:Mme Y, venderesse, et la société Les Amaryllis, acquéreur, ont signé, le 29 mars 2009, un compromis de vente portant sur une maison d’habitation sise à Antibes, […], figurant au cadastre section BM n°68 pour 5 a et 75 ca, le vendeur déclarant qu’il avait été obtenu par la SNC Antibes-Carnot, un permis de construire pour un immeuble collectif d’habitation ayant une SHON de 2197 m² suivant arrêté du maire d’Antibes du 9 juillet 2008 et la vente étant conclue, notamment, sous la condition suspensive du transfert de ce permis au bénéfice de l’acquéreur au jour de la réitération authentique .
Par acte du même jour M. X, représentant la société Les Amaryllis, a pris l’engagement, pour cette société et pour toute société qui lui serait substituée, de verser à la Sarl Sélect Finances une rémunération égale à 3% hors taxes du prix d’acquisition au titre de son intervention dans les opérations de négociation ayant permis la conclusion du projet de vente, soit une somme de 45. 000 euro HT .
Le transfert n’ayant pas été obtenu à la date prévue de la réitération, la société l’Etoile d’Antibes, substituée à la société Les Amaryllis, a renoncé à cette condition suspensive et l’acte authentique a été signé le 25 septembre 2009; en revanche, la commission n’a pas été versée à cette date à la Sarl Sélect Finances .
Par un protocole d’accord en date du 27 octobre 2009, la Sarl Sélect Finances et la société l’Etoile d’Antibes sont convenues de subordonner le réglement de la somme de 45. 000 euro HT (soit 53. 820 euro TTC) due à la Sarl Sélect Finances au transfert du permis de démolir et du permis de construire au profit de la société l’Etoile d’Antibes, cette dernière versant entre les mains de maître A, avocat, un chèque de 53. 820 euro, pour conserver les fonds en qualité de séquestre jusqu’à la réalisation de ce transfert..
La société l’Etoile d’Antibes, soutenant n’avoir obtenu le transfert du permis de construire que moyennant l’engagement de respecter les engagements pris par la SNC Antibes-Carnot auprès de la mairie d’Antibes, notamment celui de réaliser 6 logements sociaux au 1er étage, a fait assigner Mme Y, M. C-D Z et la Sarl Sélect Finances en paiement de dommages et intérêts pour dol et en restitution de la somme séquestrée chez l'avocAt A ; elle s’opposait au versement de la commission de 53. 820 euro entre les mains de la Sarl Sélect Finances en soutenant que celle-ci devait être privée de son droit à commission faute d’être parvenue à obtenir le tranfert du permis de construire dans les conditions figurant au permis .
Il a été définitivement jugé par l’arrêt de la Cour d’appel d’Aix-en-Provence du 28 mai 2015, non cassé sur ces différents points, que Mme Y, venderesse, et M. C-D Z, son mandataire, ont commis une réticence dolosive à l’égard de la société l’Etoile d’Antibes, acquéreur, dès lors qu’ils avaient connaissance de la condition de construction dans l’immeuble à bâtir d’un pourcentage de logements sociaux ressortant de la signature de la précédente promesse de vente consentie à la SNC Antibes Carnot, alors qu’au contraire, il est établi que la société l’Etoile d’Antibes ignorait la nécessité d’affecter les appartements du 1er étage de l’immeuble à des logements sociaux ; la cour a cependant débouté la société l’Etoile d’Antibes de sa demande de dommages et intérêts en retenant que le préjudice réclamé était dépourvu de lien de causalité avec les fautes retenues .
La société l’Etoile d’Antibes et la Sarl Sélect Finances reviennent devant la cour de renvoi sur la seule question du droit à commission de cette dernière au regard des difficultés de l’acquéreur à obtenir ce transfert aux conditions prévues et du manquement reproché à la Sarl Sélect Finances et à son gérant, M. C-D Z .
