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Le 10 juillet 2021

 

Monsieur Luciano S. et monsieur Amar A. sont propriétaires de deux terrains contigus au Havre. Le 21 novembre 1976, M. S. et l'auteur de M. A. sont convenus de déclarer mitoyen le mur d'un garage construit entre leurs fonds, dans l'axe de la limite séparative. Cette limite a fait l'objet d'un procès-verbal de bornage le 21 mars 2000 dressé par M. F., géomètre-expert. Au cours de l'année 2002, M. A. a érigé un mur séparatif entre les deux terrains afin de remplacer une ancienne clôture grillagée. Le 3 août 2004, M. S. a fait contrôler par M. F. l'implantation du mur par rapport à la limite bornée quatre ans auparavant.

M. S. a ensuite saisi le tribunal d'instance du Havre, qui par jugement du 6 septembre 2006 s'est déclaré incompétent pour connaître de demandes relatives à la propriété et à la démolition du mur édifié, et a notamment ordonné un bornage judiciaire.

L'expert judiciaire a déposé un rapport le 5 août 2007 relevant que les termes de l'acte du 21 novembre 1976 et du procès verbal de bornage du 21 mars 2000 avaient des conséquences contradictoires sur la délimitation.

Par acte en date du 7 janvier 2016, M. S. a fait assigner M. A. devant le tribunal de grande instance du Havre en démolition du mur et en réparation de son préjudice.

Appel a été relevé de la décision de première instance qui a débouté M. Luciano S. de l'ensemble de ses demandes,.

Il ressort de l'article 545 du Code civil que nul ne peut être contraint de céder sa propriété, si ce n'est pour cause d'utilité publique, et moyennant une juste et préalable indemnité. Il doit en découler le droit, pour le propriétaire d'un fonds, d'obtenir en justice la démolition d'une construction qui y empiète. En application de l'article 646 du Code civil, le bornage consiste à matérialiser la ligne séparative de deux fonds à l'aide de bornes. Il s'agit d'une simple opération matérielle indépendante de toute question de fond portant sur le droit de propriété lui-même. L'action en démolition est rattachée au droit de propriété. Elle est insusceptible d'abus et il doit y être fait droit même en cas d'empiétement minime. Il appartient cependant à la partie qui invoque un empiétement de le prouver. Or, en l'espèce, le voisin qui se plaint de l'empiétement se base sur un bornage amiable réalisé en 2000. Or, il avait dissimulé au géomètre-expert l'existence d'une convention conclue en 1976 entre les propriétaires de l'époque, qui avaient convenu du caractère mitoyen du mur du garage construit à l'époque entre leurs fonds. Le nouveau mur litigieux respecte cette convention de mitoyenneté et ne constitue donc pas un empiétement sur le fonds du requérant. La demande de démolition du mur séparatif doit donc être rejetée.

La demande en bornage, présentée pour la première fois en appel, ne tend pas aux mêmes fins que la demande en démolition, puisqu'elle ne touche pas au fond. Elle n'en est pas davantage la conséquence, l'accessoire ou le complément nécessaire, a fortiori en l'espèce puisque les parcelles ont déjà été bornées à l'amiable. Elle est donc irrecevable en application de l'article 564 du Code de procédure civile.

Il ressort de ce qui précède que l'appelant, M. Luciano S,, est à l'origine de l'ambiguïté existant entre les parties quant au positionnement de la limite séparative, puisqu'il a caché au géomètre-expert l'existence d'une convention de mitoyenneté sur le mur que ce dernier a pris en référence pour le bornage. Il ne l'a révélé qu'en cours d'expertise judiciaire, mettant ainsi la mesure en échec, puis a saisi le tribunal dix ans après le dépôt du rapport. La décision dont il interjette appel est intégralement confirmée. Dans ces conditions, la poursuite du litige jusqu'en cause d'appel traduit une légèreté blâmable. Il doit être condamné à verser 1000 euros à l'intimé pour procédure abusive.

Référence: 

- Cour d'appel de Rouen, 1re chambre civile, 14 avril 2021, RG n° 18/00721