La SA Mona Lisa proposait à ses clients, désireux d’investir dans l’immobilier aux fins notamment de se constituer un complément retraite, d’investir dans des résidences hôtelières en optant pour le statut de loueur en meublé professionnel.
Elle remettait à ses clients un livre blanc présentant son activité et celles de ses filiales, les avantages des investissements proposés, des simulations garantissant notamment que la défiscalisation promise serait appliquée, que les loyers seraient réglés et un rachat du bien au bout de quinze années à un prix plancher.
En 2001, MM. W U-V et O E ont été démarchés par un représentant de la SA Mona Lisa qui leur a remis le livre blanc, un dossier de réservation et diverses études et simulation concernant un hôtel à Fuveau, à la suire de quoi ils ont acheté.
Les sociétés du groupe Mona Lisa ont été successivement placées en redressement judiciaire puis en liquidation judiciaire
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Les appelants - les acquéreurs - soutiennent que le notaire, qui avait nécessairement connaissance de la motivation fiscale des acquéreurs, devait avoir conscience que le montant des loyers promis, éléments essentiels à la réalisation du but poursuivi, était surévalué par rapport à la valeur réelle du bien. Ils soutiennent également que le notaire aurait dû attirer leur attention sur le fait que la garantie de loyer reposait uniquement sur la holding du groupe Mona Lisa.
Le notaire doit, avant de dresser les actes, procéder à la vérification des faits et conditions nécessaires pour assurer l’utilité et l’efficacité de ses actes et, s’il n’est pas tenu d’une obligation de conseil ou de mise en garde quant à l’opportunité économique d’une opération en l’absence d’éléments d’information qu’il n’a pas à rechercher, il est néanmoins tenu d’une telle obligation s’il a connaissance de la finalité de l’engagement des parties.
Maître Y, notaire habituel de la SA Mona Lisa Investissement, désigné comme notaire instrumentaire dans les promesses unilatérales de vente, était donc nécessairement informé de la finalité de l’opération de défiscalisation à laquelle il prêtait son concours.
Il a d’ailleurs, à ce titre, par lettre du 18 décembre 2002 (pièce 27 des appelants), préalablement à l’acte concernant la seconde opération Val’Hôtel, rappelé les dispositions fiscales applicables à l’opération de LMP et ces derniers ne contestent pas le caractère pertinent de l’information qui leur a alors été donnée.
En tout état de cause, en l’absence de toute démonstration de ce qu’il bénéficiait d’informations qu’il n’aurait pas délivrées aux acquéreurs et cautions, il n’avait pas à rechercher la rentabilité du projet d’acquisition au regard du marché local, les appelants ne démontrant même pas que les loyers envisagés dans le projet qui leur a été présenté étaient surévalués.
En effet, les difficultés du groupe Mona Lisa ne sont apparues qu’en 2006, voire 2008, les loyers étant réglés jusqu’à cette date et les appelants ne justifient par aucune pièce de l’absence de viabilité du projet tel que présenté par la SA Mona Lisa Investissement, étant rappelé qu’aucune poursuite n’a jamais été engagée à son encontre ou à l’encontre des sociétés du groupe au titre d’une quelconque fraude.
Ils ne produisent aucune pièce montrant une quelconque inadéquation du loyer fixé et prévu en 2001 et 2002 au regard du marché à cette période, leur pièce 61 ne montrant une inadéquation des loyers au regard du marché qu’à compter de 2008.
La supériorité du prix de vente par lots au prix d’acquisition de l’immeubleentier par le vendeur, tel qu’il figure clairement dans les actes authentiques et le projet d’acte communiqué aux appelants, ne signifie pas que les prix des loyers promis dans un bail commercial distinct, que le notaire n’a pas établi, étaient surévalués et celui-ci n’avait pas à en rechercher l’opportunité économique dans le cadre de l’acte de vente qu’il était chargé d’authentifier.
Enfin, le notaire chargé d’authentifier une vente, même dans le cadre d’une opération de défiscalisation dont il a connaissance, n’a pas à avertir les acquéreurs du risque attaché à une garantie de paiement de loyers concernant un bail commercial qu’il n’était pas chargé de régulariser, une telle garantie ne relevant d’aucune obligation légale.
- Cour d'appel d'Aix-en-Provence, Chambre 3-3, 24 octobre 2019, RG n° 18/01873