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Le 05 novembre 2016

Suivant les art. 270 et suivants du code civil, un époux peut être tenu de verser à l'autre une prestation destinée à compenser la disparité créée par la rupture du mariage dans leurs conditions de vie respectives ; cette prestation doit être fixée selon les besoins de celui à qui elle est versée et des ressources de l'autre, en tenant compte de la situation au moment du divorce et de l'évolution de celle ci dans un avenir prévisible.

Pour apprécier le montant de la prestation compensatoire, le juge doit prendre en considération certains critères tels que la durée du mariage, l'âge et l'état de santé des époux, leur qualification et leur situation professionnelles, les conséquences des choix professionnels faits par l'un des époux pendant la vie commune pour l'éducation des enfants et du temps qu'il faudra encore y consacrer ou pour favoriser la carrière de son conjoint au détriment de la sienne, leur patrimoine estimé et prévisible, tant en capital qu'en revenu, après la liquidation du régime matrimonial, leurs droits existants et prévisibles et leur situation respective en matière de pension de retraite en ayant estimé autant qu'il est possible, la diminution des droits à la retraite qui aura pu être causé, pour l'époux créancier de la prestation compensatoire, par les circonstances visées au sixième alinéa de l'art. 271 du code civil.

En l'espèce madame demande à la cour d'appel de débouter son mari de ce chef de demande, à titre subsidiaire, de diminuer le montant alloué dans de notables proportions, ; elle fait grief au premier juge de n'avoir retenu que la seule différence de revenus, au demeurant erronée, sans rechercher si elle résulte ou non de choix opérés en commun par les époux durant la vie commune.

Elle fait valoir que l'invalidité de son époux date de 1992, à l'âge de 31 ans et est antérieure au mariage, célébré le 20 mars1993, et exposé que son mari n'a pas été victime d'un accident du travail, qu'il s'agit d'une rixe avec son frère qui est à l'origine d'une invalidité de 90 % (perte d'un oeil), que son époux a refusé le reclassement qui lui était proposé par l'assurance maladie, qu'il a fait le choix librement assumé de ne pas reprendre d'activité professionnelle de sorte qu'il n'a jamais mis sa carrière entre parenthèses pour se consacrer à son foyer, que lors de la naissance des enfants en 1995 et 1997, son époux n'avait pas repris le travail, préférant rester à la maison sans contrainte d'horaire et de travail, que de 1992 à 2004, elle travaillait à temps partiel, ne travaillant que le week-end et les jours fériés, que c'est la première épouse de son mari qui s'occupait des enfants lors de leur naissance, qu'à partir de l'installation de la famille en Bretagne en 2006, elle travaillait tous les jours et parallèlement, son époux s'occupait à des travaux manuels, ajoute que la seconde maison achetée a été améliorée grâce à ses revenus très supérieurs à ceux de son mari, permettant ainsi à l'indivision de faire face au règlement des emprunts, que sa baisse de revenus entre 2013 et 2014 s'explique par le fait que la maison indivise a été vendue, que les prêts qu'elle assumait ont été soldés, qu'en outre, elle est associée depuis le 30 janvier 2015, ce mode d'exercice lui permettant de prendre des congés, qu'elle ajoute qu'elle a fait l'acquisition d'une maison le 16 décembre 2014 à Brech, qu'elle a dû contracter un prêt de 110. 000 euro qu'elle rembourse à raison de 740, 59 euro par mois.

Elle fait observer que pendant toute sa vie, son époux a mené une vie de dilettante, qu'il doit assumer les conséquences de ses choix de vie, ne percevant qu'une pension d'invalidité de 1. 376 euro par mois (incluant une rente trimestrielle).

