Inscription à notre newsletter

Recevez toutes les informations importantes directement dans votre boite mail. Cliquez ici

Partager cette actualité
Le 06 avril 2008

La société Geoconcept développe et commercialise en 1991 la première version de son logiciel « Géoconcept » dédié au géomarketing. Trois anciens salariés, principaux cadres et ingénieurs de cette société la quittent et constituent le 29 janvier 1999 la société Asterop. Au cours de l’année 1999 six autres anciens salariés de la société Geoconcept rejoignent la société Asterop. Parmi eux, deux salariés étaient liés à leur ancien employeur par une clause de non-concurrence. Dés sa création, la société Asterop développe une activité de développement informatique et mets au point un logiciel de géomarketing dénommé « Business GéoIntelligence ». La société Geoconcept intente alors une action en concurrence déloyale à l’encontre de la société Asterop et demande réparation du préjudice subi à hauteur de 5 millions de francs (762 245,09 euros). En appel, les magistrats parisiens saisis de l’affaire donnent raison à la société Geoconcept sur le double fondement d’une part que le débauchage des principaux cadres et ingénieurs de la société Geoconcept a eu pour conséquence de désorganiser le fonctionnement de cette dernière et d’autre part que la complicité de violation d’une clause de non-concurrence est une faute délictuelle à l'égard de la victime de l'infraction (la société Geoconcept). Si la solution semble opportune en équité elle est pourtant cassée par la Haute juridiction sur appel de la société Asterop. La décision de la Cour de Cassation est riche d’enseignements, tant sur le terrain de l’appréciation de la concurrence déloyale par débauchage que sur celui de la complicité de violation d’une clause de non-concurrence. Traditionnellement la Cour de cassation admet strictement la concurrence déloyale par débauchage. Celle-ci peut néanmoins être admise dans deux hypothèses que tente d’établir la société victime ici : -lorsque le débauchage s’accompagne d’actes ou des pratiques déloyaux (dénigrement, etc.) ; -lorsque le débauchage entraîne la désorganisation de l’entreprise concurrente. Le premier argument de l’entreprise victime est de faire valoir que le débauchage dont elle a été victime était accompagné d’un comportement déloyal : le débauchage, en connaissance de cause, par un tiers de deux salariés liés par une clause de non-concurrence à leur ancien employeur est un comportement déloyal nécessairement constitutif d’une faute délictuelle à l’égard de celui-ci. Faudrait-il encore que la clause de non-concurrence en question soit valide. Or les juges du fond n’ont guère opéré cette vérification alors même qu’elle leur était demandée par les parties au litige. Comme elle ne l’a pas fait, la Cour de Paris s’expose logiquement à un premier motif de cassation. On en déduit donc que la violation, par le nouvel employeur, d’une clause de non-concurrence irrégulière (en l’espèce, pour absence de contrepartie financière) n’est pas constitutif d’un acte de concurrence déloyale au détriment de l’ancien employeur. Restait donc pour la société Geoconcept à faire valoir l’argument de la désorganisation de son entreprise. Pour déterminer si cette condition est remplie les juges du fond se fondent sur un faisceau d’indices. En l’espèce, le fait que la société Asterop ait été créée par trois anciens salariés de la société victime, rejoint quelques mois après par quatre autres, que ces personnes comptaient parmi les cadres et ingénieurs de cette dernière ne suffit pas aux juges de la chambre commerciale pour caractériser une désorganisation de la société Geoconcept (là pourtant où les juges d’appel avaient jugé quelle était « incontestable »). D’autres éléments manquent… On voit donc que si la chambre commerciale ouvre une porte en admettant que la complicité de violation d’une clause de non-concurrence puisse constituer une pratique déloyale sanctionnée sur le fondement de l’article 1382 du Code Civil, à la condition toutefois que cette clause soit licite, elle en ferme une autre en appréciant toujours aussi strictement la notion de désorganisation de l’entreprise concurrente. Com. 29 janvier 2008, F-P+B, n° 06-18.654 Romain Rue, magistère-DJCE