Inscription à notre newsletter

Recevez toutes les informations importantes directement dans votre boite mail. Cliquez ici

Partager cette actualité
Le 09 novembre 2020

 

Aux termes de l'article L. 600-1-2 du Code de l'urbanisme : " Une personne autre que l'Etat, les collectivités territoriales ou leurs groupements ou une association n'est recevable à former un recours pour excès de pouvoir contre une décision relative à l'occupation ou à l'utilisation du sol régie par le présent code que si la construction, l'aménagement ou le projet autorisé sont de nature à affecter directement les conditions d'occupation, d'utilisation ou de jouissance du bien qu'elle détient () ". 

Il résulte de ces dispositions qu'il appartient à tout requérant qui saisit le juge administratif d'un recours pour excès de pouvoir tendant à l'annulation d'un permis de construire, de préciser l'atteinte qu'il invoque pour justifier d'un intérêt lui donnant qualité pour agir, en faisant état de tous éléments suffisamment précis et étayés de nature à établir que cette atteinte est susceptible d'affecter directement les conditions d'occupation, d'utilisation ou de jouissance de son bien. Lorsque le requérant, sans avoir contesté le permis initial, forme un recours contre un permis de construire modificatif, son intérêt pour agir doit être apprécié au regard de la portée des modifications apportées par le permis modificatif au projet de construction initialement autorisé. Il appartient dans tous les cas au défendeur, s'il entend contester l'intérêt à agir du requérant, d'apporter tous éléments de nature à établir que les atteintes alléguées sont dépourvues de réalité. Le juge de l'excès de pouvoir apprécie la recevabilité de la requête au vu des éléments ainsi versés au dossier par les parties, en écartant le cas échéant les allégations qu'il jugerait insuffisamment étayées mais sans pour autant exiger de l'auteur du recours qu'il apporte la preuve du caractère certain des atteintes qu'il invoque au soutien de la recevabilité de celui-ci. 

Un permis de construire six éoliennes et un poste de livraison sur le territoire de la commune de Tourny a été délivré à la SAS Ferme éolienne de Tourny le 30 juillet 2013. Ce permis n'a pas été contesté et est devenu définitif. Par le permis de construire modificatif du 9 février 2016 contesté dans la présente instance, la SAS Ferme éoliennede Tourny a été autorisée à changer le modèle de trois de ces éoliennes.

- En premier lieu, si l'arrêté attaqué a autorisé l'augmentation de la taille du rotor de 71 à 82 mètres, il a en même temps réduit la hauteur du mât de sorte que, d'une part, le centre du rotor passe d'une hauteur au sol de 64,50 mètres à 59 mètres et, d'autre part, la hauteur en bout de pale passe de 99,50 mètres à 99,91 mètres, augmentant ainsi de 41 centimètres seulement. 

- En deuxième lieu, il ressort des pièces du dossier que la propriété de la SCI du château de Tourny est située à environ 1,5 kilomètre des éoliennes. Compte tenu d'une telle distance, eu égard à l'objet limité des modifications en cause et même si les éoliennes sont visibles, dans un paysage agricole plat et offrant une vue dégagée, depuis le premier étage du château appartenant à la SCI, l'existence d'un impact visuel des modifications tel qu'il affecte directement les conditions d'occupation, d'utilisation ou de jouissance de la propriété de la SCI ne ressort ni de la photosimulation jointe à la demande de permis de construire modificatif, ni de l'étude réalisée à la demande de la SCI, qui n'a pas repéré sur la carte les lieux des prises de vue, les a grossies par rapport à la perception sur le terrain et n'a pas comparé les situations avant et après les modifications, ni de l'étude ensuite diligentée par la pétitionnaire, ni d'aucune autre pièce du dossier.

- Enfin, si l'augmentation de la taille du rotor des trois éoliennes est susceptible de majorer les nuisances sonores générées par leur exploitation, cet effet sera limité par l'abaissement du centre du rotor, la requérante n'ayant fourni aucune précision ni justification sur les nuisances sonores générées par le fonctionnement des éoliennesdans leur configuration actuelle et, eu égard à la distance séparant ces ouvrages de la propriété de la SCI, une majoration de ces nuisances telle qu'elle affecte directement les conditions d'occupation, d'utilisation ou de jouissance de cette propriété ne ressort pas des pièces du dossier. 

Il résulte de ce qui précède que l'exception tirée de l'absence d'intérêt à agir de la SCI du château de Tourny doit être accueillie et que la requérante n'est donc pas fondée à se plaindre de ce que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Rouen a rejeté sa demande.

Référence: 

- Cour administrative d'appel de Douai, 1re chambre, 3 novembre 2020, RG n° 19DA00719