Les consorts Y sollicitent l’infirmation du jugement en ce qu’il a jugé prescrite la demande formée par M. Z Y à titre personnel en sa qualité d’usufruitier de la parcelle A n° 30 et l’a déclaré en conséquence irrecevable en son action.
L’action en démolition intentée par les consorts Y repose sur deux fondements, à savoir :
- sur l’art. L.480-13 du Code de l’urbanisme pour les constructions ayant fait l’objet d’un permis de construire ;
- sur l’art. 1382 du Code civil pour les constructions édifiées sans permis.
Il résulte des dispositions de l’art. L.480-13,a) du Code de l’urbanisme dans sa version applicable que lorsqu’une construction a été édifiée conformément à un permis de construire, le propriétaire ne peut être condamné par un tribunal de l’ordre judiciaire à la démolir du fait de la méconnaissance des règles d’urbanisme ou des servitudes d’utilité publique que si, préalablement, le permis a été annulé pour excès de pouvoir par la juridiction administrative. L’action en démolition doit être engagée au plus tard dans le délai de deux ans qui suit la décision devenue définitive de la juridiction administrative.
En l’espèce, le permis accordé le 1er mars 1997 à M. B C pour l’édification de son abri de jardin n’a pas été annulé par une juridiction de l’ordre administratif de sorte que la demande de démolition de cet abri formée par les consorts Y sur ce fondement est irrecevable.
S’agissant de la demande de démolition fondée sur l’art. 1382 du Code civil pour les constructions édifiées sans permis, elle se prescrivait par dix ans à compter de la manifestation du dommage ou de son aggravation sous l’empire de l’ancien art. 2270-1 du Code civil et cette prescription a été réduite à cinq ans par la loi du 17 juin 2008.
En l’espèce, il résulte des pièces produites que B C a transformé son abri de jardin pour en faire son habitation principale entre 1999, année au cours de laquelle il a raccordé ce local à l’électricité et au téléphone, et l’an 2000, au cours duquel il a informé les services fiscaux de la transformation de cet abri en son habitation principale.
Ce changement de destination de l’abri de jardin a bien été enregistré par les services fiscaux ainsi qu’en témoigne la fiche d’évaluation foncière des propriétés bâties du 12 janvier 2001 qui décrit le bien comme étant une maison de trois pièces d’une surface de 25 m2.
La manifestation du dommage résultant de la transformation de cet abri en résidence principale n’est donc pas née à compter de l’année 2007, contrairement à ce que soutiennent les consorts Y, mais à compter de la fin de l’année 2000, après que B C s’est installé « à demeure » dans ce local (réception du courrier à cette adresse à compter de l’année 2000 et délivrance de sa carte d’identité à cette adresse en 2002) au vu et au su de l’administration et des tiers.
La prescription de l’action expirait par conséquent le 19 juin 2010 (après l’entrée en vigueur de la loi du 17 juin 2008).
Or, les consorts Y ont introduit leur action en démolition le 23 octobre 2012, soit postérieurement à l’écoulement du délai de prescription.
Le jugement sera donc confirmé en ce qu’il a déclaré prescrite l’action intentée par Z Y sur le fondement de l’article 1382 du code civil.
Concernant X Y, c’est à bon droit que le premier juge a relevé qu’elle bénéficiait d’une suspension du délai de prescription en vertu de l’ancien art. 2252 du Code civil devenu l’art. 2235 du même code, s’agissant d’une mineure née le […].
Sur le fond, X Y ne justifie pas du caractère sérieux et plausible de l’augmentation des risques sanitaires et sécuritaires qu’elle subirait « in concreto » consécutivement à la transformation de l’abri de jardin de B C en habitation principale.
En effet, ni l’article de presse du journal l’indépendant du 6 novembre 2015 intitulé «La guerre contre la cabanisation est ouverte» ni la « Charte de mobilisation et de coordination dans le cadre de la lutte contre la cabanisation dans les Pyrénées Orientales » ne permettent, en raison du caractère général des enjeux et des motifs de cette mobilisation, de rapporter la preuve du préjudice direct et personnel que X Y prétend subir et qu’il lui incombe de démontrer.
Elle ne démontre pas davantage la réalité du préjudice qui résulterait d’une prétendue limitation au droit de se clore.
Elle est donc être déboutée de toutes ses prétentions et le jugement sera confirmé sur ce point.
- Cour d'appel de Montpellier, 1re chambre a, 26 septembre 2019, RG n° 15/07980