M. G E J est décédé le […] à Carpentras laissant pour lui succéder ses deux filles, Mme D E épouse Y et Mme F E épouse X.
Par acte du 22 mai 2012, Mme D Y a assigné Mme F X devant le Tribunal de grande instance de Carpentras afin que soient ordonnées les opérations de partage de la succession de M. G E J ainsi qu'une expertise judiciaire aux fins d'estimation d'un immeuble et de fixation d'une indemnité d'occupation. L'expertise a été réalisée.
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Quoique l'art. 826 alinéa 1er du Code civil pose le principe d'une égalité du partage en valeur, le partage des biens en nature reste la règle et leur licitation ne doit être envisagée, conformément aux art. 1377 du Code de procédure civile et 1686 du mêmec ode, que s'ils ne peuvent être facilement partagés ou attribués et à la condition encore que les autres biens permettent de composer des lots égaux en valeur.
Mais, en tout état de cause, à défaut d'accord entre les parties, il n'y a pas lieu à attribution directe des lots en nature éventuellement composés, mais à tirage au sort de ceux-ci.
En l'espèce, la succession de G E est pour l'essentiel composée activement d'un immeuble situé sur la commune de Le Beaucet (Vaucluse), […], réunissant deux parcelles cadastrées section A n° 783 et 838, d'une contenance totale de 4 258 m², supportant une villa, une piscine et des annexes.
Le terrain peut aisément être découpé, ainsi que le montrent les cinq projets élaborés par la Selarl Cabinet Argence, géomètre-expert, en deux parcelles de surface équivalente d'environ 2 000 m², l'une conservant la maison et la piscine, l'autre essentiellement boisée et à l'état de jardin avec les constructions annexes, et une troisième, à vocation indivise assurant l'entrée des deux premières. Les règles administratives autorisent sa division en deux zones également constructibles, ainsi qu'il ressort du certificat d'urbanisme du maire de la commune, car il est situé en zone UD du plan d'occupation des sols qui permet la construction pour l'habitat individuel à partir de 1 000 m² avec un coefficient d'occupation des sols de 3,5.
En revanche, il existerait, en cette hypothèse, d'importantes mesures à prendre, contraignantes sans être insurmontables, et coûteuses. Même si la création de nouvelles servitudes ou la modification d'assiette des servitudes déjà existantes au profit du fonds, relatives au passage à la voirie, n'apparaît pas nécessaire, il y aura lieu d'aménager une aire de retournement, de réaliser les travaux de viabilisation de la parcelle non bâtie et, à défaut de raccordement aux réseaux d'eaux usées, de prévoir un système d'épuration individuel pour chaque parcelle. L'expert en a évalué le coût minimum à 18 000 € hors taxes, auquel il convient d'ajouter les frais d'aménagement de deux nouvelles entrées, avec portail, et de clôture des deux parcelles. De plus, la parcelle actuellement bâtie serait privée du puits et de ses annexes, peu utiles voire gênantes pour la parcelle vierge de construction. La levée de toutes les difficultés prévisibles serait en outre source d'un allongement considérable du délai requis pour l'achèvement du partage.
L'intérêt économique de l'opération est quant à lui discutable puisque l'expert judiciaire a estimé la valeur de l'immeuble, en son état actuel à 517.000 € et que M. H I, sollicité unilatéralement par Mme F X, n'a valorisé l'ensemble des deux parcelles issues de la division qu'à 542.000 €, sans tenir compte des inconvénients nouveaux issus du partage (voisinage, vues respectives, zone d'entrée et d'accès communes, forage attribué à la seule parcelle non bâtie ...), les avis étant l'un et l'autre donnés pour l'année 2014.
La division générerait par ailleurs des biens de valeurs très inégales, selon l'étude même de M. H I qui les fixe à 367.000 € pour la parcelle bâtie et 175.000 € pour la parcelle non bâtie, et il n'est pas indiqué si les comptes et valeurs visés dans la déclaration de succession, qui pourraient permettre de compenser cette inégalité dans la composition des lots, sont toujours disponibles dans la mesure où ils ne sont pas repris dans le procès-verbal de difficultés dressé le 6 mai 2015 par Maître P-Q B.
Mais encore, Mme F X demande expressément et sans autre option que lui soit attribuée la parcelle correspondant au terrain à bâtir et que le projet de partage soit établi par le notaire en tenant compte de cette attribution, alors que les lots doivent préalablement être constitués et que seul un tirage au sort peut décider de leur attribution, ce que ne propose pas l'appelante.
En conséquence, compte tenu que l'immeuble n'est pas commodément divisible et partageable, que la possibilité de constituer des lots sans disproportion de valeur excessive n'est pas établie, et de la revendication de Mme F X qui lie la division du terrain à l'impossible attribution directe à son profit d'une parcelle déterminée issue de l'éventuelle division de l'immeuble indivis, et sans qu'il y ait lieu de recourir à une expertise que les pièces produites par les parties rendent inutile, les premiers juges doivent être approuvés en ce qu'ils ont rejeté la demande de cette dernière et ordonné la licitation de l'immeuble.
Compte tenu du délai de l'instance d'appel, cette vente sur adjudication pourra intervenir immédiatement, sauf accord contraire des parties toujours possible, le jugement déféré étant réformé dans cette mesure.
- Cour d'appel de Nîmes, 1re chambre, 28 novembre 2019, RG n° 17/02616