Mme X, qui a vécu en concubinage avec Mme Y, a présenté une requête en adoption plénière de la fille de celle-ci, Marie Y, née le [...], sans filiation paternelle établie.
Elle a fait grief à l’arrêt d'appel de rejeter sa demande alors, selon le moyen soutenu par elle, que l’intérêt supérieur de l’enfant doit guider toute décision le concernant ; que l’Etat doit permettre à un lien familial établi de se développer ; qu’en se bornant à relever que la requête en adoption de Marie Y présentée par Mme X conduirait à rompre le lien de filiation avec Mme Y, sa mère biologique, et que la séparation de Mmes Y et X présentait un obstacle majeur à l’adoption, sans rechercher si l’intérêt supérieur de l’enfant n’imposait pas de faire droit à la requête tout en écartant les textes nationaux limitant l’adoption aux enfants accueillis au foyer de l’adoptant et entraînant la rupture du lien de filiation entre l’enfant et sa mère biologique, et ainsi de permettre l’établissement d’une filiation de l’enfant avec Mme X, correspondant à un lien affectif existant, tout en conservant celle existant avec Mme Y, la cour d’appel a privé sa décision de base légale au regard de l’art. 8 de la Convention européenne des droits de l’homme.
Mais si l’adoption plénière d’un enfant, par une personne âgée de plus de vingt-huit ans, est autorisée par l’art. 343-1 du code civil, elle a pour effet, aux termes de l’art. 356 du même code, de conférer à cet enfant une filiation se substituant à sa filiation d’origine et de le priver de toute appartenance à sa famille par le sang ; seule l’adoption plénière de l’enfant du conjoint, permise par l’art. 345-1, laisse subsister sa filiation d’origine à l’égard de ce conjoint et de sa famille ; le droit au respect de la vie privée et familiale garanti à l’art. 8 de la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales n’impose pas de consacrer, par une adoption, tous les liens d’affection, fussent-ils anciens et établis.
Après avoir relevé que, Mme X et Mme Y n’étant pas mariées, l’adoption plénière de Marie par Mme X mettrait fin au lien de filiation de celle-ci avec sa mère, qui n’y avait pas renoncé, ce qui serait contraire à l’intérêt supérieur de l’enfant, lequel résidait dans le maintien des liens avec sa mère biologique, la cour d’appel, qui n’était pas tenue de procéder à une recherche inopérante, a légalement justifié sa décision.
- Arrêt n° 212 du 28 février 2018 (pourvoi n° 17-11.069) - Cour de cassation - Première chambre civile