Le notaire qui instrumente un acte de vente n'est tenu d'aucun devoir d'information et de conseil envers les tiers dont il n'a pas à protéger les intérêts et qui ne disposent pas d'un droit opposable aux parties.
Le vendeur, propriétaire d'un bien immobilier, en a confié la vente au notaire. Une promesse de vente ayant été signée le 2 octobre 2009, le vendeur a donné au notaire un mandat, qualifié d'irrévocable, de virer la somme de 200'000 euro à valoir sur le prix de vente, au profit de la banque. Par lettre du 2 avril 2010, cet ordre de virement a été confirmé à la banque par le notaire. Le 10 décembre suivant, jour de la réitération de la vente par acte authentique, le vendeur a signifié au notaire une lettre par laquelle il a indiqué révoquer le mandat et lui a demandé de tenir à sa disposition un chèque à son ordre représentant le solde net du prix de vente lui revenant. Conformément aux instructions du mandant, le notaire a libéré les fonds provenant de la vente entre les mains du vendeur. Le 4 novembre 2013, la banque a assigné le notaire en responsabilité et paiement de la somme de 200'000 euro, en réparation du préjudice subi.
Pour condamner le notaire à payer à la banque la somme de 40'000 euro en réparation du préjudice résultant de la perte de chance de mettre en place une procédure civile d'exécution, l'arrêt de la cour d'appel retient que le notaire était tenu, à l'égard de la banque, d'une obligation personnelle d'information portant sur la révocation du mandat, dès lors que le mandant ne justifiait pas en avoir lui-même informé la banque et qu'il appartenait au notaire, qui ne pouvait ignorer que la révocation n'était pas opposable au tiers bénéficiaire tant que celui-ci n'en avait pas été informé, de retenir le prix de la vente dans cette attente, de sorte qu'en acceptant de libérer ce prix entre les mains du vendeur le jour même de la vente, avant la notification effective de la révocation au tiers bénéficiaire, le notaire a commis une faute engageant sa responsabilité.
En statuant ainsi, la cour d'appel a violé l'art. 1382 du Code civil, devenu l'article 1240 du Code civil.
- Cour de cassation, Chambre civile 1, 3 mai 2018, RG n° 17-12.473, cassation, publié au Bull.