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Le 18 septembre 2019

Par acte sous seing privé du 1er août 2014, M. et Mme X ont donné à bail à Mmes Z et A un pavillon sis […] (94120), moyennant un loyer mensuel révisable de 3. 000 euro hors charges.

M. et Mme X, par lettre recommandée du 12 juillet 2016, ont informé leurs locataires qu’ils avaient découvert l’existence d’annonces de mise en location de leur bien sur le site Airbnb et les ont mises en demeure, en conséquence de cette sous-location illicite, de quitter les lieux.

Il résulte tant de l’art. 8 de la loi du 6 juillet 1989 que du bail concédé aux dames Z et A qu’il était interdit aux locataires de sous-louer le bien, sauf à obtenir l’accord des bailleurs.

Par ailleurs, aux termes des art. 546, 547, 548 du Code civil, la propriété immobilière donne droit sur tout ce qu’elle produit et les fruits civils appartiennent au propriétaire par accession.

L’article 549 de ce même code précise que " le simple possesseur ne fait les fruits siens que dans le cas où il possède de bonne foi. Dans le cas contraire, il est tenu de restituer les produits avec la chose au propriétaire qui la revendique…". la bonne foi requise pour l’acquisition des fruits doit revêtir un caractère permanent. Sitôt qu’elle cesse, cesse l’acquisition des fruits (Cass. 3e civ. 2 décembre 2014, n°13-21.127).

Le caractère différé de l’accession, invoqué par les intimées pour échapper à la restitution des fruits civils et en vertu duquel le preneur reste propriétaire, pendant la durée de la location, des constructions qu’il a édifiées sur le terrain du bailleur, implique que le locataire reste maître des constructions par lui édifiées jusqu’à l’expiration du bail, et qu’il puisse ainsi les sous-louer librement.

Il s’ensuit qu’en l’espèce, ce principe ne peut trouver à s’appliquer, dès lors que les dames Z et A n’étaient pas en droit de sous-louer le bien dont elles savaient n’être pas propriétaires, la loi et leur bail leur en faisant interdiction formelle, et qu’ayant violé tout à la fois la loi et le bail qui leur avait été consenti, elles ont été, depuis qu’elles ont publié des annonces en vue de sous-louer, des possesseurs de mauvaise foi, et qu’elles ne peuvent, de ce fait, prétendre faire leurs les fruits de sous-locations illicites, tous les fruits perçus après la survenance de la mauvaise foi devant être restitués au propriétaire.

Mmes Z et A ne sauraient utilement invoquer la théorie de l’enrichissement sans cause dès lors que l’enrichissement des époux X trouve, en l’espèce, sa cause légitime dans les dispositions du Code civil précitées, et donc, dans le texte même de la loi.

De même est inopérant le moyen tiré du fait que les bailleurs n’auraient subi aucun préjudice parce qu’ils ont perçu les loyers en contrepartie de la jouissance du bien donnée aux intimées. En effet, les preneurs de mauvaise foi ont causé un préjudice à leurs bailleurs en faisant leurs les fruits de la chose qui, aux termes de la loi, reviennent aux époux X.

En outre, il sera relevé que la revendication des bailleurs est fondée sur le droit de propriété, avec des effets autonomes par rapport au contrat de location, que les preneurs peuvent d’autant moins alléguer pour se disculper qu’ils en ont bravé les interdictions et que, du fait de l’autonomie de la prétention, les bailleurs n’ont à justifier ni d’une faute, ni d’un préjudice, ni même d’un lien de causalité.

Les locataires ne pouvaient donc valablement payer au bailleur leur loyer avec d’autres fruits civils produits par la sous-location de la propriété immobilière, car les fruits reviennent tous au propriétaire "par accession", celle de l’art. 547 du Code civil s’étendant à tout ce que produit une chose ou s’y unit, soit naturellement soit artificiellement.

Enfin, le principe de l’effet relatif des contrats et les relations contractuelles existant entre locataire principal et sous-locataire ne sauraient faire obstacle à la restitution des fruits civil, dès lors que cette restitution n’a pas pour effet de créer de relation contractuelle entre bailleurs et sous-locataire et que les bailleurs ne réclament pas à leur profit l’exécution des engagements contractés par le sous-locataire, mais la restitution des fruits de la chose frugifère qui leur reviennent aux termes de la loi.

Par suite, la demande en restitution des époux X sera accueillie.

Référence: 

- Cour d'appel de Paris, Pôle 4 - chambre 3, 13 septembre 2019, RG n° 17/04038