- Nature juridique des clauses du cahier des charges
En vertu de l’article L.442-9 du Code de l’urbanisme, les règles d'urbanisme contenues dans les documents du lotissement, notamment le règlement, le cahier des charges s'il a été approuvé ou les clauses de nature réglementaire du cahier des charges s'il n'a pas été approuvé, deviennent caduques au terme de dix années à compter de la délivrance de l'autorisation de lotir si, à cette date, le lotissement est couvert par un plan local d'urbanisme ou un document d'urbanisme en tenant lieu.
La caducité intervenant aux termes de 10 ans à compter de la délivrance de l’autorisation de lotir ne concerne que les règles d’urbanisme, soit les clauses de nature règlementaire du cahier des charges.
En ce sens, la caducité des règles d’urbanisme n’a pas d’incidence sur les règles contractuelles du cahier des charges s’appliquant entre colotis. En effet, les clauses de nature contractuelle ne sont pas frappées par la caducité et n’ont pas de date d’expiration.
Comment modifier alors les clauses du cahier des charges quand celles-ci apparaissent contraignantes ?
- Modification des clauses du cahier des charges
- Si une clause n’est pas de nature réglementaire, sa modification devra recueillir l’accord des colotis à l’unanimité, à moins que le cahier des charges ne prévoie ses propres règles de modification ;
- Si une clause est de nature règlementaire, la modification est soumise aux dispositions de l’article L. 442-10 du Code de l’urbanisme : un accord avec double majorité qualifiée des colotis.
Plus précisément, il est possible de modifier un cahier des charges de lotissement dans le cadre d’un vote en assemblée générale d’association syndicale libre (ASL) s’il en existe une, ou entre les colotis eux-mêmes, à 2 conditions :
La stipulation d’une clause expresse prévoyant le recours à un vote en ASL ;
L’acceptation à l’unanimité des colotis de la possibilité de recourir à une décision d’ASL pour la modification du cahier des charges.
En adhérant aux statuts par l’acquisition de leurs lots, les colotis valident alors les nouvelles règles procédurales de modification des statuts.
Ainsi, dès lors que les statuts de l’ASL prévoient la modification du cahier des charges et que les modalités de convocation d’assemblée générale, les règles de quorum et de majorité prévues dans les statuts sont respectées, la modification du cahier des charges est valable.
Par ailleurs, le document modificatif du cahier des charges doit être constitué par acte authentique (article 710-1 Code civil).
- Publication des clauses du cahier des charges
Le cahier des charges a le caractère de servitudes réciproques entre les lots, ainsi les principes relatifs à l’opposabilité de ces servitudes sont applicables au cahier des charges. De ce fait, le cahier des charges doit nécessairement faire l’objet d’une publicité foncière afin de le rendre opposable aux tiers. Ainsi, la non-publication du cahier des charges induit un risque pour les colotis qui s’en prévalent.
- Sanction en cas de violation du cahier des charges
La violation d'un cahier des charges, quelle que soit sa nature juridique, peut donner lieu à un contentieux civil sur le fondement de la responsabilité contractuelle. Par ailleurs, une telle violation peut faire l'objet d'une action en référé (procédure d’urgence permettant au juge de prendre des mesures provisoires) lorsque l'infraction constitue un trouble manifestement illicite.
La violation du cahier des charges donne lieu à réparation dont les sanctions possibles sont les suivantes :
Soit la mise en conformité de la construction avec les clauses du cahier des charges ;
Soit en la démolition de la construction ne respectant pas le cahier des charges (article 1222 Code civil).
En outre, il peut être accordé des dommages et intérêts au requérant s’il établit l’existence d’un préjudice personnel.
Il est à noter que la démolition d’un immeuble contrevenant aux stipulations du cahier des charges n’est pas automatique. En effet, le juge opère un contrôle de proportionnalité entre le coût de la démolition pour le débiteur et son intérêt pour les créanciers (Civ. 3e 13 juillet 2022).
Dans le cadre de la convention de partenariat établie entre la Faculté de Droit et de Sciences Politiques de Montpellier et l’ONB, cet article a été rédigé par :
Tyffaine Duvallet et Sibylle Mercier, étudiantes en L3 en 2024