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Le 27 janvier 2020

 

Au soutien de son appel, Mme Z, l'acheteuse du chien, fait valoir que principalement  la vente d’un chien donne lieu à un régime de garanties prévu par le Code rural, rappelant qu’en matière de ventes et de garanties des animaux domestiques, l’application de l’art. L 213-1 dudit code est impérative, dès lors que cet article prévoit notamment que l’action en garantie dans les ventes d’animaux domestiques est régie, à défaut de conventions contraires, par les dispositions dudit code

A cet égard, le Code rural a fixé une liste de vices rédhibitoires que l’acheteur peut avancer dans un certain délai afin d’engager une action en justice.  Par ailleurs, l’art. L 213-1 du Code rural relatif aux vices rédhibitoires dans les transactions portant sur des animaux domestiques dispose que “l’action en garantie dans la vente d’animaux domestiques est régie, à défaut de dispositions contraires, par les dispositions de la présente section, sans préjudice de l’application des articles L 211-4 à L 211-15, L 211-17 et L 211-18 du code de la consommation”.

Il s’ensuit que les acquéreurs d’animaux domestiques peuvent faire jouer la garantie du vendeur au titre de la conformité du bien lorsque les dispositions du code rural ne peuvent s’appliquer.

E n l’espèce, un sévère trouble du comportement et de socialisation présent chez l’animal litigieux ne figure parmi ceux qui sont réputés comme des vices rédhibitoires au sens des dispositions de l’art. L 213-1 du Code rural de sorte que ce défaut de comportement rendant l’animal impropre à toute vie normale au sein du foyer d’accueil est de nature à engager la responsabilité légale du vendeur au titre d’un défaut de conformité régi par le code de la consommation.

De surcroît, la Cour de cassation, dans un arrêt du 10 février 2014, a posé le principe, sur le fondement des dispositions de l’art. L 211-1 à L 211- 7 du Code de la consommation, selon lequel les dispositions qui régissent la garantie légale de conformité sont applicables aux ventes d’animaux conclues entre un vendeur agissant au titre de son activité professionnelle ou commerciale et un acheteur agissant en qualité de consommateur.

Iil résulte de ces textes que l’animal vendu doit correspondre à la description donnée par le vendeur et posséder toutes les qualités de vie normale et de comportement au domicile de l’acquéreur, qualités que ce dernier est légitimement en droit d’attendre à la suite de son achat,   tel n’est évidemment pas le cas en l’espèce, dès lors que le bien de race Chihuahua “Lictchi” a eu, dès son arrivée, chez Mme Z de graves troubles de comportement l’amenant à fuir, à se cacher et à trembler.

Subsidiairement,   elleaffirme avoir été victime d’un dol de la part de Mme X et de son compagnon, l’obligation de renseignement imposant au vendeur de renseigner l’acheteur ce sur quoi il s’oblige et surtout sur les conséquences légales de tout document proposé à sa signature, en effet, en l’espèce, l’éleveuse et son compagnon ne lui ont jamais précisé que l’acte d’abandon qui lui a été soumis pouvait être considéré comme un acte définitif de cession de propriété ;  aucune pièce du dossier ne permet d’établir que Mme X l’a dûment avertie des conséquences de son acte et que l’acheteuse savait au moment de la signature qu’elle abandonnait définitivement et gratuitement un animal qu’elle venait tout juste d’acheter quelques jours plus tôt moyennant la somme de 1 600 EUR TTC.

Mme X réplique que, par contrat en date du 27 novembre 2015, le chien a été cédé à l’appelante pour la somme de 1 600 EUR. La vente était parfaite, la propriété du chien ayant été transférée à l’appelante qui s’est acquittée du prix.

Faisant état de difficultés rencontrées à éduquer le chien, Mme Z a souhaité le restituer, alors qu’aucune obligation légale n’incombait à la venderesse de le reprendre ;  si elle a accepté de le reprendre, c’est pour le seul bien être du chien qui ne semblait pas pouvoir s’adapter dans son foyer d’accueil, relevant que de telles demandes de restitution émanant des acquéreurs ne sont pas rares en matière de vente de chiens de race, les acquéreurs étant parfois dépassés par l’éducation d’un chien. C'est la raison pour laquelle les éleveurs acceptent généralement de reprendre l’animal à la condition que ce soit à titre gratuit.

 En l’espèce, la cession du chien par Mme Z à Mme X l’a été à titre gratuit ainsi qu’il ressort des termes clairs et dénués d’ambiguïté de l’acte de cession qui fait la loi des parties au sens des dispositions de l’art. 1134 du code civil. L’appelante n’est pas fondée à invoquer le dol qui ne se présume pas et doit être prouvé, alors qu’elle ne rapporte pas le moindre commencement de preuve pour l’établir. E n outre, les écrits antérieures à la restitution du chien ne font nullement état d’une restitution temporaire. Eelle est fondée à poursuivre la confirmation du jugement déféré en ce qu’il a débouté Mme Z de sa demande de restitution du prix.

