Le testament olographe versé aux débats est ainsi libellé :
'Morée, 28 septembre 2002. Je soussignée madame C I demeurant à la maison de retraite de Morée déclare léguer à ma fille C J épouse X la quotité disponible de ma succession. Les raisons qui m’ont conduite à faire ce legs sont que ma fille prend soin de moi, par exemple lors des déplacements de ma vie privée. Fait et écrit de ma main. Morée Loir et Cher, le 28 septembre 2002' suivi de la signatureC I ;
Alors que le tribunal a rejeté la demande d’annulation de cet acte en évoquant quant à sa date la possibilité d’une surcharge d’un chiffre '5« par les deux '2 » finaux (reproduits ci-dessus en gras par la cour) mais en jugeant que le demandeur à l’action ne rapportait la preuve, par des attestations, que d’une dégradation de l’état de santé de sa mère nécessitant un placement en maison de retraite à compter de 2001, non point de son insanité d’esprit, monsieur C reprend ses deux moyens de nullité tenant au formalisme de cet acte et à la capacité de disposer.
Invoquant d’abord les dispositions de l’art. 970 du Code civil, il soutient que la date est un élément essentiel et intrinsèque du testament et que sa modification en affecte la validité ; qu’à cet égard, les éléments extrinsèques que lui oppose l’intimée (bordereau d’inscription au fichier des testaments, dépôt audit fichier, relevé de compte issu de la comptabilité du notaire) prouvent que le testament n’a pas été rédigé le 28 septembre 2012 et qu’en présence de cette incertitude, la cour doit retenir cette cause de nullité .
L’insanité d’esprit de madame Y qui constitue une autre cause de nullité, poursuit-il, est attestée par une grille d’évaluation médicale dite Aggir établie le 03 février 2004 au sein de l’établissement où elle a été admise de mai 2002 à décembre 2004, évoquant une atteinte à la maladie d’Alzheimer, ainsi que par les 26 témoignages qu’il produit ; que madame X, bénéficiaire de la libéralité à qui il appartient de combattre la présomption d’insanité d’esprit du disposant résultant de son état habituel en démontrant un exceptionnel intervalle de lucidité d’esprit au moment de la rédaction de ce testament, n’en fait pas la démonstration .
Attendu, ceci exposé et s’agissant du premier moyen de nullité, qu’il y a lieu de considérer qu’en regard du formalisme imposé par l’article 970 du code civil, ni l’écriture ni la signature de ce testament ne sont contestés, seule l’étant l’année de sa rédaction, voire son jour compte tenu de la mention de la date des dispositions testamentaires de madame Y figurant sur le bordereau de la demande d’inscription au fichier central des dispositions de dernièresvolontés (soit le 22 septembre 2002) dont est produite le photocopie, la tardive entrée en comptabilité de l’étude notariale des frais y afférents, en 2003, n’apportant quant à elle aucun éclairage sur ce point ;
Est toutefois admise la reconstitution de la date d’un testament au moyen d’éléments intrinsèques à l’acte et même extrinsèques 'dans la mesure où ils corroborent les éléments intrinsèques dans lesquels doit avoir son principe et sa racine la preuve de la date d’un testament olographe’ (Cass civ 24 juin 1952).
Dans le contexte de la présente espèce où il n’est fait état de la rédaction d’aucun autre testament et où le débat sur l’insanité d’esprit de la testatrice porte sur des périodes plutôt que sur des jours précis, il y a lieu de considérer qu’il a été écrit durant la période d’admission à l’Etablissement d’hébergement pour personnes âgées dépendantes (ou Ehpad) de Morée et que l’année 2002, raturée en son dernier chiffre, comme le sont d’ailleurs les mots 'retraite’ ou 'ma (vie)', peut être tenue pour pertinente, de même que le jour du 28 septembre mentionné par le notaire dans une lettre datée du 11 octobre 2017 accompagnant le récépissé de dépôt du testament.
Le moyen de nullité tiré d’un manquement au formalisme requis d’un testament olographe par le législateur ne peut prospére.
- Cour d'appel d'Orléans, Chambre civile, 18 mars 2019, RG n° 17/00764