Partager cette actualité
Le 25 janvier 2007
Commentaire de l'arrêt rendu par la Chambre sociale de la Cour de cassation le 21 décembre 2006: Larrêt rendu le 21 décembre 2006 par la Chambre sociale de la Cour de cassation apporte des éclaircissements sur la faculté, pour un salarié, de prendre acte de la rupture de son contrat de travail, lorsque lemployeur ne respecte pas les obligations contractuelles auxquelles il sest engagé, et plus particulièrement lorsque celui-ci refuse de verser une prime annuelle prévue dans ledit contrat de travail. En lespèce, Mme S était employée par la société Tomy France en qualité de chef de produit depuis 1998. Au sein de son contrat de travail, était prévu le versement dune prime annuelle de motivation, dite "incentive". En 2000, la société Tomy refuse le versement de cette prime à Mme S. Celle-ci fait alors un recours devant le juge des référés, qui lui accorde le versement dune partie de cette prime. Mme S décide ensuite dassigner son employeur devant le Conseil prudhommes en versement de la partie complémentaire de cette prime. Quelques temps après cette assignation, Mme S prend acte de la rupture de son contrat de travail, se fondant sur linexécution dune de ses obligations contractuelles par l'employeur (le versement de ladite prime). La Cour dappel accepte la demande de la salariée et décide que la prise dacte de la rupture du contrat de travail ainsi effectuée par celle-ci sanalyse en un licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse, et condamne donc la société Tomy France à lui verser des dommages et intérêts en compensation du préjudice subi du fait de ce licenciement, ainsi quau versement de ladite prime. Tomy France forme alors un pourvoi devant la Cour de cassation au moyen que, lorsquun salarié a engagé contre son employeur une action tendant à lexécution de son contrat de travail, il nest pas en droit, pendant le cours de linstance, de prendre acte de la rupture de son contrat de travail à raison des faits dont il a saisi la juridiction prudhommales. Tomy soutient ici le fait que, pour ce faire, la salariée doit, soit attendre le jugement de laffaire, soit faire une demande additionnelle. Lemployeur fait en fait référence à une jurisprudence récente qui affirme que, dans un tel cas, une demande additionnelle est nécessaire (Cass. soc. 8 juillet 2003). Toutefois, malgré ce précédent quasiment similaire, où lemployeur avait obtenu gain de cause, sur les mêmes fondements que ceux invoqués ici par la société Tomy, la Cour de cassation revient ici sur sa position. En effet, elle rejette le pourvoi au motif quun salarié qui agit en justice contre son employeur en exécution dune obligation née du contrat de travail peut toujours prendre acte de la rupture du contrat, que ce soit en raison des faits dont il a saisi le juge, ou pour dautres faits. Dès lors, il importe peu que le salarié ait préalablement assigné son employeur en justice à la prise dacte de la résiliation du contrat de travail. Il ny a donc pas nécessité de saisir le juge sur ce point en même temps que sur les autres invoqués, ni même de faire une demande additionnelle à ce point si cela na pas été fait. Dune manière plus concise, on peut donc résumer lapport de cet arrêt en deux points. - Tout dabord, la Chambre sociale réaffirme ici la faculté de résiliation unilatérale des contrats à durée indéterminée (prévue par le droit commun des contrats, ainsi que par larticle L. 122-4 du Code du travail). Elle précise sur ce point que cette faculté ne doit pas être entachée par une assignation en exécution du contrat de travail préalable faite par le salarié à lencontre de son employeur. - Ensuite, la Cour de cassation rappelle quune telle résiliation unilatérale dun contrat de travail à durée indéterminée produit soit les effets dun licenciement sans cause réelle et sérieuse (si les faits invoqués le justifient, comme cest le cas en lespèce), soit ceux dune démission. Dès lors, si lemployeur ne respecte pas les obligations qui lui incombent en vertu du contrat de travail quil a passé avec son salarié, et notamment sil refuse de lui verser une prime qui lui est due, le salarié est donc en droit, à tout moment de résilier unilatéralement ce contrat. Toutefois, cette résiliation ne peut intervenir que si ledit contrat était de durée indéterminée, et que selon les conditions prévues par le droit du travail. Cette résiliation sanalysera alors en un licenciement sans cause réelle et sérieuse, justifiant lindemnisation du salarié. Cécile PeskineRéférence: - Cour de cassation, Chambre soc., 21 décembre 2006