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Le 08 janvier 2009
Il s'ensuit que si la vente n'a pu avoir lieu, c'est uniquement en raison de la négligence de Raymond qui, alors qu'il était âgé de 86 ans au moment de l'offre et ne pouvait raisonnablement espérer obtenir un prêt qu'il ne justifie d'ailleurs pas avoir sollicité, n'a pris que tardivement la décision de libérer une partie de son épargne et n'a pas été en mesure de payer comptant le prix et les frais de la vente avant l'expiration du délai de quatre mois...
Georges, depuis lors décédé, et son épouse Odette, Jacques, Simone, Isabelle, Hélène, Alain, Henri et Alain, ayant, consécutivement à la division par lots de leur immeuble leur appartenant, projeté de vendre, pour le prix de 91.469,41 euros, l'appartement occupé par Raymond en vertu d'un bail, Maître Philippe, notaire chargé de recevoir l'acte, a, par lettre recommandée reçue le 19 novembre 2001, informé ce dernier du prix et des conditions de la vente, cette information valant offre de vente à son profit conformément aux dispositions de l'article 10 de la loi n° 75-1351 du 31 décembre 1975 relative à la protection des occupants de locaux à usage d'habitation.

Après avoir accepté cette offre et notifié au notaire son intention de recourir à un prêt, Raymond a finalement informé ce dernier, par lettre du 7 mai 2002, qu'il renonçait à se porter acquéreur, le prêt lui ayant été refusé.

Par lettre recommandée en date du 24 septembre 2002, reçue le 25 septembre 2002, le notaire a de nouveau offert à Raymond d'acquérir l'appartement qu'il occupe, mais cette fois au prix de 86.895,94 euros payable comptant le jour de la signature de l'acte authentique, outre les frais de la vente.

Par lettre envoyée le 25 novembre 2002, Raymond a répondu au notaire qu'il acceptait cette offre et lui a notifié son intention de recourir à un prêt.

Par lettre en date du 19 mars 2003, il a informé le notaire de son intention d'acquérir et lui a demandé de lui fixer un rendez-vous et de transmettre l'intégralité de son dossier à son notaire.

Par lettre en date du 25 mars 2003, le notaire des vendeurs a informé le locataire que le rendez-vous pour la signature de l'acte était fixé au 27 mars 2003 à 13 heures en ses locaux et a attiré son attention sur le fait qu'à défaut de signature de l'acte authentique et du paiement de l'intégralité du prix au plus tard le 27 mars 2003, il serait déchu de son droit de préemption conformément à l'article 10, alinéa 3 de la loi du 31 décembre 1975.

Par lettre transmise par fax le 25 mars 2003 à 15 h 12, le notaire des vendeurs a informé le notaire du locataire de cette date et par une autre lettre transmise par fax le 26 mars 2003, il lui a demandé de rappeler à son client que le paiement de la totalité du prix de vente et des frais devait avoir lieu par chèque de banque.

Le 27 mars 2003 à 13 h, Raymond s'est présenté à l'étude du notaire des propriétaires qui a refusé de recevoir l'acte faute d'être en possession d'un chèque de banque.

Par acte d'huissier signifié le 27 mars 2003 à 15 h 30 à la personne de Raymond, le même notaire a notifié à ce dernier une lettre par laquelle il l'a informé qu'il se tenait à sa disposition jusqu'à 18 h, heure de fermeture de son étude, pour le recevoir, muni d'un chèque permettant de payer le prix et les frais, et recevoir l'acte.

Raymond s'étant présenté avec un chèque de banque d'un montant de 26.700 euros et ayant offert de payer le complément au moyen d'un chèque tiré sur son compte ouvert auprès du Crédit Agricole, le notaire a encore refusé de recevoir l'acte.

Par acte signifié le 28 mars 2003, Raymond a fait sommation au notaire de l'acte de lui fixer un nouveau rendez-vous dans un délai de huit jours, ce que ce dernier a refusé.

Selon acte reçu le 15 mai 2003 par le notaire des propriétaires, les consorts propriétaires ont vendu à un tiers l'appartement occupé par Raymond.

Par acte du 21 mai 2003, Raymond a assigné les consorts vendeurs devant le tribunal de grande instance de NICE et ces derniers ont appelé en cause leur notaire.

Par acte du 15 novembre 2004, il a assigné l'acquéreur

Aux termes de ses dernières conclusions, il demandait au tribunal de prononcer la nullité de la vente du 15 mai 2003, au motif qu'elle a eu lieu en violation du droit de préemption qu'il a régulièrement exercé, et d'ordonner la réalisation de la vente à son profit.

Par jugement du 26 octobre 2006, le Tribunal de grande instance de NICE, après avoir relevé que Raymond ne justifiait pas de la publication de sa demande en annulation de la vente du 15 mai 2003 au bureau des hypothèques, a déclaré cette demande irrecevable, l'a débouté de sa demande de dommages et intérêts et l'a condamné à payer, sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, la somme de 1.500 euros au notaire, la même somme aux consorts vendeurs, ainsi que les dépens de l'instance.

Raymond a interjeté appel de ce jugement. La Cour d'Aix a statué comme suit:

{{Sur la recevabilité de la demande tendant à l'annulation de la vente du 15 mai 2003.}}

Selon l'article 30-5 du décret n 55-22 du 4 janvier 1955 portant réforme de la publicité foncière, les demandes tendant à faire prononcer la résolution, la révocation, l'annulation ou la rescision de droits résultant d'actes soumis à publicité ne sont recevables devant les tribunaux que si elles ont été elles-mêmes publiées conformément aux dispositions de l'article 28-4, c, et s'il est justifié de cette publication par un certificat du conservateur ou la production d'une copie de la demande revêtue de la mention de publicité.

