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Le 05 juin 2022

 

Suivant acte reçu le 20 novembre 2003 par M. [D] (le notaire), M. [U] et Mme [M] ont acquis un ensemble immobilier, en indivision pour la nue-propriété, à concurrence respectivement de 38 % et 62 %, et en tontine pour l'usufruit.

M. [U], artisan, a financé l'acquisition de sa part au moyen d'un prêt consenti par la société Banque populaire Loire et Lyonnais, aux droits de laquelle vient la société Banque populaire Auvergne Rhône Alpes (la banque), et garanti par un privilège de prêteur de deniers. Ce privilège a été inscrit par le notaire sur la seule quote-part de M. [U], placé en liquidation judiciaire par jugement du 2 mars 2010.

Après avoir déclaré sa créance, la banque a assigné, d'une part, M. [U] et Mme [M] en partage de l'indivision existant sur l'immeuble, d'autre part, le notaire en responsabilité et indemnisation.

L'action en partage de l'indivision, engagée postérieurement au prononcé de la liquidation judiciaire, a été déclarée irrecevable par une décision devenue irrévocable.

Il résulte des articles 1382, devenu 1240, et 815-17 du code civil, que dans l'hypothèse où un prêt est souscrit par l'un seulement des acquéreurs d'un bien immobilier, pour financer sa part, l'assiette du privilège de prêteur de deniers est constituée par la totalité de l'immeuble et le prêteur, titulaire d'une sûreté légale née antérieurement à l'indivision, peut se prévaloir des dispositions de l'article 815-17, alinéa 1er, du code civil, mais que, si la sûreté a été inscrite, non pas sur l'immeuble, mais sur la quote-part appartenant à l'indivisaire, le créancier n'a la qualité, à l'égard des tiers, que de créancier personnel de l'indivisaire sans droit de poursuite directe sur le bien indivis, de sorte qu'il ne dispose que de la faculté de provoquer le partage au nom de son débiteur ou d'intervenir dans le partage provoqué par lui. En l'espèce, suivant acte notarié, deux personnes ont acquis un ensemble immobilier, en indivision pour la nue-propriété.

L'un des acquéreurs, artisan, a financé l'acquisition de sa part au moyen d'un prêt bancaire garanti par un privilège de prêteur de deniers. Ce privilège a été inscrit par le notaire sur la seule quote-part de l'emprunteur, placé en liquidation judiciaire.

Après avoir déclaré sa créance, la banque a assigné, d'une part, les acquéreurs en partage de l'indivision existant sur l'immeuble, d'autre part, le notaire en responsabilité et indemnisation.

Pour rejeter la demande d'indemnisation formée par la banque à l'encontre du notaire, après avoir relevé que le notaire avait commis une faute en inscrivant le privilège de prêteur de deniers sur la seule part en nue-propriété du coïndivisaire emprunteur, de sorte que la banque avait à l'égard des tiers, la qualité de créancier personnel du coïndivisaire emprunteur, ce qui l'empêchait de poursuivre son droit sur l'immeuble indivis, l'arrêt d'appel retient que la banque peut poursuivre la vente forcée de l'immeuble sans engager une procédure préalable de partage et qu'elle ne démontre pas l'existence d'un lien de causalité certain et direct entre la faute imputée au notaire et le préjudice allégué tiré de l'impossibilité de recouvrer sa créance par la vente de l'immeuble grevé du privilège de prêteur.

En statuant ainsi, alors qu'il résultait de ses constatations qu'à la suite de cette faute, la banque, ayant à l'égard des tiers la qualité de créancier personnel du coïndivisaire emprunteur, ne pouvait exercer son droit de poursuite sur les biens indivis et ne disposait que de la seule faculté de provoquer le partage, qu'elle avait perdue en raison de la liquidation judiciaire de l'emprunteur, la cour d'appel a violé les textes précités.

Référence: 

- Cour de cassation, 1re chambre civile, 2 Février 2022, pourvoi n° 20-11.793