M. Bernard S, qui avait conclu avec Mme Catherine R, le 23 décembre 1999, un pacte civil de solidarité, est décédé le 25 janvier 2012, laissant pour lui succéder sa mère, Mme Odette S, ses deux soeurs, Mmes Arlette et Michèle S, et son frère, M. Vincent S.
Se prévalant d'un document signé avec M. Bernard S lors de la conclusion du pacte civil de solidarité, et de la volonté testamentaire qui y était exprimée, Mme Catherine R a considéré qu'elle était la seule et unique héritière du défunt. Par acte du 12 mai 2014, les consorts S l'ont fait assigner devant le Tribunal de grande instance de Nancy pour voir ordonner l'ouverture des opérations de compte, liquidation et partage de la succession de M. Bernard S, prononcer la nullité de l'acte dont se prévalait Mme R, déclarer celle-ci redevable d'une indemnité d'occupation envers l'indivision successorale, désigner un expert pour évaluer les immeubles indivis, et condamner sous astreinte la défenderesse à produire les titres de propriété de ces immeubles, ainsi que les relevés des comptes bancaires ou avoirs financiers propres au défunt, joints ou communs.
Appel été relevé du jugement de première instance qui a débouté Mme Catherine R.
La partenaire pacsée du défunt (Catherine R) n'est pas fondée à s'opposer à la demande de la mère et des frère et soeurs de celui-ci tendant à ordonner l'ouverture des opération de compte, liquidation et partage de la succession. La partenaire allègue être l'unique héritière du défunt aux termes de l'acte rédigé par les partenaires instituant chacun d'eux légataire universel en cas de décès de l'autre. Cependant, cet acte constitue un testament conjonctif tombant sous le coup de l'interdiction édictée par l'article 968 du Code civil dans la mesure où les dernières volontés des auteurs sont rédigées sur un seul et même écrit, et où leurs dispositions sont intellectuellement indissociables. Ainsi, cet acte ne peut avoir valeur de testament.
Par ailleurs, ce même acte ne peut pas non plus être qualifié de clause de tontine ou d'accroissement. Une telle clause se définit comme celle par laquelle deux ou plusieurs personnes achètent un bien en commun en convenant que la dernière survivante sera la seule propriétaire de l'intégralité du bien, c'est-à-dire sous condition du prédécès du cocontractant. Or, l'acte litigieux stipule que tous les biens qui seront acquis par les parties le seront en indivision sans aucune distinction entre la propriété et la jouissance. Cela exclut le régime de la tontine qui écarte toute propriété indivise puisque, par le jeu de la condition, seul le dernier vivant est considéré rétroactivement comme titulaire du droit de propriété, chaque partie ne disposant, avant la réalisation de la condition, que d'un droit de jouissance indivise.
Par conséquent, le jugement déféré est confirmé en ce qu'il a désigné un notaire instrumentaire chargé d'ouvrir les opérations de compte et de liquidation partage de la succession. Il lui appartiendra de prendre en compte le montant du prêt souscrit par la partenaire survivante en vue de financer l'achat du bien immobilier indivis ainsi que les dépenses exposées par elle dans l'intérêt de l'indivision.
- Cour d'appel de Nancy, Chambre civile 1, 23 mai 2017, RG N° 16/00964