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Le 17 novembre 2010
Il est enjoint au Premier ministre de prendre, dans un délai de six mois à compter de la notification de la présente décision, le décret en Conseil d'Etat nécessaire à l'application de l'article 1369-8 du Code civil.
La SOCIETE DOCUMENT CHANNEL, a demandé au Conseil d'Etat :
- 1°) d'annuler la décision implicite par laquelle le Premier ministre a rejeté sa demande tendant à ce que soient adoptés les décrets d'application de l'article 1369-8 du Code civil ;
- 2°) d'enjoindre au Premier ministre de prendre ces décrets dans un délai de deux mois à compter de la notification de la décision à intervenir, sous astreinte de 1.000 euros par jour de retard;
- 3°) de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

En vertu de l'article 21 de la Constitution, le Premier ministre assure l'exécution des lois et exerce le pouvoir réglementaire sous réserve de la compétence conférée au Président de la République pour les décrets en Conseil des ministres par l'article 13 de la Constitution; l'exercice du pouvoir réglementaire comporte non seulement le droit mais aussi l'obligation de prendre dans un délai raisonnable les mesures qu'implique nécessairement l'application de la loi, hors le cas où le respect d'engagements internationaux de la France y ferait obstacle.

Aux termes de l'article 1369-8 du Code civil, dans sa rédaction issue de l'ordonnance du 16 juin 2005 : {Une lettre recommandée relative à la conclusion ou à l'exécution d'un contrat peut être envoyée par courrier électronique à condition que ce courrier soit acheminé par un tiers selon un procédé permettant d'identifier le tiers, de désigner l'expéditeur, de garantir l'identité du destinataire et d'établir si la lettre a été remise ou non au destinataire. (...) / Lorsque l'apposition de la date d'expédition ou de réception résulte d'un procédé électronique, la fiabilité de celui-ci est présumée, jusqu'à preuve contraire, s'il satisfait à des exigences fixées par un décret en Conseil d'Etat. / Un avis de réception peut être adressé à l'expéditeur par voie électronique ou par tout autre dispositif lui permettant de le conserver. / Les modalités d'application du présent article sont fixées par décret en Conseil d'Etat}.

Ces dispositions ne permettent de présumer la fiabilité des informations relatives à l'identité de l'expéditeur et du destinataire et à la remise d'un courrier électronique afférent à la conclusion d'un contrat ou à ses modalités d'exécution, que dans la mesure où le procédé électronique utilisé est conforme à des prescriptions réglementaires fixées par décret en Conseil d'Etat; si l'absence de mesures réglementaires ne fait pas obstacle à la faculté, prévue par l'article 1369-8 du Code civil, d'employer un procédé électronique afin d'envoyer un courrier recommandé avec accusé de réception relatif à un contrat, elle ne permet toutefois pas de satisfaire à la présomption instituée par le législateur; en dépit des difficultés techniques éventuellement rencontrées par l'administration dans l'élaboration des textes dont l'article précité prévoit l'intervention, son abstention à les prendre à la date de la décision attaquée s'est prolongée au-delà d'un délai raisonnable; dans ces conditions, la décision implicite née le 31 mai 2009, par laquelle le Premier ministre a refusé d'édicter le décret prévu par les dispositions précitées de l'article 1369-8 du code civil méconnaît l'article 21 de la Constitution et doit, par suite, être annulée.

Aux termes de l'article L. 911-1 du Code de justice administrative :{ Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne morale de droit public (...) prenne une mesure d'exécution dans un sens déterminé, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision, cette mesure assortie, le cas échéant, d'un délai d'exécution.}

L'annulation de la décision implicite par laquelle le Premier ministre a refusé de prendre le décret d'application de l'article 1369-8 du Code civil en tant qu'il est relatif aux procédés techniques permettant d'établir une présomption d'envoi et de réception d'un courrier recommandé électronique, implique nécessairement l'édiction de ce décret; il y a lieu pour le Conseil d'Etat d'ordonner au Gouvernement d'édicter ce décret dans un délai de six mois à compter de la notification de la présente décision; il n'y a pas lieu d'assortir cette injonction d'une astreinte.
Référence: 
Référence: - CE, Ctx, 6e et 1re sous-sect., 22 oct. 2010 (req. n° 330.216)