Par acte notarié du 9 septembre 1999, M. Gilles et Mme Andrée D. ont vendu à M. Adolphe et Mme Floria D. plusieurs parcelles de terre.
Par acte notarié du 2 août 2007, M. Adolphe et Mme Floria D ont revendu les parcelles à M. Guy D.
Par actes des 1 mars et 21 avril 2016, soutenant que le prix de vente des parcelles n’avait pas été payé par M. Adolphe et Mme Floria D. lors de la vente de 1999, M. Gilles et Mme Andrée D les ont assignés, ainsi que M. Guy et Mme Vivianne D, en résolution de la vente du 9 septembre 1999 et de la vente subséquente du 2 août 2007 et enpaiement de diverses sommes.
Mmes Jacqueline et Martine D sont intervenues volontairement à l’instance.
M. Gilles D et Mmes Andrée, Jacqueline et Martine D ont fait grief à l'arrêt d'appel de rejeter leurs demandes, alors selon eux et en particulier que celui qui conteste l’existence d’un paiement, effectué hors la vue du notaire, dont il a donné quittance dans l’acte notarié de vente, doit rapporter la preuve qu’il n’a pas été réalisé ; qu’en l’espèce, ce fut le cas ; qu’en effet la cour d’appel a expressément relevé qu’il résultait de l’ensemble des pièces réunies par M. et Mme Gilles D, vendeurs, qui avaient donné quittance à M. et Mme Alphonse D, acheteurs, d’un paiement effectué hors la vue du notaire, que ces derniers avaient admis qu’ils ne l’avaient pas réalisé ; qu’en retenant, pour débouter M. et Mme Gilles D de leurs demandes, qu’ils ne rapportaient pas la preuve contraire de la quittance de la somme payée en dehors de lacomptabilité du notaire, la cour d’appel, qui n’a pas tiré les conséquences légales qui s’évinçaient de ses propres constatations, a violé l’article 315, devenu 1353, du Code civil.
Pour la Cour de cassation :
La cour d’appel a exactement retenu que, si la quittance d'une somme payée endehors de la comptabilité du notaire ne fait foi que jusqu'à preuve contraire, celle-ci ne peut être rapportée que dans les conditions prévues par les articles 1341 et suivants du Code civil, dans leur rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance du 10 février 2016, de sorte que la preuve testimoniale n'est pas recevable, hormis le cas où l'une des parties n'a pas la possibilité matérielle ou morale de se procurer une preuve littérale.
Elle a constaté que tel était le cas en l’espèce en raison des liens de parenté existant entre les parties à l’acte, mais qu’il convenait d'analyser l'ensemble des déclarations et attestations avec circonspection compte tenu des liens familiaux unissant les personnes parties à l'instance, ces liens affectifs et procéduraux étant propres à altérer leur objectivité.
Elle a relevé que, si les déclarations se rejoignaient sur le fait que le prix des parcelles n'aurait pas été acquitté par M. Adolphe et Mme Floria D au moment de la conclusion de la vente en 1999, elles ne contredisaient pas pour autant la quittance que les vendeurs avaient délivrée aux acquéreurs, les déclarations faites par M. Adolphe et Mme Floria D laissant entendre qu'ils auraient acquis les parcelles en 1975 pour leur fils Gilles, raison pour laquelle ils n'en auraient pas payé le prix lorsque celui-ci les leur avaient cédées en 1999, M. Gilles et Mme Andrée D. ne fournissant aucune explication sur cet élément alors qu'ils remettaient en cause la validité d'un acte conclu dix-sept ans auparavant et sans avoir formulé entre-temps la moindre réclamation.
Elle a souverainement retenu que la preuve contraire de la quittance de la somme payée en dehors de la comptabilité du notaire n'était pas rapportée par M. Gilles et Mme Andrée D.
- Cour de cassation, 3e chambre civile, 5 mars 2020, RG n° 19-12.994