Par acte du 24 juillet 2009, dressé par M. D., notaire, la société D. a vendu aux sociétés Sogebail et Cicobail un bien immobilier comportant des surfaces commerciales et des emplacements de stationnement dont l’accès n’était rendu possible que par un passage sur la propriété voisine appartenant à la société civile immobilière Méditerranée (la SCI Méditerranée), sur laquelle était exploité un magasin à l’enseigne Intermarché.
Le même jour, par acte dressé par M. B., notaire, substituant M. S., les sociétés Sogebail et Cicobail ont conclu avec la société civile immobilière Fréjus FL (la SCI Fréjus FL) un contrat de crédit-bail portant sur ce bien immobilier.
En 2012, la SCI Fréjus FL a divisé le bâtiment en trois surfaces commerciales et donné à bail la partie haute à un commerce concurrent de l’enseigne Intermarché.
La société exploitant le magasin Intermarché a clôturé sa propriété, empêchant ainsi l’accès aux emplacements de stationnement par les clients et fournisseurs des enseignes exploitées sur le fonds de la SCI Fréjus FL.
Se plaignant de l’impossibilité d’exploiter ses locaux et ayant cessé de payer les loyers du crédit-bail, ce qui avait entraîné la résiliation du contrat, la SCI Fréjus FL a assigné en indemnisation la société D. sur le fondement de la réticence dolosive et MM. D., S. et B. (les notaires) pour manquement à leur obligation de conseil.
Il ne peut être reproché au vendeur une réticence dolosive et un manquement à l’obligation pré-contractuelle d'information au motif qu’il a vendu un ensemble immobilier, comprenant 100 places de stationnement dont 73 au niveau inférieur du bâtiment, qui n’étaient accessibles, depuis la voie publique, qu’en traversant le fonds voisin, appartenant au tiers voisin dès lors que la situation était d'autant plus claire, au jour de l'acte de vente, que celui-ci stipulait qu'aucune servitude n'existait, de sorte que l'acquéreur et le crédit-preneur, qui étaient conscients que les voies de circulation et les emplacements de stationnement, tels que mentionnés aux actes, n'existaient que par suite d'une simple tolérance et se voyaient à nouveau avertis au jour de l'acte qu'il n'existait pas de servitude de nature à leur conférer un droit, ne sauraient prétendre que leur vendeur devait leur délivrer de plus amples informations.
La cour d’appel a retenu que l'acquéreur et le crédit preneur, qui étaient conscients que les voies de circulation et les emplacements de stationnement, tels qu’ils étaient mentionnés aux actes, n'existaient que par suite d'une simple tolérance et qui avaient été à nouveau avertis le jour de l'acte qu'il n'existait pas de servitude de nature à leur conférer un droit, ne sauraient prétendre que les notaires devaient leur délivrer de plus amples informations au titre de leur devoir de conseil, sauf à se voir redire qu'il n’existait pas de servitude de passage, ni de titre pour une occupation partagée des voies et du parking situés sur le terrain de la parcelle voisine. Elle a pu déduire de ces seuls motifs qu’aucune faute ne pouvait être imputée aux notaires et a ainsi légalement justifié sa décision de ce chef.
- Cour de cassation, 3e chambre civile, 18 mars 2021, pourvoi n° 19-24.638