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Le 13 janvier 2017

L'acquéreur ne saurait évoquer l'accord des parties sur la chose et le prix dès lors qu'elle discutait encore le montant global de l'opération.

Le 16 décembre 2013, par l'intermédiaire de l'agence immobilière Keops, l'association Assemblée du Saint Esprit a formalisé une offre d'acquisition d'un bien immobilier appartenant à la SCI Mechin VF, situé [...], pour un prix de 285.000 EUR.

Cette offre comprenait deux conditions suspensives : l'obtention d'un emprunt bancaire dans les 30 jours de l'avant contrat notarié et l'accord du plan de changement d'affectation par la commune de Montmorency. Elle prévoyait également la signature d'une promesse de vente entre les deux parties, avant le 10 janvier 2014, suivant accord du vendeur.

L'offre d'achat était acceptée par la SCI Mechin VF, qui signait l'offre et y apposait la mention « bon pour accord ».

Une promesse de vente été rédigée par le notaire et envoyée aux deux parties, sans pour autant que le processus aboutisse à sa signature.

Le 20 mai 2014, l'association Assemblée du Saint Esprit a fait assigner devant le tribunal de grande instance de Pontoise, la SCI Mechin VF, aux fins de la voir condamnée à signer la promesse de vente ou, subsidiairement, condamnée au paiement de dommages et intérêts.

Par jugement du 11 janvier 2016, la juridiction a débouté l'association Assemblée du Saint Esprit de l'ensemble de ses demandes, d'où appel.

Au regard des difficultés posées par l'Assemblée du Saint Esprit s'agissant de la prise en charge des frais d'agence (au point d'indiquer que cette question serait discutée 'plus longuement à la signature'), les premiers juges ont considéré qu'il n'y avait pas d'accord sur la chose et le prix en l'absence d'entente sur le prix global de l'opération et ont débouté l'association de sa demande de vente forcée.

Sur la demande de dommages-intérêts, le tribunal a jugé que la SCI Mechin n'avait pas commis de faute en refusant de poursuivre les discussions alors que l'association refusait de prendre en charge la totalité des frais d'agence. Il a ajouté qu'en outre l'association ne justifiait pas avoir subi un préjudice.

L'Assemblée du Saint Esprit reproche au tribunal d'avoir dénaturé les dispositions de l'art. 1583 du code civil en étendant son application au "coût global de l'opération" en incluant dans le prix de la chose des dépenses assumées par l'acquéreur (en l'espèce des honoraires d'agence) qui n'ont aucune incidence sur le prix du bien puisqu'ils ne sont que des frais accessoires à la vente, qui ne concernent d'ailleurs que la relation de l'acquéreur avec l'agence immobilière. A titre subsidiaire elle sollicite la réparation du préjudice résultant de la rupture des pourparlers par la SCI Mechin alors qu'un accord avait incontestablement été trouvé sur les conditions essentielles de la future vente et indique que son préjudice consiste non seulement en l'immobilisation injustifiée de l'acompte versé dans la perspective de la signature de la promesse, mais aussi dans l'échec de son projet et des tracas occasionnés par la SCI Mechin VF.

La SCI Mechin VF rappelle les dispositions de l'article 1593 du code civil (les frais d'actes et autres accessoires de la vente sont à la charge de l'acquéreur), et souligne que la position de l'Assemblée du Saint Esprit consistait à faire supporter par le vendeur partie des frais d'agence. Elle s'étonne que l'Assemblée du Saint Esprit persiste en son intention d'acquérir le bien en cause dans la mesure où la lecture du règlement du lotissement où se situe le bien révèle qu'aucune activité cultuelle ne peut s'exercer dans cette zone artisanale.

Il est constant que le 20 février 2014 l'Assemblée du Saint Esprit a annulé l'achat au motif que la surface réelle était inférieure à la surface visée dans son offre d'achat en indiquant qu'elle n'avait pu se mettre d'accord avec le propriétaire.

Des échanges sont ensuite intervenus pour établir une promesse de vente au prix de 275.000 EUR, net vendeur, mais l'Assemblée du Saint Esprit ayant émis des réserves sur le paiement de la commission d'agence (10.000 euros HT, soit 12.000 euros TTC), la société Mechin VF a fait savoir qu'elle ne signerait pas la promesse de vente.

Dans le projet de promesse de vente, le prix de vente du bien était fixé à la somme de 285.000 EUR, incluant la commission HT de 10.000 euros de l'agence. Rien n'était dit sur le paiement de la TVA.

L'Assemblée du Saint Esprit a indiqué dans un mail du 27 février 2014 au notaire : "quand l'agence m'a envoyé l'acceptation du prix j'ai remarqué que la commission était payée par l'acquéreur au lieu que le propriétaire, j'ai appelé l'agence pour avoir plus de renseignements, monsieur A. m'a dit de regarder sur le document et que c'était bien spécifié 285.000 euro hors frais de notaire et que nous avions pas un sou de plus à payer. En ce qui nous concerne, nous devons payer 10.000 euro à l'agence. J'ai eu l'agence à ce sujet je lui ai répété tout ce que je viens de vous dire, il m'a dit qu'il allait voir avec le propriétaire s'il voulait lui payer 50 % de la TVA et que nous aussi nous lui payions 50 % de la TVA. A ce jour je n'ai pas de nouvelle".

Le notaire a ainsi répondu le 28 février 2014 : "lorsque je regarde votre proposition d'achat faite à Keops, vous avez mentionné 10.000 euro HT à la charge de l'acquéreur. Par conséquent, cela correspond à 12.000 euro TTC, à votre charge. Je le prévois ainsi dans l'acte, et vous aborderez ce point au rdv si vous n'avez pas eu de réponse de l'agence".

L'Assemblée du Saint Esprit a répondu le même jour : "dans ce cas sur quelle base sera calculé les frais de notaire sur 275.000 euro ou 273.000 euro".

Plusieurs échanges ont suivi en particulier entre l'Assemblée du Saint Esprit et le notaire sur le prix global de l'opération ont légitimement conduit le vendeur à renoncer à lui vendre le bien.

L'Association du Saint Esprit ne saurait donc évoquer l'accord des parties sur la chose et le prix dès lors qu'elle discutait encore le montant global de l'opération en tentant de faire supporter partie du paiement de la TVA grevant la commission d'agence au vendeur au mépris de l'équilibre de l'opération, une telle demande ayant pour but de priver la société venderesse de partie du prix de vente en lui faisant supporter un coût qui ne lui incombait pas.

Il faut en outre ajouter que l'appelante elle-même ne considère pas la vente parfaite puisqu'elle sollicite la signature contrainte non pas d'un acte de vente, mais d'un "acte préparatoire à la vente" dont on ignore le contenu, mais dont on peut supposer qu'il contient notamment la condition suspensive relative à la possibilité pour elle d'exercer une activité cultuelle dans le bien.

C'est donc à raison que le tribunal l'a déboutée de sa demande principale.

Référence: 

- Cour d'appel de Versailles, Chambre 3, 8 décembre 2016, RG N° 16/03992, inédit