Aux termes de l'assignation qui a été délivrée aux consorts vendeurs en mai et juin 2003 et par laquelle l'instance a été introduite devant le premier juge, Raymond, qui ignorait la vente du 15 mai 2003, n'en demandait pas l'annulation; ce n'est qu'ultérieurement qu'il a formé, par conclusions signifiées le 16 mars 2005, une demande tendant à faire prononcer l'annulation de cette vente; il justifie de la publication de cette demande le 15 avril 2005 par la production d'une copie de ces conclusions, revêtue de la mention de publicité; la demande de Raymond tendant à faire prononcer l'annulation de la vente du 15 mai 2003 est donc recevable.

{{Sur le fond.}}

L'article 10. I. de la loi n 75-1351 du 31 décembre 1975 relative à la protection des occupants de locaux à usage d'habitation, dispose:

"{Préalablement à la conclusion de toute vente d'un ou plusieurs locaux à usage d'habitation ou à usage mixte d'habitation et professionnel, consécutive à la division initiale ou à la subdivision de tout ou partie d'un immeuble par lots, le bailleur doit, à peine de nullité de la vente, faire connaître par lettre recommandée avec demande d'avis de réception, à chacun des locataires ou occupants de bonne foi, l'indication du prix et des conditions de la vente projetée pour le local qu'il occupe. Cette information vaut offre de vente au profit de son destinataire.

L'offre est valable pendant une durée de deux mois à compter de sa réception. Le locataire qui accepte l'offre ainsi notifiée dispose, à compter de la date d'envoi de sa réponse au bailleur, d'un délai de deux mois pour la réalisation de l'acte de vente. Si, dans sa réponse, il notifie au bailleur son intention de recourir à un prêt, son acceptation de l'offre de vente est subordonnée à l'obtention du prêt et, en ce cas, le délai de réalisation est porté à quatre mois.

Passé le délai de réalisation de l'acte de vente, l'acceptation par le locataire de l'offre de vente est nulle de plein droit}".

Les termes de cet article ont été reproduits dans la lettre d'information valant offre de vente, reçue par Raymond le 25 septembre 2002.

Il résulte de l'avis de réception versé aux débats, que la lettre par laquelle Raymond a accepté cette offre et notifié au notaire son intention de recourir à un prêt, a été envoyée le 25 novembre 2002, présentée par la poste le 27 novembre 2002 et distribuée le 28 novembre 2002.

En application de l'article 10. I. susvisé, le délai de quatre mois a donc commencé à courir le 25 novembre 2002 et a expiré le mardi 25 mars 2003 à vingt quatre heures et non le 28 mars comme le soutient Raymond; le fait que le notaire ait considéré qu'il expirait le 27 mars, ne saurait avoir pour effet de le prolonger au-delà de cette date.

La lettre d'information valant offre en date du 24 septembre 2004, de même que la lettre du 25 mars 2003, que le notaire a envoyées à Raymond, ont été rédigées sur un papier à en-tête de son étude, comportant en bas de page, la mention suivante: "{tout paiement d'un montant égal ou supérieur à 40.000 € doit être effectué par chèque tiré par une banque française (chèque de banque). (AG de la compagnie des notaires des A-M du 26 mai 1994)}".

Cette mention étant écrite en caractères parfaitement lisibles, Raymond ne pouvait ignorer qu'il devait régler le prix et les frais de la vente au moyen d'un chèque de banque.

De surcroît, Raymond reconnaît que ce n'est que le 28 mars 2003 que son compte ouvert auprès du Crédit Agricole a été crédité de la somme de 66.729,54 euros provenant d'un rachat d'épargne auprès du GIE AFER, et qu'il résulte d'un relevé versé aux débats, qu'à la date du 27 mars 2003, ce compte ne comportait pas une provision suffisante pour permettre l'émission d'un chèque de 66.729,54 euros.

Ainsi, en refusant le chèque de 66.729, 54 euros tiré sur le compte de Raymond, le notaire, qui n'était pas tenu d'effectuer auprès du Crédit Agricole et du GIE AFER des investigations qui en tout état de cause ne lui auraient pas permis d'avoir la moindre garantie quant à l'existence d'une provision suffisante lors de la présentation du chèque, n'a commis aucune faute.

Il s'ensuit que si la vente n'a pu avoir lieu, c'est uniquement en raison de la négligence de Raymond qui, alors qu'il était âgé de 86 ans au moment de l'offre et ne pouvait raisonnablement espérer obtenir un prêt qu'il ne justifie d'ailleurs pas avoir sollicité, n'a pris que tardivement la décision de libérer une partie de son épargne et n'a pas été en mesure de payer comptant le prix et les frais de la vente avant l'expiration du délai de quatre mois à l'issue duquel son acceptation de l'offre est devenue nulle de plein droit, ce qui a permis aux consorts vendeurs de vendre à un tiers l'appartement dont il est locataire, sans porter atteinte à son droit de préemption ;

Raymond est donc débouté de sa demande de nullité de la vente au tiers.
Référence: 
Référence: - Cour d'appel d'Aix-en-Provence, 4e Chambre B, 1er décembre 2008 (/R.G. n° 06/20494) publié par le service de documentation de la Cour de cassation