Les développements de la Sarl Sélect Finances sur l’absence de dol et sur la connaissance qu’avait ou qu’aurait dû avoir la société l’Etoile d’Antibes, professionnel de l’immobilier, de l’exigence communale relative aux logements sociaux sont inopérants au regard du caractère définitif des dispositions rappelées ci-dessus quant à la réticence dolosive dont la société l’Etoile d’Antibes a été victime de la part de Mme Y et de M. C-D Z, son mandataire, qui est également le gérant de la Sarl Sélect Finances .
La Sarl Sélect Finances fait ensuite valoir que le transfert du permis de construire étant un droit, la ville d’Antibes ne pouvait subordonner ce transfert à l’exécution de conditions qui n’étaient pas légalement requises et qu’en tout état de cause un arrêté de transfert tacite était intervenu le 8 octobre 2009 .
Mais le transfert tacite du permis n’avait eu lieu qu’au profit de Mme Y qui l’avait demandé le 8 juillet 2009, et non au nom de la société l’Etoile d’Antibes ; ainsi le problème du transfert du permis à la société l’Etoile d’Antibes était encore entier au moment de la signature du protocole d’accord du 27 octobre 2009 et les difficultés dans l’exécution de ce transfert étaient rappelées dans le préambule de celui-ci ; la société l’Etoile d’Antibes établit avoir dû, pour obtenir le transfert du permis à son nom, reprendre les engagements souscrits par la SNC Antibes-Carnot auprès de la commune par lettres des 2 juin et 23 juin 2008 et rappelés par la ville dans son courrier du 9 novembre 2009 ; certes, l’obligation de réaliser 20 % de logements sociaux ne figurait pas de manière expresse dans le permis, mais la demande de permis avait été faite moyennant l’engagement irrévocable pris par le pétitionnaire et la société l’Etoile d’Antibes n’avait pas le temps ni la possibilité de contester un éventuel refus de la commune, au regard des impératifs de l’opération de promotion immobilière projetée .
C’est en vain que la Sarl Sélect Finances oppose enfin que la société l’Etoile d’Antibes ne pourrait se prévaloir d’un préjudice équivalent au montant de la commission due, alors que la société l’Etoile d’Antibes invoque la faute dolosive de la Sarl Sélect Finances dans l’exécution de sa mission d’intermédiaire et sollicite la nullité des deux actes d’engagement conclus avec cette société en raison de la faute commise .
Il a été retenu que M. C-D Z, gérant de la Sarl Sélect Finances, avait connaissance des obligations qui avaient été souscrites par la SNC Antibes-Carnot auprès de la ville d’Antibes et qu’il connaissait donc très bien les raisons pour lesquelles cette dernière tardait à transférer le permis en cherchant à imposer au bénéficiaire les engagements pris par le titulaire du permis ; qu’il en avait connaissance au moment de la signature du compromis et donc de la convention d’honoraires, le 27 mars 2009, mais également, bien sûr, lors de la signature du protocole du 27 octobre 2009 et qu’il ne l’a pas révélé à la société l’Etoile d’Antibes, alors même que celui-ci était conclu à raison du retard dans le transfert du permis de construire .
Le dol commis par la Sarl Sélect Finances, représentée par son gérant, M. C-D Z, à l’égard de la société l’Etoile d’Antibes lors de la signature de l’acte du 27 mars 2009 et du protocole du 27 octobre 2009 est de nature à en justifier la nullité, la société l’Etoile d’Antibes exposant à juste titre qu’elle n’aurait jamais accepté de verser une commission d’entremise à cette société si elle avait su qu’elle était trompée sur les conditions du transfert du permis de construire à son profit .
Il convient en conséquence de faire droit aux demandes de la société l’Etoile d’Antibes et de dire que la Sarl Sélect Finances, intermédiaire, n’a pas droit au paiement de la commission prévue dans ces deux actes ; la somme de 53. 820 euro n’est plus séquestrée entre les mains de maître A qui s’en est libéré en exécution de l’arrêt cassé et il convient en conséquence de condamner la Sarl Sélect Finances à payer cette somme à la société l’Etoile d’Antibes.
- Cour d'appel d'Aix-en-Provence, Chambre 1-1, 24 septembre 2019, RG n° 18/18380