Par acte SSP du 26 juin 2008, Daniel a donné à bail à Gil un "appartement T2 d'une surface d'environ 45 m2, pièce principale avec coin salon et coin cuisine avec éléments haut et bas, une chambre, une salle d'eau. Chauffage électrique" moyennant un loyer mensuel de 500 EUR avec prise d'effet au 1er juillet 2008.
Par jugement du 20 février 2013, le bailleur a été déclaré coupable par le tribunal correctionnel de Toulouse d'avoir notamment, entre septembre 2007 et avril 2008, transformé un garage en appartements sans avoir obtenu préalablement de permis de construire et d'avoir effectué ces travaux en violation du plan d'occupation des sols (POS). Il a en particulier été condamné à remettre les lieux - dont les locaux objets du bail du 26 juin 2008 - en conformité avec leur destination initiale dans un délai de dix huit mois et ce sous astreinte de 50 euros par jour de retard.
Par lettre recommandée avec accusé de réception du 12 décembre 2013, la société OFFICE MURETAIN IMMOBILIER, se prévalant de cette décision, a enjoint à Gil de libérer les lieux au 1er août 2014.
Par actes d'huissier du 22 décembre 2016, Daniel a fait assigner Gil devant le tribunal d'instance de Muret en résiliation du bail, en expulsion et en fixation d'une indemnité d'occupation.
La condamnation pénale exclut d'une part, que ces lieux puissent continuer à être mis à disposition d'un tiers dans le cadre d'un contrat de bail et impose, d'autre part, au bailleur la réalisation de travaux de remis en état. Dès lors, le respect des dispositions pénales de la décision du tribunal correctionnel, qui s'imposent à chacun, constitue un motif légitime et sérieux de rupture du bail par le bailleur lui-même.
Mais le motif légitime et sérieux de rupture du bail d'habitation ne dispense pas le propriétaire bailleur du respect des formalités prévues à l'art. 15 de la loi n° 89-462 du 6 juillet 1989. Dans cette affaire, le congé a été délivré par lettre recommandée avec AR ; le bailleur a mentionné le motif du congé et a respecté le délai de préavis contractuel dans la mesure où le congé a été notifié plus de six mois avant le terme du contrat. L'indication d'une date de libération des lieux postérieure n'a aucune incidence sur la validité du congé, l'erreur invoquée n'ayant pas eu pour effet de réduire mais d'allonger la période durant laquelle le locataire a pu préparer son relogement. Par ailleurs, la volonté du bailleur de renoncer, de manière non équivoque, à se prévaloir du congé donné au locataire n'est pas caractérisée. L'expulsion du locataire et de tout occupant de son chef est ordonnée. Le locataire est condamné au paiement d'une indemnité d'occupation égale au loyer mensuel perçu au titre du bail jusqu'à libération effective des lieux.
Le bailleur a donné à bail des locaux d'habitation réalisés quelques mois plus tôt sans avoir obtenu de permis de construire et en violation du plan d'occupation des sols. Il a, ce faisant, sciemment exposé son preneur au risque finalement réalisé d'une résiliation pour remise en état des lieux à l'initiative du bailleur. Ce comportement constitue un manquement au devoir général de bonne foi auquel sont tenus les co-contractants. Ainsi, le risque s'étant réalisé, il engage la responsabilité du bailleur au titre des conséquences dommageables qui en ont directement résulté pour le locataire. En effet, il n'est pas allégué, d'une part, que ce dernier aurait manqué, au cours du bail, à ses propres obligations contractuelles, d'autre part, que le bailleur pouvait se prévaloir d'un autre motif de résiliation du bail à échéance.
Le préjudice matériel du locataire, lié à la nécessité de procéder au déménagement de ses biens et d'exposer des frais de relogement, est réparé, compte tenu de la superficie du logement (Type 2 de 45 m2), à hauteur de 1 000 EUR. Le préjudice moral du locataire, consistant dans le désagrément d'être contraint de quitter le logement qu'il occupe depuis cinq ans et d'engager des démarches de relogement, est évalué, compte tenu de la durée d'occupation des lieux, à 1 500 EUR.
- Cour d'appel de Toulouse, 1re ch., 1re sect., 23 janvier 2017, RG n° 15/04260