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Le 08 décembre 2020

 

La SCI Pienaggi a demandé au Tribunal administratif de Cergy-Pontoise de condamner la commune de Clamart à lui verser la somme de 1 312 530,50 euros, augmentée des intérêts légaux à compter du 3 novembre 2015, en réparation du préjudice qu'elle estime avoir subi du fait de l'illégalité des arrêtés des 31 mai 2011 et 1er août 2012 par lesquels le maire de Clamart a ordonné l'interruption des travaux autorisés par le permis de construire délivré le 4 décembre 2007, puis a retiré, pour fraude, ce permis de construire.

Par un jugement n° 1601962 du 5 octobre 2018, le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a condamné la commune de Clamart à verser à la SCI Pienaggi la somme globale de 37 840 euros, avec intérêts au taux légal à compter du 4 novembre 2015, en réparation des préjudices subis du fait de l'illégalité de l'arrêté du 1er août 2012 par lequel le maire de la commune a retiré le permis de construire accordé le 4 décembre 2007 à la SCI Pienaggi.

Appel a été relevé.

En ce qui concerne le principe de la responsabilité :

Le maire de Clamart a, par une décision du 1er août 2012, retiré le permis de construire délivré à la SCI Pienaggi le 4 décembre 2007, et modifié le 21 septembre 2009, pour la transformation d'un bâtiment existant à usage de garage professionnel en quatre logements, au motif de la fraude commise sur la surface de plancher existante lors de la demande de permis de construire. Par un arrêt du 2 octobre 2014, devenu définitif, la cour de céans a annulé cette décision pour excès de pouvoir. Cette illégalité est constitutive d'une faute de nature à engager la responsabilité de la commune de Clamart envers la SCI Pienaggi. 

Il ne résulte pas de l'instruction que la SCI Pienaggi aurait, en commençant seulement en 2011 les travaux autorisés par les permis de construire de 2007 et 2009 et en poursuivant postérieurement à l'annulation du retrait du permis de construire un projet qualifié de minimaliste par cette SCI au regard des permis de construire pourtant rétablis par l'arrêt de la cour du 2 octobre 2014, adopté un comportement fautif de nature à exonérer même partiellement la commune de Clamart de sa responsabilité.

En ce qui concerne les préjudices immobiliers :

La perte de bénéfices ou le manque à gagner découlant de l'impossibilité de réaliser une opération immobilière en raison d'une décision illégale telle le retrait d'une autorisation délivrée en vue de sa réalisation revêt un caractère éventuel et ne peut, dès lors, en principe, ouvrir droit à réparation. Il en va toutefois autrement si le requérant justifie de circonstances particulières, tels que des engagements souscrits par de futurs acquéreurs ou l'état avancé des négociations commerciales avec ces derniers, permettant de faire regarder ce préjudice comme présentant, en l'espèce, un caractère direct et certain. Il est fondé, si tel est le cas, à obtenir réparation au titre du bénéfice qu'il pouvait raisonnablement attendre de cette opération. 

Le préjudice immobilier global, évalué dans le dernier état des écritures d'appel à la somme de 1 902 480 euros, a été calculé, notamment par renvoi au chiffrage d'un document de janvier 2017 d'un expert en évaluation immobilière mandaté par la SCI Pienaggi, au vu d'une estimation d'un prix de revente de 2 356 480 euros par référence aux prix de vente en 2019 et 2020 de logements implantés dans la même rue, et d'une indemnité d'immobilisation de 448 000 euros correspondant à des pertes de revenus locatifs, de laquelle ont été déduits des frais d'acquisition de 200 000 euros, de démolition de 16 000 euros, de travaux de construction de 544 000 euros, ainsi que des frais de négociation d'agence de 88 000 euros et de notaire, d'architecte et de portage financier de 54 000 euros.

Il résulte de l'instruction, notamment d'un document de 2015 de la SCI Pienaggi précisant que le " tout d'une superficie " loi Carrez " de 320 m² " était, à la date de la décision fautive du 1er août 2012, " entièrement à aménager " et nécessitait une " création de parkings en sous-sol ", et de l'acte de vente du lot 1 indiquant que le logement existant était en 2010 en " très mauvais état ", que l'ensemble en cause était impropre à l'habitation à la date du 1er août 2012 de l'arrêté fautif. Ainsi, à supposer même que des négociations de vente " en l'état futur d'achèvement " étaient avancées en 2011 pour deux logements projetés sur les quatre autorisés par les permis de construire initial et modificatif délivrés respectivement les 4 décembre 2007 et 21 septembre 2009, la SCI Pienaggi, en décidant de ne pas reprendre à compter d'octobre 2014 l'exécution des permis de construire retirés illégalement par la commune, de vendre, le 22 juillet 2015, les lots 4 à 9 et 11 à 13 pour un montant global de 690 000 euros à charge pour chacun des acquéreurs de faire les travaux d'aménagement et de conserver dans son patrimoine les lots 1 et 10 correspondant à un logement de 108 m², qui ont été vendus le 11 juillet 2018 pour un montant de 630 000 euros après des travaux d'aménagement, et ainsi en n'exécutant pas les permis de construire rétablis dans l'ordre juridique, a procédé à un choix d'opportunité dont elle a retiré des bénéfices. Il ne résulte pas de l'instruction, alors même qu'un établissement bancaire lui demandait le remboursement des prêts relais pour la somme de 341 606,65 euros, que ce choix lui aurait été imposé par la situation dans laquelle elle s'est trouvée à la suite du retrait fautif des permis de construire qui a été annulé le 2 octobre 2014 par la cour. Dès lors, le manque à gagner allégué, ainsi que les pertes de revenus locatifs, lesquelles ne sont au demeurant nullement justifiées dans leur montant dès lors que la SCI Pienaggi, qui n'a pas exposé les dépenses relatives aux travaux d'aménagement des trois logements et qui ne pouvait ni les vendre en état futur d'achèvement ni les louer, ne se fonde que sur des estimations pour les invoquer, n'ont pas de lien direct et certain avec le retrait fautif des permis de construire, Par suite, la demande d'indemnisation de ces préjudices doit être rejetée.

Référence: 

- Cour administrative d'appel de Versailles, 2e chambre, 3 Ddécembre 2020, req. n° 18VE04051