Le divorce doit être prononcé aux torts du mari. En effet, alors que la femme souffre de troubles bipolaires qui ont été diagnostiqués en 2002 mais qui ont commencé bien avant, le mari n'a apporté aucune assistance à la femme.
La femme a développé une activité libérale d'attachée de presse qui a rapidement connu un bel essor et s'est révélée très lucrative, mais qui a épuisé la femme. Le mari, quant à lui, a laissé son épouse assumer exclusivement la charge financière du foyer, sa part dans l'éducation des enfants alors qu'il a cessé lui-même tout exercice professionnel pour se consacrer à des activités liées à ses passions musicales notamment.
Les époux étant mariés sous un régime séparatiste, le mari s'est fait consentir sous la forme d'un don manuel la clientèle de la femme et il a créé une société à laquelle il a apporté la clientèle, société dont il détenait la majorité des parts. C'est la femme qui a assumé le travail dans cette société, sans aucune collaboration du mari. La femme a été révoquée de ses fonctions de cogérante en 2007, en raison de sa maladie et le mari a ensuite revendu la société, pour 110 000 EUR.
L'état de santé de la femme n'a cessé de se dégrader, au point de faire six tentatives de suicide entre 2007 et 2009. Il est également établi que le mari a eu plusieurs liaisons après 2007.
Le mari doit être débouté de sa demande en divorce pour faute. Certes, la femme a eu plusieurs aventures et a fait des dépenses excessives. Cependant, ces faits ne lui sont pas imputables. La femme souffre de troubles bipolaires depuis de nombreuses années.
Le trouble de bipolarité est caractérisé par des phénomènes compulsifs (conduites sexuelles inconséquentes, dépenses excessives) et l'exaltation de l'humeur en phase maniaque ou mixte. Les faits commis par la femme relèvent de ses troubles mentaux et ne peuvent constituer une faute cause de divorce. Il convient d'octroyer à la femme des dommages et intérêts, sur le fondement de l'art. 266 du Code civil. En effet, la femme subit des conséquences d'une particulière gravité du fait de la dissolution du mariage. L'attitude du mari qui a laissé son épouse, affectée de troubles psychiatriques graves, assumer la charge financière du foyer et l'a ensuite délaissée, après avoir consolidé sa propre situation financière, cause à la femme un préjudice que la cour estime pouvoir fixer à 5 000 EUR.
Il convient d'octroyer à la femme une prestation compensatoire sous la forme d'un capital de 40 000 EUR et sous la forme d'une rente mensuelle de 900 EUR pendant 8 ans.
La rupture du mariage crée en effet une disparité dans les conditions de vie des époux au détriment de la femme. Alors qu'elle a supporté la charge financière du foyer et l'éducation des deux enfants, la femme est désormais incapable de travailler et ne perçoit qu'une faible pension d'invalidité. Ses droits à la retraite sont également modestes. Le mari, quant à lui, bénéficie d'une situation financière bien meilleure. Il a revendu les parts sociales de la société, créée grâce au don manuel fait par la femme, pour 110 000 EUR. Il a également perçu des fonds issus d'une succession pour 160 768 EUR, alors que la femme n'a reçu lors du décès de ses parents que 23 994 EUR.
- Cour d'appel d'Angers, Chambre 1, section B, 29 septembre 2016 , RG N° 15/00608