Les consorts X-Y demandent à la cour de juger que, sur la façade ouest de leur maison donnant sur le fonds de Mme Z, la plus grande de ces ouvertures ne crée aucun risque d’indiscrétion à l’égard de celle-ci, et la plus petite de ces ouverture existait en l’état depuis plus de trente ans.
Mme Z ne forme aucune demande en cause d’appel sur ce point.
L’art. 678 du Code civil interdit au propriétaire d’un bâtiment de pratiquer dans un mur une ouverture donnant une vue droite sur le fond voisin, si la limite de celui-ci se situe à moins de 1,90 mètre de l’ouverture.
Seul le fait que le fonds ou la partie du fonds sur lequel s’exerce la vue soit déjà grevés d’une servitude de passage au profit du fonds qui en bénéficie ou le fait que la vue ne cause aucun risque d’indiscrétion, sont susceptibles de rendre inapplicables ces dispositions.
Les art. 676 et 677 du Code civil prévoient qu’à défaut de respecter la distance susmentionnée, les seules ouvertures possibles doivent être faites avec un verre dormant, et à une hauteur minimum par rapport au plancher de la pièce à éclairer de 2,60 mètres si celle-ci se situe au rez-de-chaussée et de 1.90 mètre si elle se situe dans les étages.
Les consorts X-Y ne contestent pas que les deux ouvertures contestées par Mme Z se situent à moins de 1,90m de la limite du fonds de celle-ci.
Les pièces versées au dossier et notamment les photographies annexées aux divers procès-verbaux de constat d’huissier montrent que la plus grande de ces ouvertures offre, sans adopter de position particulière, une vue droite sur le fonds de Mme Z.
Il est encore constant que les consorts X-Y ne bénéficient d’aucune servitude de passage sur l’espace sur lequel s’exerce la vue qu’ils peuvent avoir depuis cette ouverture.
Le fait que la partie du fonds sur laquelle s’exerce cette vue est un jardin, même à considérer celui-ci laissé en friche, n’est pas de nature à écarter l’application de l’art. 678 du code précitél, dès lors que rien ne vient protéger Mme Z d’un risque d’indiscrétion lorsqu’elle s’y trouve de sorte que cette ouverture est illégale.
Le panneau de bois oblitérant la vue qui, selon les propres termes des intimés, a une fonction temporaire afin d’apaiser le conflit avec leur voisine, ne peut être considéré comme une régularisation de cet état.
Dès lors, les consorts R-Y seront condamnés à transformer l’ouverture, en mettant en oeuvre un jour de souffrance munie d’un verre translucide à châssis dormant à une hauteur minimum de 2.60 mètres du plancher, par confirmation du jugement et ce, dans les délai et conditions d’astreinte fixés par le premier juge, le délai courant toutefois à compter de la signification du présent arrêt.
S’agissant de l’ouverture la plus petite, les intimés versent au dossier une attestation de leur auteur, Mme B, indiquant, selon ses propres termes, que cette lucarne existait déjà lorsqu’elle a acquis ce bien en 1985, qu’elle n’a effectué dessus aucune modification et que le verre la composant a toujours été transparent.
Ils produisent également l’attestation de M. C, l’artisan qui est intervenu sur cette ouverture, comme le montre une facture datée du 15 février 2014, lequel affirme qu’il a remplacé à l’identique un châssis fixe et un verre clair.
Ces attestations prouvent que cette fenêtre existe en l’état depuis au moins 1985, soit plus de trente ans avant l’assignation introductive d’instance, si bien que l’irrégularité de son percement est à ce jour prescrite et qu’il doit être fait droit à la demande de maintien en l’état de cette ouverture, par infirmation du jugement sur ce point.
- Cour d'appel de Bordeaux, 2e chambre civile, 26 décembre 2019, RGn° 17/01060