'obtention de prêt, il n'est par ailleurs pas établi qu'ait été défaillie l'une quelconque des autres conditions de la vente.
Alors qu'il n'est nullement contesté que le délai de rétractation de l'acquéreur de l'art. L 271-1 du code de la construction et de l'habitation avait été valablement purgé par l'agent immobilier rédacteur, l'avant-contrat prévoit expressément la possibilité pour les vendeurs qui ne seraient pas en défaut et qui renonceraient à agir en vente forcée, de prendre acte du refus de l'acquéreur de signer l'acte authentique et d'invoquer la résolution du contrat avec versement de l'indemnité forfaitaire égale à 10 % du prix "net vendeur" de 380'000 EUR. Dès lors, M. Rémy A est redevable de la somme de 38'000 EUR à titre de clause pénale.
Sur la responsabilité de l'agent immobilier
La société Ensemble et toit, agent immobilier, a manifestement engagé sa responsabilité en n'effectuant aucune vérification des capacités financières de M. A qui pour la deuxième fois, indépendamment de l'acte signé par ses père et mère, s'était engagé, d'une part, à acquérir le bien litigieux en renonçant expressément à toute condition suspensive d'obtention de prêt, alors que le courrier précité du notaire révèle qu'au contraire il ne disposait pas des fonds nécessaires à l'opération et, d'autre part, s'était engagé à verser entre les mains d'un tiers séquestre, une somme de 31'520 EUR, alors qu'il ne s'est jamais exécuté sur ce point non plus et ce sans que l'agent immobilier démontre avoir effectué des diligences en vue du versement.
La circonstance alléguée par la société Ensemble et toit et selon laquelle cet agent immobilier aurait sans faute prévu de confier au notaire la mission de recevoir les fonds à titre de séquestre, au motif qu'il n'aurait pas disposé de la garantie financière exigée par la loi lui permettant de percevoir les fonds, laisse demeurer que l'agent immobilier rédacteur de l'acte est responsable des conséquences dommageables de l'erreur indéniable de rédaction de l'acte litigieux qui, de manière inexacte et contradictoire, énonce, d'une part, que la somme de 31'205 EUR a été versée "à l'instant" entre les mains du notaire désigné séquestre et, d'autre part, que le versement de cette somme devait s'effectuer au plus tard 8 jours après l'expiration du délai de rétractation de l'art. L 271-1 du code de la construction et de l'habitation et qu'à l'issue de ce délai, le versement par l'acquéreur était une condition suspensive de l'avant-contrat. Si ces dernières stipulations reprennent les dispositions de l'art. L 271-2 alinéa 1 du code précité, pour le cas où le professionnel dépositaire des fonds ne disposerait pas d'une garantie financière pour les représenter, elles ne peuvent pas avoir été applicables en même temps que celles selon lesquelles le notaire pouvait recevoir les fonds sans attendre la purge du droit de rétractation, conformément aux dispositions de l'art. L 271-2 alinéa 2 du même code. Le professionnel, qui ne justifie nullement avoir exercé son devoir de conseil sur ce point, faute, notamment, d'avoir prévenu les vendeurs qu'il ne pouvait encaisser immédiatement les fonds et qui a établi un acte incohérent, est donc responsable d'avoir fait s'engager les vendeurs sans que ceux-ci bénéficient de la sécurité du dépôt de garantie stipulé, à laquelle ils pouvaient légitimement s'attendre pour avoir conclu l'acte par l'intermédiaire d'un professionnel. A cet égard, il sera observé que l'avant-contrat permettait au vendeur de faire bloquer la somme séquestrée jusqu'à accord amiable entre les parties ou décision de justice attribuant les fonds.
Ces négligences de l'agent immobilier ont fait perdre au vendeur, d'une part, une chance sérieuse de ne pas contracter avec un acquéreur qui n'avait manifestement pas les moyens d'acquérir et, d'autre part, une chance sérieuse de ne pas contracter avec un acquéreur dénué de sérieux au point de ne pas même verser le dépôt de garantie stipulé, occasionnant ainsi une immobilisation inutile du bien sur plusieurs mois et rendant par sa faute plus difficile et onéreuse la perception de la juste indemnité forfaitaire stipulée pour le cas l'acquéreur ne s'exécuterait pas, toutes conditions suspensives étant par ailleurs réalisées ou réputées réalisées par la faute de celui-ci.
Ce préjudice causé par l'agent immobilier est réparé par l'allocation d'une indemnité de 12'000 EUR à titre de dommages et intérêts. Les intérêts au taux légal courront sur cette somme à compter du présent arrêt.
- Cour d'appel de Paris, pôle 4 - chambre 1, 1er décembre 2017, N° de RG: 16/06057