Le 11 avril 2017, les parties ont signé une promesse synallagmatique de vente par laquelle la SCI du Val s'est engagée à vendre à la SCI Saint Thomas de Breteville (STB) sous réserve de l'accomplissement des conditions suspensives stipulées à l'acte, les lots de copropriété n°102 et 109 soit un local commercial de l'ensemble immobilier sis [...].
Cette promesse de vente, conclue sous réserve de la condition particulière de la purge du droit de préférence du locataire notifié par LRAR, stipulait un dépôt de garantie de 12.650 EUR dans les dix jours en la comptabilité du notaire rédacteur de l'acte sous peine de caducité et une pénalité de 25.300 EUR au cas où l'une des parties ne régulariserait pas l'acte alors que toutes les conditions sont remplies.
La réitération de l'acte devait avoir lieu au plus tard le 30 juin 2017 devant M. L., notaire à Lyon.
Par acte d'huissier du 11 mars 2019, la SCI du Val a fait assigner la SCI STB devant le tTibunal de grande instance de Paris aux fins d'obtenir notamment la libération du séquestre à son profit et la condamnation de la SCI STB à lui verser la somme de 25.300 EUR
Par jugement du 20 novembre 2019, le TGI de Paris a :
- rejeté la demande de révocation de l'ordonnance de clôture,
- rejeté les demandes de la SCI du Val,
- condamné la SCI du Val aux dépens.
La SCI du Val a interjeté appel de la décision.
Par ses dernières écritures, elle demande à la cour d'infirmer le jugement, de condamner la SCI STB à lui verser la somme de 25.300 EUR, d'ordonner la libération du séquestre à son profit et de condamner la SCI STB à lui verser la somme de 5 000 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile ainsi qu'aux dépens.
Par ses dernières écritures, la SCI STB demande à la cour de confirmer le jugement et y ajoutant :
- de déclarer le compromis caduc et non avenu,
- à titre subsidiaire, de requalifier l'indemnité d'immobilisation en clause pénale et éventuellement de la réduire à 500 euros,
- en tout état de cause de débouter la SCI du Val de toutes ses demandes et la condamner à lui payer la somme de 5 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux dépens.
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Au soutien de son appel, la SCI du Val fait valoir que la SCI STB a souhaité mettre un terme au compromis sans qu'aucun motif ne soit évoqué alors que les conditions suspensives étaient réalisées et que, dès lors que les notaires s'étaient mis d'accord de manière informelle suite à la volonté de la SCI STB de ne pas acquérir le bien, la procédure de sommation n'était pas nécessaire ; elle soutient que si la SCI STB avait été de bonne foi elle aurait signé une convention de résiliation du compromis et aurait réglé l'indemnité convenue à savoir le dépôt de garantie, ce qu'elle n'a pas fait en ne répondant pas à la mise en demeure de son conseil, qu'il s'agit d'une inexécution fautive et elle sollicite en conséquence des dommages et intérêts tels que prévus dans la promesse de vente.
La SCI STB soutient que la SCI du Val était d'accord pour signer une convention de résiliation à la date du 23 juin 2017 et fait valoir qu'elle ne justifie d'aucune sommation à son encontre d'avoir à régulariser la vente par acte authentique.
En l'espèce, la promesse de vente du 11 avril 2017 stipule que, dans le cas où l'une des parties ne régulariserait pas l'acte authentique et ne satisferait pas ainsi aux obligations alors exigibles, toutes les conditions suspensives relatives à l'exécution de l'acte étant remplies, elle devra verser à l'autre partie la somme de 25.300 EUR à titre de dommages et intérêts conformément aux dispositions de l'article 1231-5 du code civil.
Elle stipule en outre que l'acquéreur devra déposer une somme de 12.650 EUR en la comptabilité du notaire rédacteur de l'acte à titre de dépôt de garantie et qu'il ne pourra recouvrer ce dépôt de garantie que s'il justifie de la non-réalisation, hors sa responsabilité, de l'exercice de l'une ou l'autre des conditions suspensives ci-dessus énoncées ou de l'exercice d'un droit de préemption et que dans le cas contraire le dépôt de garantie restera acquis au vendeur par application et à due concurrence de la stipulation de la pénalité édictée précédemment dans l'acte sous déduction des frais et débours pouvant être dus au rédacteur de cet acte.
