Par acte authentique du 1er août 2008, la S.C.I. Immobilière du Rond Point a cédé à la S.C.I. AJR43 un ensemble immobilier situé [...], au prix de 500'000 euro.
Au motif que des infiltrations et des remontées d'humidité affectaient l'un des appartements situés au rez-de-chaussée qu'elle donnait à bail, la société AJR43 a saisi, par acte du 9 juillet 2012, le juge des référés du tribunal de grande instance de Nancy qui, par ordonnance du 8 août suivant, a désigné M. Noël V en qualité d'expert judiciaire.
L'expert ainsi désigné ayant déposé son rapport, le 8 mars 2013, la société AJR43 a, par acte du 4 octobre 2013, a fait assigner au fond la société Immobilière du Rond Point pour la voir condamner à lui payer différentes sommes à titre de réduction du prix de vente, de dommages-intérêts pour perte de loyers et préjudice moral, d'indemnité de procédure.
Par jugement contradictoire, assorti de l'exécution provisoire, du 16 décembre 2015, le tribunal de grande instance de Nancy a condamné la S.C.I. Immobilière du Rond Point à payer à la S.C.I. AJR43 diverses sommes.
Appel a éré relevé.
L'art. 1648 du Code civil dispose que l'action résultant des vices rédhibitoires doit être intentée par l'acquéreur dans un délai de deux ans à compter de la découverte du vice. En l'espèce, la vente porte sur un immeuble à usage d'habitation et l'appartement du rez-de-chaussée était donné à bail lors de la vente. Les doléances qui ont été adressées à l'acheteur de l'immeuble par le locataire qui se plaignait d'humidité affectant le logement, sans autre précision, n'étaient pas assez détaillées pour permettre à l'acquéreur d'apprécier dans toute son ampleur le vice dont était atteinte la chose vendue. En revanche, la lettre adressée, le 18 octobre 2010, par la caisse d'allocation familiales qui faisait état d'infiltrations par le mur et par le sol de nature à rendre l'appartement donné à bail inéligible à l'allocation logement, a permis à l'acquéreur d'avoir une connaissance plus précise du vice affectant la chose vendue. En assignant en référé le vendeur, par acte du 9 juillet 2012, c'est-à-dire moins de deux ans après avoir reçu la lettre de la caisse d'allocations familiales, l'acheteur a agi dans le délai de deux ans prévu à l'article 1648 du Code civil.
Sur le fond, la cour d'appel juge que l'action estimatoire (action en réduction de prix) intentée par l'acheteur de l'immeuble est bien fondée. Le rapport d'expertise judiciaire a constaté des vices de construction de l'immeuble expliquant l'importante humidité affectant le logement du rez-de-chaussée (remontées capillaires et mauvais état des enduits de façade). L'expert a conclu que le logement était impropre à sa destination. Les vices n'étaient pas apparents lors de la vente, puisque le locataire, entré dans les lieux un mois avant la vente, atteste qu'il n'existait alors aucune trace d'humidité. La clause excluant la garantie des vices cachés n'est pas applicable puisque le vendeur, qui était propriétaire de l'immeuble depuis 1988, avait nécessairement connaissance des vices affectant l'immeuble, l'expert ayant précisé que les remontées capillaires existaient depuis l'origine de la construction et que le mauvais état des enduits n'était pas récent. La réduction de prix à laquelle l'acheteur peut prétendre est égale au coût des travaux de réfection des désordres, coût évalué à 24'388 euro par l'expert. Par ailleurs, l'acheteur est bien fondé à demander l'indemnisation de la perte locative. Le logement est resté inoccupé depuis le départ du locataire en juillet 2011 et les travaux ne pouvaient être réalisés avant le dépôt du rapport d'expertise. La perte de loyer pendant 22 mois doit être indemnisée à hauteur de 9'570 euro.
- Cour d'appel de Nancy, Chambre civile 1, 19 septembre 2017, RG n° 16/00224