Elle souligne qu'elle travaille depuis 1992 en qualité d'infirmière libérale, qu'elle a seule contribué à son développement professionnel sans aucune aide de la part de son mari, que sa retraite à l'âge de 62 ans, soit en juillet 2029, ne sera que de 17.541 euro par an, soit 1.461,75 euro, que sa situation sera identique à celle alléguée par son époux, qu'elle ajoute que les trois maisons acquises successivement l'ont toujours été indivisément par moitié entre les époux, que la disparité de revenus alléguée par son époux est largement compensée par la liquidation du régime matrimonial, qu'elle a assuré le train de vie de la famille, que son époux a perçu la moitié du solde du prix de vente de la maison indivise de Pluvigner, soit la somme de 222.736 euro en septembre 2013, que les travaux effectués par son mari et son beau-père ne sont pas des travaux de rénovation totale, que son époux s'est constitué une épargne dont il doit justifier.

Que monsieur réplique qu'il ne lui a été proposé aucun reclassement par l'assurance maladie, qu'il avait été convenu au moment du mariage, qu'il ne reprendrait pas d'emploi, qu'il remplissait les fonctions de père au foyer, qu'il a ainsi mis sa vie professionnelle entre parenthèses, ne cotisant à aucune caisse de retraite, qu'il objecte qu'il a construit de ses mains la maison du couple qui a été vendue, a permis d'en acquérir une seconde qu'il a rénovée lui-même, qui a été elle-même vendue pour 525.000 euro, qu'il n'est pas un homme entretenu et son activité a profité directement à son épouse, lui permettant d'exercer pleinement son activité professionnelle, mais en outre de développer sa patientèle, que sa pension d'invalidité et sa rente conventionnelle ont toujours été versées sur le compte joint des époux et finançaient ainsi l'achat des matériaux et le remboursement des emprunts.`

Le premier juge, après avoir dit qu'il existe en défaveur de l'époux une disparité dans les conditions de vie respective des époux, a dit qu'il y a lieu d'allouer à monsieur une prestation compensatoire sous forme de capital de 70. 000 euro.

La cour d'appel confirme.

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Le jugement est ainsi confirmé en ce qu'il a dit que la femme doit payer au mari un capital de 70.000 euro à titre de prestation compensatoire.

Le mariage, dont sont issus deux enfants, a duré 24 ans. L'époux, âgé de 55 ans, est invalide. L'épouse, âgée de 47 ans, est infirmière libérale.

Le mari ne peut alléguer avoir mis sa vie professionnelle entre parenthèsespour se consacrer à ses fonctions de père au foyer, puisque à l'âge de 31 ans, il a dû renoncer à exercer une profession quelconque du fait de son invalidité reconnue et indemnisée et non par choix fait dans l'intérêt de la famille. Cependant, les attestations produites par l'époux expliquant qu'il a réalisé au cours de sa vie de père au foyer et en invalidité, de gros travaux dans ses diverses maisons relevant du bâtiment interrogent sur la légitimité du versement d'une pension d'invalidité par la collectivité des assurés sociaux dans de telles circonstances, qui a permis de valoriser le patrimoine foncier des époux

Par ailleurs, madame reconnaît elle-même que l'invalidité de son époux est antérieure au mariage. Il en résulte qu'elle a épousé en toute connaissance de cause ce dernier, divorcé et père d'un enfant, en invalidité et donc sans profession. De par sa formation d'infirmière libérale, elle devait mesurer les conséquences pouvant résulter de la situation de handicap de son époux, de son impossibilité de travailler et de la nécessité pour elle d'être le seul élément moteur sur le plan professionnel pour subvenir aux besoins de la famille et des enfants et de contribuer majoritairement aux charges du mariage. Cette situation était prévisible dès la célébration du mariage et la disparité créée par la rupture du mariage dans leurs conditions de vie respectives, dans ces circonstances particulières, est appelée à perdurer dès lors que les droits à la retraite de l'époux seront très faibles.

Enfin, madame ne peut utilement se prévaloir de ce que la liquidation du régime de séparation de biens adopté par les époux serait favorable au mari, alors que rien n'indique que ses apports financiers aient excédé l'avantage issu de l'exécution de travaux par ce dernier lui-même. (JurisData : 2016-012505)

 

Référence: 

- Cour d'appel de Rennes, Chambre 6 A, 20 juin 2016, RG n° 15/04124