La SCI STB ne conteste pas avoir renoncé à l'acquisition du bien avant la date de réitération de l'acte et la SCI du Val produit au débat le courriel adressé le 23 juin 2017 par M. C., notaire, à M. L., notaire désigné pour la réitération de l'acte, par lequel il lui a adressé un projet de convention de résiliation, cette pièce jointe n'étant pas produite au débat.
La SCI du Val produit en outre le courriel adressé le 30 août 2017 par M. L. à M. C. lui indiquant que son client a pris note de ce souhait de ne pas donner suite au projet d'acquisition mais que, l'avant-contrat n'étant assorti d'aucune condition suspensive spécifique, son client entendait conserver le dépôt de garantie, courriel auquel la SCI STB ne démontre pas avoir répondu.
Il est constant que, bien que la promesse de vente soit assortie d'une purge du droit de préférence du locataire à titre de condition particulière, la SCI STB ne s'est pas prévalue d'un défaut de réalisation de cette condition suspensive ou de tout autre condition suspensive comme motif de sa volonté de ne pas acquérir, volonté dont elle a informé le vendeur avant l'expiration du terme de la promesse.
En conséquence, la SCI STB qui a déclaré renoncer à l'acquisition avant la fin du délai dont disposait la SCI du Val pour justifier de la réalisation des conditions suspensives et a proposé un compromis de résiliation le 27 juin 2017 n'est pas fondée à se prévaloir de la caducité de l'acte au motif que les conditions suspensives n'auraient pas été toutes réalisées.
Par ailleurs la SCI du Val justifie avoir informé son locataire, la SAS JMDG Partner, par lettre recommandée avec demande d'avis de réception de son notaire en date du 12 mai 2017, de son intention de vendre le local et du prix de la vente ainsi que de son droit de préférence et du délai d'un mois dont il dispose pour lui faire connaître s'il veut faire jouer son droit de préférence.
Dès lors que la non-réitération de l'acte est imputable à l'acquéreur qui ne s'est pas prévalu de l'absence de réalisation des conditions suspensives et notamment de la purge du droit de préemption du locataire à la date de sa renonciation, date à laquelle d'ailleurs le délai pour purger ce droit de préemption n'était pas expiré, il convient de faire droit à la demande de la SCI du Val de dire que le dépôt de garantie lui est acquis, conformément aux stipulations de la promesse.
En conséquence, il convient d'infirmer le jugement et d'ordonner que la somme séquestrée à titre de dépôt de garantie en vertu de la promesse du 11 avril 2017 soit libérée au profit de la SCI du Val.
Sur la demande de dommages et intérêts de la SCI du Val, il y a lieu de dire, eu égard aux stipulations de la promesse, que la pénalité sera limitée au montant du dépôt de garantie, la SCI du Val ne démontrant la réalité d'un préjudice excédant cette somme.
La SCI du Val fait en outre valoir qu'elle n'a pas d'information sur le notaire détenteur du séquestre et produit le courrier qu'elle a adressé le 12 août 2020 à M. Antoine L. et à M. Julien S., notaires, au motif qu'ils étaient respectivement les notaires du vendeur et de l'acquéreur dans la présente affaire, pour obtenir tout élément d'information sur le détenteur du dépôt de garantie, courrier auquel elle affirme n'avoir pas eu de réponse.
En conséquence, il y a lieu de dire qu'en cas d'absence de séquestre du dépôt de garantie ou si la totalité de la somme de 12.650 EUR n'était plus disponible dans les comptes du notaire séquestre, la SCI STB sera condamnée à payer à la SCI du Val la somme de 12 650 euros ou la somme restant due après libération du séquestre à due concurrence de 12.650 EUR.
L'équité commande d'allouer à la SCI du Val une somme de 4 000 EUR au titre des frais irrépétibles engagés à l'instance et de débouter la SCI STB de sa demande à ce titre.
Le jugement est donc infirmé en toutes ses dispositions
- Cour d'appel de Paris, Pôle 4, chambre 1, 19 novembre 2021, RG n° 20/03536