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Sur ce,

En l’espèce, Mme Z appuie l’ensemble de son argumentation sur le fait que le chien qu’elle a acquis de Mme X présentait un grave trouble du comportement lui permettant de prétendre à la résolution du contrat de vente conclu avec l’éleveuse.

Outre le fait constant que Mme X a vendu à Mme Z un chien conforme à ses attentes, à savoir un chien de race Chihuahua prénommé Y né le […], régulièrement immatriculé à I-CAD moyennant le prix de 1 600 EUR et que l’éleveuse ne peut être rendue responsable du comportement du chien qui s’est prétendument révélé infernal et donc ingérable au sein de son foyer d’accueil, le problème juridique qui se pose préalablement ici est celui de savoir si, compte tenu de la signature par Mme Z d’un acte de cession, la restitution de ce chien par l’acquéreur à l’éleveuse l’a été à titre temporaire ou non.

Mme Z a rédigé de manière manuscrite le document de cession dont les termes sont dénués d’ambiguïté puisqu’elle y mentionne : “je soussignée, Mme Z E atteste céder à ce jour le chien Y […] à Mme X F cause problème de comportement/ trouble de développement, pour pleine propriété”.

Non seulement, les parties en présence sont clairement identifiées et l’objet du contrat de cession est bien le chien “Y”, mais également et surtout la nature du contrat ne laisse planer aucun doute : “céder”   –  “en pleine propriété”.

Il n’y est nullement question d’abandon temporaire, ni de prix de cession, de sorte qu’il s’agit bien d’une cession à titre gratuit.

Et pour s’en convaincre, s’il en est besoin, il y a lieu de se référer aux multiples sms échangés entre les parties après que Mme Z ait acquis le chien “Y”.

C’est ainsi que l’appelante a écrit le 1er décembre à 1 H 37 à l’éleveuse en ces termes : “Bonsoir Madame, sa devient impossible, il est 1 H34, il n’est pas consolable, il pleur à en perdre le souffle, hier, il a rien mangé, je vous demanderai si possible de me rappeler demain dès que possible je pense qu’il faut que je vous ramène Y, c’est une souffrance pour moi de le voir dans cet état”.

Mme X lui a répondu “Avez vous bien réfléchi à votre démarche? Dans la semaine qui a suivi son adoption je vous ai proposé son frère qui était plus calme, vous n’avez pas donné suite. Aujourd’hui, compte tenu du délai, je ne peux plus rien vous proposer si ce n’est effectivement de le récupérer à la maison et le re-socialiser, lui qui était si dynamique, n’y aurait-il pas un événement qui aurait provoqué cette réaction? Je suis disponible à partir de vendredi après-midi. Si vous souhaitez le ramener, rassemblez tous ses papiers et préparez une attestation d’abandon à mon intention datée et signée en référençant Y avec son numéro d’Identification. Tenez moi informée”.

L’appelante a encore adressé un sms à Mme X le 2 décembre à 3 H43 : “G F, je vous tiens au courant pour Lictchi, égal à lui-même, j’ai passé ma 5e nuit blanche; il pleure dès qu’il est seul, cette nuit il a pleuré même voir des crises sans répit. E”.

Mme Z a adressé un nouveau sms à Mme X le 3 février à 12 heures : “G F, je reviens vers vous, vous deviez me rappeler hier au sujet de Y, vous m’avez dit que vous allez le reprendre car pour moi, c’est une souffrance énorme de le voir dans cet état. Je ne peux même plus mettre ma hotte dans la cuisine car Y tremble et s’enfuit et comme je vous ai signalé, il s’enfuit au moindre bruit (télévision et le reste, son trouble de comportement est trop important. Je vous redonne mon n° de téléphone (…..)”.

Par sms du 6 février, Mme X demande à Mme Z la carte d’identification I-CAD de Y qu’elle n’a pas trouvée dans les papiers remis et précise : il est important de me la faire parvenir rapidement, en tant que professionnelle, c’est un document que je dois absolument détenir dès lors que je détiens le chien. Y va très bien et mange bien”.

Mme Z n’est pas fondée à se prévaloir du dol au moment de la signature de l’acte de cession.

Aux termes de l’art. 1116 du Code civil, dans sa rédaction antérieure au 1er octobre 2016, applicable en l’espèce, “le dol est une cause de nullité de la convention lorsque les manoeuvres pratiquées par l’une des parties sont telles qu’il est évident que, sans ces manoeuvres, l’autre partie n’aurait pas contracté. Le dol doit être prouvé et ne se présume pas”.

Or, force est de constater que Mme Z se borne à procéder par voie de simples affirmations sans les étayer par le moindre commencement de preuve de nature à les corroborer.

En conséquence, le jugement est confirmé en ce qu’il a débouté Mme Z de sa demande en remboursement de la somme de 1 600 EUR au titre de la valeur d’acquisition du chien de race chihuahua “Y”.

Référence: 

- Cour d'appel de Versailles, 10 septembre 2019, RG n° 17/06899​